L'ÉCLIPSÉ, REVUE COMIQUE ILLUSTRÉE
22 Avril 1877.
LA SEMAINE COMIQUE
— Et il y a des gens qui osent affirmer que la Révolution
de 1789 a aboli les privilèges!
LE FIACRE JAUNE
« Si les fiacres parlaient?... n Certes, ce n'est pas au
hasard qu'il faut attribuer la couleur de leurs stores.
Les stores sont rouges, et ils savent s'abaisser avec
les pudeurs d'une paupière de vierge. J'ai connu un
gredin de fiacre, que j'ai l'intention d'acheter si je
le retrouve; l'ayant acheté, je m'en servirai en
guise de coffre, et, dans ce coffre, je mettrai ses
lettres.
C'était par une belle matinée de juin; le soleil se
tordait en tourbillons d'or dans le feuillage des ar-
bres des Champs-Elysées.
J'étais assis à côté du cocher :
— Vous passez des examens, avant d'être cocher?
lui dis-je.
— Oui, monsieur.
— Et comment faites-vous pour apprendre la to-
pographie de Paris ?
— Comme vous. On s'asseoit près d'un camarade,
qui vous trimballe. On m'a demandé, à moi, le che-
min le plus court de toutes les barrières à l'Arc-de-
Triomphe.
— C'est un théorème de géométrie : Trouver en
rues brisées le plus court chemin a"un point à un
autre.
Ici, mon cocher allongea un magistral coup de
fouet à l'attelage d'un confrère, qui le croisait de
trop près.
Deux chapitres du catéchisme poissard étant
échangés entre les deux automédons, le mien conti-
nua d'un air tout à fait tranquille :
— On s'attrape comme ça, à tous les coins. C'est
des habitudes. Tout le monde se connaît, et ça fait
passer le temps.
— C'est comme les journalistes.
— Ne me parlez pas de ces gens-là, me dit-il d'un
air sombre. Les journalisses?... Les journalisses fe-
raient mieux d'agrafer les propriétaires et de laisser
les cochers tranquilles. Quand ces animaux-là ne
peuvent pas se démolir entre eux, y démolissent les
autres.
Je descendis.
— A quoi, pensais-je, ces hommes rêvent-ils du
haut de leur siège dominateur? Quels projets s'agi-
tent sous leur chapeau de cuir bouilli?
Je n'avais donné que trois sous de pourboire à
mon cocher, qui s'était éloigné en me lançant cette
apostrophe :
Va donc, pané!... — Hue ! la Gambade !
C'était le nom de son cheval.
— Leur vie, poursuivis-je, est consacrée tout entière
22 Avril 1877.
LA SEMAINE COMIQUE
— Et il y a des gens qui osent affirmer que la Révolution
de 1789 a aboli les privilèges!
LE FIACRE JAUNE
« Si les fiacres parlaient?... n Certes, ce n'est pas au
hasard qu'il faut attribuer la couleur de leurs stores.
Les stores sont rouges, et ils savent s'abaisser avec
les pudeurs d'une paupière de vierge. J'ai connu un
gredin de fiacre, que j'ai l'intention d'acheter si je
le retrouve; l'ayant acheté, je m'en servirai en
guise de coffre, et, dans ce coffre, je mettrai ses
lettres.
C'était par une belle matinée de juin; le soleil se
tordait en tourbillons d'or dans le feuillage des ar-
bres des Champs-Elysées.
J'étais assis à côté du cocher :
— Vous passez des examens, avant d'être cocher?
lui dis-je.
— Oui, monsieur.
— Et comment faites-vous pour apprendre la to-
pographie de Paris ?
— Comme vous. On s'asseoit près d'un camarade,
qui vous trimballe. On m'a demandé, à moi, le che-
min le plus court de toutes les barrières à l'Arc-de-
Triomphe.
— C'est un théorème de géométrie : Trouver en
rues brisées le plus court chemin a"un point à un
autre.
Ici, mon cocher allongea un magistral coup de
fouet à l'attelage d'un confrère, qui le croisait de
trop près.
Deux chapitres du catéchisme poissard étant
échangés entre les deux automédons, le mien conti-
nua d'un air tout à fait tranquille :
— On s'attrape comme ça, à tous les coins. C'est
des habitudes. Tout le monde se connaît, et ça fait
passer le temps.
— C'est comme les journalistes.
— Ne me parlez pas de ces gens-là, me dit-il d'un
air sombre. Les journalisses?... Les journalisses fe-
raient mieux d'agrafer les propriétaires et de laisser
les cochers tranquilles. Quand ces animaux-là ne
peuvent pas se démolir entre eux, y démolissent les
autres.
Je descendis.
— A quoi, pensais-je, ces hommes rêvent-ils du
haut de leur siège dominateur? Quels projets s'agi-
tent sous leur chapeau de cuir bouilli?
Je n'avais donné que trois sous de pourboire à
mon cocher, qui s'était éloigné en me lançant cette
apostrophe :
Va donc, pané!... — Hue ! la Gambade !
C'était le nom de son cheval.
— Leur vie, poursuivis-je, est consacrée tout entière
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
La semaine comique
Weitere Titel/Paralleltitel
Serientitel
L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
S 25 / T 6
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)
Literaturangabe
Rechte am Objekt
Aufnahmen/Reproduktionen
Künstler/Urheber (GND)
Reproduktionstyp
Digitales Bild
Rechtsstatus
Public Domain Mark 1.0
Creditline
L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré, 10.1877, S. 1_342
Beziehungen
Erschließung
Lizenz
CC0 1.0 Public Domain Dedication
Rechteinhaber
Universitätsbibliothek Heidelberg