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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
bataille. Bellori l’a décrit ; Mme Tietze-Gonrat1 a publié le bas-relief qui le
représente au palais Spada. Le sculpteur avait suivi le texte de Philostrate
en y ajoutant, selon son habitude, quelques traits d’esprit ; celui-ci, par
exemple : un troisième enfant, arbitre du combat, brandissait au-dessus de
la tête du vainqueur, une couronne de laurier, « in premio di viltoria
immortale ».
Un des ivoires de Londres reproduit ce groupe, mais affadi aussi bien
dans les détails inventés que dans l’exécution. Je l’ai retrouvé dans des
médaillons en marbre, de travail très médiocre, mis dans le commerce, l’an
dernier, à Bruxelles.
Rien de flamand, comme on le dit souvent, dans de telles compositions.
Duquesnoy n’avait d'yeux que pour Rome et l'antique. Et je me demande
si, pour les Amours lutteurs, il n'utilisa pas tel bas-relief de la galerie Giusti-
niani. Ce bas-relief, il le connut sûrement, puisqu'il fut gravé entre 1628
et 1631 dans le volume de la Galleria Giustiniani dont Sandrart dirigeait
l’exécution et auquel lui-même collaborait. Il ne fit que s’en inspirer ou,
comme dit Bellori « ne vario Vinvenzione ». Son imagination avait besoin
d’être stimulée, il ne copiait jamais.
*
* *
Au fait, ses procédés de composition, nous les découvrons au plus juste
dans un groupe en bronze de Mercure et VAmour, œuvre importante, ce me
semble, pour l’intelligence de son art.
(( François », nous dit Bellori, « fit pour le prince Giustiniani un Mercure
haut de trois palmes environ qui se retourne et se plie en arrière, regardant un
petit Amour qui lui attache aux pieds des talonnières ; ceci en même temps
(in accompagnamento) qu un Hercule antique en métal. Après, il fit comme
pendant (compagno) au Mercure un Apollon dans la pose et l’attitude de
l’Antinoüs du Belvédère. »
Quelques remarques: l’Hercule étant de métal, autant dire de bronze, le
Mercure l’était sans doute aussi. Quant à l’Apollon, il procédait de cet
Hermès du Belvédère qui fut regardé à bon droit comme le plus beau des
(( Praxitèle » jusqu’au moment où fut retrouvé Y Hermès d’Olympie.
Duquesnoy, qui choisit pour modèle de sa Sainte Suzanne YUranie du
Capitole, décidément avait du goût. Mais revenons à son œuvre.
Quand fut-elle exécutée ? Nous pouvons répondre en toute assurance : entre
1628 et 1631. C’est Sandrart, en effet, qui mit Duquesnoy en relations avec
le marquis Giustiniani, après l’avoir fait entrer à son service en vue du travail
. Loc. cit.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
bataille. Bellori l’a décrit ; Mme Tietze-Gonrat1 a publié le bas-relief qui le
représente au palais Spada. Le sculpteur avait suivi le texte de Philostrate
en y ajoutant, selon son habitude, quelques traits d’esprit ; celui-ci, par
exemple : un troisième enfant, arbitre du combat, brandissait au-dessus de
la tête du vainqueur, une couronne de laurier, « in premio di viltoria
immortale ».
Un des ivoires de Londres reproduit ce groupe, mais affadi aussi bien
dans les détails inventés que dans l’exécution. Je l’ai retrouvé dans des
médaillons en marbre, de travail très médiocre, mis dans le commerce, l’an
dernier, à Bruxelles.
Rien de flamand, comme on le dit souvent, dans de telles compositions.
Duquesnoy n’avait d'yeux que pour Rome et l'antique. Et je me demande
si, pour les Amours lutteurs, il n'utilisa pas tel bas-relief de la galerie Giusti-
niani. Ce bas-relief, il le connut sûrement, puisqu'il fut gravé entre 1628
et 1631 dans le volume de la Galleria Giustiniani dont Sandrart dirigeait
l’exécution et auquel lui-même collaborait. Il ne fit que s’en inspirer ou,
comme dit Bellori « ne vario Vinvenzione ». Son imagination avait besoin
d’être stimulée, il ne copiait jamais.
*
* *
Au fait, ses procédés de composition, nous les découvrons au plus juste
dans un groupe en bronze de Mercure et VAmour, œuvre importante, ce me
semble, pour l’intelligence de son art.
(( François », nous dit Bellori, « fit pour le prince Giustiniani un Mercure
haut de trois palmes environ qui se retourne et se plie en arrière, regardant un
petit Amour qui lui attache aux pieds des talonnières ; ceci en même temps
(in accompagnamento) qu un Hercule antique en métal. Après, il fit comme
pendant (compagno) au Mercure un Apollon dans la pose et l’attitude de
l’Antinoüs du Belvédère. »
Quelques remarques: l’Hercule étant de métal, autant dire de bronze, le
Mercure l’était sans doute aussi. Quant à l’Apollon, il procédait de cet
Hermès du Belvédère qui fut regardé à bon droit comme le plus beau des
(( Praxitèle » jusqu’au moment où fut retrouvé Y Hermès d’Olympie.
Duquesnoy, qui choisit pour modèle de sa Sainte Suzanne YUranie du
Capitole, décidément avait du goût. Mais revenons à son œuvre.
Quand fut-elle exécutée ? Nous pouvons répondre en toute assurance : entre
1628 et 1631. C’est Sandrart, en effet, qui mit Duquesnoy en relations avec
le marquis Giustiniani, après l’avoir fait entrer à son service en vue du travail
. Loc. cit.