UNE FAMILLE D’ARTISTES FRANCS-COMTOIS: LES ROSSET ia3
Quand ses dévots clients lui reprochaient cette contradiction, Joseph Rosset leur
répondait avec une bonne humeur toute comtoise : « On a bien peint le diable et le
serpent ! Voltaire et Rousseau ne sont pas plus méchants que le premier, ni plus
laids que le second. »
Lui et ses fils sont, en effet, devenus les imagiers de la philosophie. Il est le premier
sculpteur devant qui Voltaire, son illustre voisin de Ferney, ait consenti à poser. Il
multiplie en bustes, statuettes, bas-reliefs, tabatières, la figure vénérée du patriarchel,
représente également Rousseau, qu’il lui associe quelquefois, sans parler de
Montesquieu et de d’Alembert.
Voltaire et Rousseau sont aussi
encore les sujets favoris des
bustes de Jacques Rosset ; Fran-
çois exécute un buste de d’Alem-
bert ; Antoine s'attaque encore à
Rousseau et à Buffon.
C’est donc vraiment un grand
jour, et qui décide de l’avenir de
toute la famille, que celui de
l’automne 1766 où, pour la
première fois, en compagnie de
son ami, l’avocat Christin,
Joseph Rosset sort de Saint-
Claude en voiture, et prend le
chemin de Ferney. Quel accueil
le philosophe réservait-il au
sculpteur? On comprend que
cette question ait préoccupé les
deux amis au point de les rendre
insensibles — si l’on en croit le
joli récit de M. Fischer — aux
beautés pourtant si séduisantes
de la vallée de Fressus et de la
courbe de Mijoux. Leurs appré-
hensions ne se dissipèrent un
peu qu’au moment où le col de la Faucille s’ouvrant brusquement sur les Alpes
leur permit de voir, à quelques 2 5oo pieds au-dessous d’eux, le château de Ferney
el la fumée tout hospitalière qui s’en échappait. Voltaire acheva de les rassurer: au
dire du marquis de Villette, la bonhomie du sculpteur le subjugua, et ce fut avec
une parfaite bonne grâce qu’il ôta sa perruque tandis qu’il jouait aux échecs «pour
lui livrer sa tête ».
BUSTE DE VOLTAIRE
MARBRE, PAR J. ROSSET
(Musée de Dole.)
r. V., outre le buste que nous reproduisons ici, les statuettes, médaillon et buste repro-
duits naguère dans l’article de M. Ch. Oulmont, Portraits inédits de Voltaire, publié dans
la Gazette des Beaux-Arts, août 1916, p. 397, 3q8, 4oo et 4oi.
Quand ses dévots clients lui reprochaient cette contradiction, Joseph Rosset leur
répondait avec une bonne humeur toute comtoise : « On a bien peint le diable et le
serpent ! Voltaire et Rousseau ne sont pas plus méchants que le premier, ni plus
laids que le second. »
Lui et ses fils sont, en effet, devenus les imagiers de la philosophie. Il est le premier
sculpteur devant qui Voltaire, son illustre voisin de Ferney, ait consenti à poser. Il
multiplie en bustes, statuettes, bas-reliefs, tabatières, la figure vénérée du patriarchel,
représente également Rousseau, qu’il lui associe quelquefois, sans parler de
Montesquieu et de d’Alembert.
Voltaire et Rousseau sont aussi
encore les sujets favoris des
bustes de Jacques Rosset ; Fran-
çois exécute un buste de d’Alem-
bert ; Antoine s'attaque encore à
Rousseau et à Buffon.
C’est donc vraiment un grand
jour, et qui décide de l’avenir de
toute la famille, que celui de
l’automne 1766 où, pour la
première fois, en compagnie de
son ami, l’avocat Christin,
Joseph Rosset sort de Saint-
Claude en voiture, et prend le
chemin de Ferney. Quel accueil
le philosophe réservait-il au
sculpteur? On comprend que
cette question ait préoccupé les
deux amis au point de les rendre
insensibles — si l’on en croit le
joli récit de M. Fischer — aux
beautés pourtant si séduisantes
de la vallée de Fressus et de la
courbe de Mijoux. Leurs appré-
hensions ne se dissipèrent un
peu qu’au moment où le col de la Faucille s’ouvrant brusquement sur les Alpes
leur permit de voir, à quelques 2 5oo pieds au-dessous d’eux, le château de Ferney
el la fumée tout hospitalière qui s’en échappait. Voltaire acheva de les rassurer: au
dire du marquis de Villette, la bonhomie du sculpteur le subjugua, et ce fut avec
une parfaite bonne grâce qu’il ôta sa perruque tandis qu’il jouait aux échecs «pour
lui livrer sa tête ».
BUSTE DE VOLTAIRE
MARBRE, PAR J. ROSSET
(Musée de Dole.)
r. V., outre le buste que nous reproduisons ici, les statuettes, médaillon et buste repro-
duits naguère dans l’article de M. Ch. Oulmont, Portraits inédits de Voltaire, publié dans
la Gazette des Beaux-Arts, août 1916, p. 397, 3q8, 4oo et 4oi.