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Hulot, Jean [Ill.]; Fougères, Gustave [Ill.]
Sélinonte: la ville, l'acropole et les temples ; [Colonie dorienne en Sicile] — Paris, 1910

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https://doi.org/10.11588/diglit.6832#0133
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PREMIÈRE DESTRUCTION DE LA VILLE (409)

117

d'énormes pertes en rase campagne. Une part de responsabilité retombe aussi
sur les alliés de Sélinonte, sur Agrigente. Géla, Syracuse. Leur lenteur laissa
la ville au dépourvu. Le particularisme invétéré des cités grecques devait toujours
trahir les intérêts généraux de l'hellénisme. Déjà Annibal ébranlait les murs de
Sélinonte, et Syracuse s'attardait à vider sa querelle avec ses voisins chalcidiens.
D'ailleurs, la diplomatie de Sélinonte paraît avoir montré aussi peu de prévoyance
que le commandement militaire. Elle s'était lancée d'un cœur léger dans cette
guerre imprudente, sans avoir rien préparé, ni moyens de défense, ni alliance
effective. Une telle incurie ne pouvait être le fait que d'un gouvernement
ambitieux et avide de popularité, mais incohérent, tiraillé en plusieurs sens,
incapable d'idées nettes et d'action énergique. Il n'avait pas su se décider entre
les espérances contradictoires des partis adverses : avec les uns, il escomptait la
bienveillance des Carthaginois sans lui donner de gages; avec les autres, le
dévouement des cités grecques, sans le stimuler à temps. Le moment critique le
surprit en plein désarroi.

Devant l'énergie d'une puissance comme Carthage, consciente de ses desseins
et cohérente dans l'action, la politique inconsistante et décousue des cités grecques
mettait l'hellénisme en bien fâcheuse posture. C'est ce qu'Hermocrate le Syra-
cusain avait voulu faire comprendre à ses concitoyens en leur dénonçant,
en 423, les ambitions d'Athènes, et en prêchant la réconciliation contre l'ennemi
commun'. La chute de Sélinonte, suivie de celle d'Himère, inaugurait le déman-
tèlement de l'hellénisme en Sicile. Sélinonte fut rayée du monde grec comme
unité politique. Ce que le vainqueur en laissa subsister n'était plus que l'ombre
de l'ancienne cité, une bourgade satellite de Carthage. L'apparente générosité
d'Annibal, qui tolérait ce semblant d'existence matérielle, était calculée. Avant-
poste de l'hellénisme, en face de la Libye et sur les confins de la province
punique de Sicile, observatoire gênant qui pouvait signaler aux Grecs l'approche
des flottes carthaginoises, concurrente commerciale et maritime, Sélinonte devait
être brisée en plein apogée, juste au moment où elle offrait une proie lucrative.

Mais elle ne devait pas disparaître complètement, grâce à sa position dont
le vainqueur avait besoin. Il suffisait à Carthage de garder là un poste à elle,
propice à ses débarquements, d'où elle surveillerait le territoire dont elle tirait
tribut. Sélinonte allait se relever de son bûcher, vivante encore, mais mutilée,
désormais inutile à l'hellénisme, et toujours à la merci du plus fort.

1. Thucydide, IV, ,8.

SÉLINONTE.
 
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