L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré (10.1877)

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L'ÉCLIPSÉ, REVUE COMIQUE ILLUSTRÉE

17 Juin 1877.

LE MARCHÉ AUX NOUVELLES

La politique arrive avec le mauvais temps, c'est
sa saison. Le journaliste chargé de raconter les mille
cancans du jour, écume légère de la grande mer
parisienne, doit arriver avec les hirondelles, tailler
sa plume, et demandera chacun de quoi il est ques-
tion.

Au premier abord, rien n'est plus simple. A Paris,
chaque jour voit surgir un fait qui captive la curio-
sité publique : c'est un procès, une pièce de théâtre,
un livre, une polémique, une réception académique,
uu accident, une revue, une course, une exposition,
un mariage, une étoile qui file ou qui se lève, un
duel, un scandale, un mort, un discours de la Cham-
bre, une bataille, un feu d'artifice, un journal, une
chanson, une caricature, une cocote en papier, un
cancan, un canard, en un mot, ce qui peut amuser
Paris un jour, une heure, une minute.

Voilà la vie de Paris, multiplie, accidentée, dévo-'
rante. Les hommes et les choses vont vite ; les vivants
et les morts, tout semble obéir à une loi d'activité
fiévreuse. On dirait que ce siècle est pressé de finir,
et qu'il précipite sa course aveugle pour connaître
l'énigme de sa destinée.

D'ici là, cependant, il passera bien de l'eau sous
le pont des Arts, et bien des académiciens des-
sus.

Les événements les plus récents sont presque
légendaires. Depuis longtemps la mode s'est impo-
sé d'écrire l'histoire jour par jour, heure par heure,
et tous les journaux se livrent à la course au clocher
de l'actualité.

Pour faire comme les autres, j'avais acheté un
carnet en maroquin, joli, parfumé, sur lequel je
comptais inscrire les événements, les nouvelles, les
mots en circulation, comme on pique des papillons
sur un disque de liège.

C'est une bonne méthode ; mais une mauvaise
méthode, c'est de prendre des notes trop sommaires.
Cuvier reconstruisait avec une dent les animaux
antédiluviens ; reconstruire un fait ou une anecdote
avec un mot écrit au crayon est une autre affaire.
Quand je voulus rassembler mes souvenirs, les notes
furent, à mes yeux consternés, des hiéroglyphes
aussi indéchiffrables qu'une épitaphe de Pharaon.

Évidemment, il y avait là matière à une causerie
bien bourrée ; mais j'eus beau me creuser la tête,
évoquer mes souvenirs, je ne retrouvais plus la
filière de mes idées. Il fallait en prendre son parti et
chercher autre chose.

Dans cette situation, j'entre dans un bureau de
journal où les rédacteurs devisaient en fumant des
cigares. Ceux qui connaissent les bureaux de rédac-
tion savent bien' une chose, c'est que les conversa-

TETES ENCADRÉES

Voudrait bien poser en Dana,é avec, un Jupiter quelconque.

N'aime que ses fleurs et ses serins.