Histoire de l'esprit humain ou mémoires secrets et universels de la république des lettres (3.1765)

DE L’ESPRIT HUMAIN. 389
„ä celui que nous voyons ; parce que le
„Monde matöriel n’est ni visible, ni intelli-
„gible par lui-m£me. Ainsi, pour £tre plei-
„nement convaincu qu’il y a des Corps, il
„faut qu’on nous demontre non-seulement
„qu’il y a un Dieu, & que Dieu n’est pas
„trompeur; mais encore que Dieu nous a
„asitire qu’il en a effe&ivement cre£ , ce que
„je ne trouve point prouv£ dans les Ouvra-
„ges de Mr, Descartes.
„Dieu ne parle ä l’Esprit & ne l’oblige
„a croire qu’en deux mani^res; parl’Evidence
,& par la Foi. Je demeure d’accord que la
„Foi oblige ä croire qu’il y a des Corps;
„mais pour l’evidence, il me semble qu’elle
„n’est point entiire, & que nous ne sommes
„point invinciblement portes ä croire qu’il y
„ait quelque autre chose que Dieu & notre
„Esprit. Il est vrai que nous avons un
„penchant extreme ä croire qu’il y a des
„Corps qui nous environnent: je l’accorde
„ä Mr. Delcartes; mais ce penchant, tout
„naturel qu’il est, ne nous y force point par
„evidence, il nous incline seulement par im-
„pression. Or nous ne devons suivre dans
„nos jugemens libres, que la luiniere & l’evi-
„dence, & st nous nous laissons conduire ä
„l’impression sensible, nous nous tromperons