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ELŻBIETA GRABSKA

et de Man Ray. Ces deux oeuvres proposent une communication définitivement nouvelle aussi bien sur le plan technologique que
sémantique.
Afin de réfuter l'histoire de l'art en tant que l'histoire des ,,issmes" qui en vue d'objectivisme vise un relativisme de valeurs (chaque
isme doté de traits quasi absolus), mes propos ont l'ambition de regrouper quelques phénomènes artistiques, de leur trouver une
place qui relèverait leur raison d'être ,,inévitables" dans le sens historique, bref, de prouver qu'ils forment un ensemble établi par
certaines règles.
Il s'agit d'abord de jalonner les arguments historiques qui sont les dates: 1915 — 1925 (celles-ci d'ailleurs proposant une vue
d'ensemble qui contredit les chronologies traditionnelles), dates qui englobent les années de la première guerre mondiale et une
période ,,après" la guerre, qui effacent par conséquent celle qui fut toujours le symbole d'ouverture ou de clôture: 1918. Arbitraires
comme toutes les dates qui servent l'historien dans ses intentions synthétisantes, elles s'affranchissent d'établir une chronologie des
dates-événements. La décade proposée correspond plutôt à un autre modèle, qui reflète une situation de changements, dont la crise
de valeurs, acceptée par les artistes et certains de leurs contemporains, devient plus qu'un acte de conscience — un événement culturel.
La période 1915 —1925 délimite d'une façon assez nette cet état de transformations plus complexes que l'évolution du cubisme,
de l'expressionnisme, du dadaisme etc. Il semble nécessaire de distinguer quelques traits qui constituent des propriétés nouvelles de
la communication visuelle de cette période, de se rendre compte de ce qu'engendre une ontologie artistique, inconnue avant 1915,
qui sera bientôt une axiologie créatrice, comme les ,,objets trouvés", par exemple, systématisé par Breton en 1935, mais existant depuis
1913, ses origines fondées sur ie ready-made de Duchamp.
Je propose donc d'appuyer mon analyse sur quatre coordonnées: La caractéristique la plus générale vise la transformation
structurale de l'oeuvre (1). Les tendances iconoclastes constituent une autre (2). Ensuite les particularités qui distinguent l'aspect
,,littéraire" de ,,l'attitude poétique" (3), et enfin ce qui conduit à la communication plastique — en rapport ou non avec les autres —
que je propose de nommer métaformique (4).
La structuralisation métaformique est celle qui m'intéresse particulièrement, car elle résulte du rapprochement des significations
reconnues dans les termes: plastique et poétique; au moment où la famille des poèmes-objets se crée, ces deux sens ont perdu leur
valeur qualificative.
En posant le problème de ces revendications mutuelles du langage plastique et poétique, je suggère la possibilité d'y créer un
point d'attache dans la typologie et le classement générique, qui ont toujours servi nos démarches descriptives et nos jugements,
involontairement normatifs. Au cours de ces remarques j'invoque la manière de traiter par Apollinaire les notions du ,,travail" et
de ,,surprise" qui formaient dans le contexte de ses idées sur le cubisme (et l'art 1913 — 1914) un concept de la forme signifiante (je me
sers du terme de la même période de Clive Bell). Ces notions Apollinairiennes s'orientaient, elles aussi, contre le système des genres
et en conséquence des procédés traditionnels de la peinture. Car, comme Га prévu le poète, ce n'est pas seulement la technique des
collages, mais le système de les oeuvrer, qui ont changé l'axiologie artistique: l'important dans notre analyse est donc le niveau synta-
gmatique; les procédés technologiques voulus et prévus dans leur fonction signifiante créent une suite de connotations d'ordre
sémantique, touchant par ailleurs tout ce qui est convention et morphologie nouvelles.
Une analyse détaillée de l'objet (peinture, sculpture?), nommé par Picasso Le Verre d'absinthe, met en évidence ce qui a été dit
avant. Dans le déplacement des acquis traditionnels — nature morte devenu un „trope" de la sculpture où l'échange générique est
pourtant ,,déguisé" (le code technologique du moulage à cire perdue est caché sous l'aspect pictural), Picasso a agencé un comporte-
ment culturel vis à vis de l'object inconnu par le siècle précédent. Mais si Picasso semble poser la question quelle est la part de l'artiste
dans la civilisation des objets, il n'est pas tenté d'abandonner le métier artiste qu'il dénonce afin de le vérifier.
Plus complexe, plus savante et plus décourageante pour ses contemporains a été la philosophie de l'objet de Marcel Duchamp,
ses motivations de rompre les liens entre l'exécution artisanale et le produit artistique. 11 serait trop simple d'expliquer cette rupture
(en s'appuyant sur les commentaires de Duchamp lui-même) par le désir de restituer aux arts de rétine l'autre matrice de l'art — sa
cosa mentale; il serait faux de voir en ces motivations le symptôme de „Kunstlósigkeit" et cette accusation en est formulée parfois.
Je ne tire pas des conclusions définitives ni des oeuvres ni des propos de Duchamp envers son concept de l'objet, tel quel. Mais j'essaie
d'établir dans les propositions qu'il a données les rapports entre ce qui est communiqué par l'objet au niveau civilisé par la société
industrielle (l'objet fabriqué, usuel et neutre), et au niveau civilisé par l'artiste (l'objet choisi et commenté). On peut envisager la part
de l'inscription et du titre (ou de la signature, selon le cas) dans les ready-made, non seulement comme élément indispensable
dans cette construction syntagmatique, mais comme revendication poétique (linguistique) de la maîtrise manuelle rejetée. Dans une
analyse de ces rapports syntagmatiques très complexes, présentées par les ready-made, je vois la possibilité de désigner ce type des
,fonctions de texte culturel" qui a été examiné par les sémiologues Piatigorski et Lotman dans le cas nommé par eux „la communica-
tion métaartistique 4.2.2." {Texte et fonction, 1968).
Pour aboutir à une conclusion qui reprendra les coordonnées de mon étude j'ai choisi l'oeuvre de Marcel Duchamp et de Man
Ray située en dehors du ready-made: L'Elevage de poussière. Or, je pense que rien n'empêche de traiter cet exemple comme la même
stratégie artistique qui s'est élaborée dans les ready-made purs ou aidés; nous y sommes devant un produit objectivé par le hasard
où la part de l'artiste (des artistes) a été peut-être plus grande que dans le ready-made classique, mais en fait, elle n'en est que la contri-
bution de ce qui a été prévu par Duchamp dans le ready-made, c'est-à-dire l'élément aidé. Cet élément apparaît dans la structure de
l'image (la notion du ready-made que se propose est l'image structurée d'une manière nouvelle) en tant que générateur d'une poésie.
Ce que Marcel Duchamp désigne, intitule — toute son intervention linguistique qui "aide" ou qui accompagne l'image — reste sa
part intégrale et, risquons de le dire, motrice d'une qualité difficile à déchiffrer: son côté poétique pur. L'iconoclasme et le trait
,,métaformique" sont manifestes dans cette oeuvre non moins sur le plan technologique que sur le plan sémantique. Mais ce qui
surprend le plus dans cette photo de poussière c'est qu'au fond elle relève un générique, un traité sur le paysage. Paysage naturaliste
mais aléatoire (poussière) et paysage artificiel, structuré par l'axe voulu de la vue aérienne photographique. Etoffer une partie du
support, qui fut déjà une fois signifiant, dorénavant utilisé dans le rôle maternel du ready-made devient la cosa mentale du photo-
graphe-peintre.
 
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