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Revue égyptologique — 13.1911

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Nr. 4
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Revillout, Eugène: Essai sur la vocalisation hébrai͏̈que, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.11502#0149
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Essai sue la vocalisation hébraïque.

139

«La grammaire de chaque race fut formée d'un seul coup; dit M. Eenan; la borne, posée
par l'effort spontané du génie primitif, n'a guère été dépassée.»

Cette théorie repose sur des doctrines de psychologie comparée et presque de phy-
siologie, qui sépare l'espèce humaine en races absolument distinctes, soit au point de vue
de la pensée, soit au point de vue de l'expression que cette pensée peut revêtir. Pour
M. Eenan, changer de grammaire serait, pour ainsi dire, changer d'âme, puisque le langage
de chaque race «représente, dans son harmonie, l'ensemble des facultés humaines» qui sont
dévolues à cette race.

En ce qui touche les races sémitiques, M. Eenan admet que les grammaires, hébraïque,
arabe, éthiopienne, etc., n'ont rien ajouté aux conjugaisons primitives; et que ne pouvant
s'enrichir, elles se sont appauvries. «Il fut un temps, dit-il (Eevue de linguistique, 2e fascicule
1869), où il y eut une langue sémitique primitive possédant toutes les richesses dont chacune
des langues sémitiques a emporté les débris.»

Sans entrer dans une discussion qui nous mènerait beaucoup trop loin, nous devons
dire que, du moins au point de vue de la philologie comparée, le seul qui puisse nous
occuper ici, ces doctrines, dans leurs prémisses, nous semblent n'avoir pas pu subir avan-
tageusement l'épreuve décisive d'une vérification, pour ainsi dire expérimentale.

Lorsque l'abbé de l'Épée a pris les sourds-muets de la race indo-européenne, pour leur
créer une grammaire et un langage qui satisfit le plus complètement possible aux besoins actuels
de leur esprit, il est parti de données contraires à celles de M. Eenan, et il a pleinement réussi.

Ce langage et cette grammaire, qui répondaient si bien aux facultés intellectuelles de
nos sourds-muets, n'avaient pourtant nulle analogie avec les nôtres ; mais ils ressemblaient, à
s'y méprendre, aux éléments mimiques de la grammaire et du langage dont l'ancienne Egypte
se servait pour écrire sur ses monuments. Cette identité nous avait frappé, il y a deux ans,
et nous avons montré, dans une série d'articles,1 que les mêmes images avaient servi dans
des races si éloignées à exprimer non seulement les mêmes pensées, mais les mêmes flexions
grammaticales, les mêmes rapports entre les mots.

Nous pouvons donc, à ce qu'il nous semble, sans être arrêtés par des arguments étran-
gers à notre sujet, malgré l'immense talent du savant écrivain auxquels ils sont dus, en
revenir aux langues sémitiques envisagées seulement en elle-mêmes.

1 Dans cette série d'articles, je m'étais surtout préoccupé de comparer le mélange d'idéographie et
de phonétismé qu'on trouvait dans le système de l'abbé de L'Epée comme dans l'égyptien. Je parlais alors,
non de l'état historique de la langue égyptienne à une époque donnée, mais des principes mêmes qui ont
présidé à sa formation. Notons d'ailleurs que, pour cette formation, même après la découverte faite par
Amélineau, des monuments archaïques, occupant maintenant, malgré leur concision, une si large place dans
les études égyptiennes, il est difficile de dire, d'une façon précise, si oui ou non (plutôt non) le hiérogly-
phisme idéographique a été le seul élément primitif de cette écriture où le plionétisme a joué aussi un si
grand rôle, toujours à côté de l'idéogramme. Certaines tablettes du British Muséum, ramenant de même à un
hiéroglyphisme les cunéiformes, permettent de poser le même point d'interrogation pour la Chaldée. S'il
fallait en croire feu notre ami Lacouperie, ce serait à la Chaldée que la Chine aurait emprunté les premiers
éléments de sa civilisation et de son écriture. Celle-ci, se basait-elle d'abord sur l'idéographie et le pho-
nétismé mélangés? Était-elle, au contraire, uniquement idéographique, comme la langue mandarinique
actuelle, qui se lit de tant de manières différentes selon les provinces? C'est ce que les progrès de la
sinologie nous apprendront peut-être, bien que la destruction des livres, exigée par un empereur à une
époque antique, rende le problème plus difficile. (Note surajoutée).
 
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