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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 5.1922

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Nr. 4
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Homolle, Théophile: Léon Heuzey (1831 - 1922)
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Réau, Louis: Un type d'art pompadour: "L'Offrande du cœur"
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https://doi.org/10.11588/diglit.24938#0233

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

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mentaire. Mais on nous permettra d insister sur son intérêt iconographique.
L’Offrande du cœur de la collection F. de Mély prend place dans une série
très curieuse, dont l’importance dans la sculpture française du xvme siècle
n’a peut-être pas été suffisamment mise en valeur.

*

* *

Ce symbolisme du cœur offert en hommage ou en holocauste est de tous
les temps et on en peut suivre la trace depuis l’antiquité jusqu’à la dévotion
moderne au Sacré-Cœur de Jésus. La sculpture française du xvie siècle nous
en offre des exemples célèbres : dans l’église de Bar-le-Duc le macabre sque-
lette du Transiévidé par l'imagier lorrain Ligier Richier et, au Musée de Dijon,
la statue agenouillée à'Antoinette de Fontette qui, de ses deux mains, présente
un cœur écarlate, traduction plastique de sa devise : (( Mon cœur à Dieu ».

Vers le milieu du xvuT siècle, on voit reparaître ce motif, mais avec une
signification toute différente. Il cesse d'être réservé exclusivement à la sculp-
ture funéraire. Le cœur offert n'est plus le symbole de l’amour divin ou
humain plus fort que la mort, delà fidélité par delà le tombeau, mais l’at-
tribut allégorique de l’amitié. Dans le symbolisme de l’art du xvuT siècle qui
mériterait d’être étudié d’aussi près que l’iconographie du Moyen âge, toutes
les vertus sont caractérisées par des attributs invariables qu’il faut apprendre
à déchiffrer et à interpréter comme les caractéristiques des saints dans l’art
médiéval. De même que la Bonté paternelle est symbolisée par le pélican, la
Piété filiale par la cigogne, la Vigilance par le coq, la Fidélité par le chien,
l’Amitié se reconnaît à un cœur offert et à une couronne de fleurs de toutes
les saisons.

C’est à l’influence personnelle de Mme de Pompadour qu’il faut attribuer le
regain de faveur de ces allégories de l’Amitié qui se multiplient dans l’art
français entre 1760 et 1766. Tous les contemporains s’accordent pour certi-
fier qu’à partir de 1761 la marquise n’est plus que l’amie de Louis XV.
« Mme de Pompadour, note son fidèle mémorialiste le duc de Luynes, qui de
maîtresse est devenue amie du Roi, a peut-être par ce nouveau titre plus de cré-
dit que par le premier. » Le ministre d’Argenson écrit le 2 février 1761 : (( La
Marquise jure ses grands dieux qu'il n'y a plus que de l’amitié entre le Roi
et elle. Aussi se fait-elle faire pour Bellevue une statue où elle est représen-
tée en déesse de l'Amitié. » Enfin, fauteur de la correspondance apocryphe
de Mrae de Pompadour lui prête cette confidence désabusée : « Pour moi je
commence à sentir que l’amitié est la vie de l’âme. L’amour est un plaisir
pour un temps ; mais l’amitié en est un de toutes les saisons et je prépare
mon cœur à le goûter avec toutes ses délices. »
 
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