DOI Heft:
No 9 (1908)
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BULLETIN DES MUSÉES ROYAUX
LA TONTE DES MOUTONS.
savoir-faire, ni toutes les habiletés de Boucher ne
sauraient nous faire oublier les créations naïves
de leurs devanciers. A cet égard, peu de pages
donnent mieux une impression de vérité et de
fraîcheur que la tapisserie acquise par nos Musées,
l’an dernier, de MM. Bacri frères, à Paris. Elle
figura de longues années dans l'atelier d’un artiste
parisien et fut exposée à l’Union des arts décoratifs
il y a une trentaine d’années.
La scène se passe à l’ombre de jeunes arbres,
d’un chêne, d’un châtaignier, d'un houx couvert
de baies rouges, et au-dessus d’une mare entourée,
là, d’un clayonnage pour le maintien de la berge,
et agrémentée, ici, de narcisses, de pensées, de
roseaux, de ronces couvertes de mûrons noirs.
Au milieu apparaît, assise sur la berge herbue, une
femme âgée. Sa tête étroite, maigre et exsangue, à
la bouche édentée, au nez relevé, au menton en
galoche, s’abrite dans une coiffe serrée par un ban-
deau et munie d’un couvre-nuque. Notre toute
vieille pastourelle vêtue d’une robe rouge et d’une
sorte de scapulaire vert aux lumières jaunes,
(Musées royaux du Cinqiiantenaire.)
tient de la main droite une écuelle profonde rem-
plie de lait qui excite la convoitise d’un tendre
agneau ; elle prend de la main gauche un morceau
de pain bis aux raisins que lui tend un berger assis
plus haut qu’elle.
C’est un homme barbu, dans la force de l'âge,
le pastoureau, coiffé d’un bonnet, au galon duquel
est passé une cuillère courte. Il est vêtu d’une
tunique beige, d’un caban bleu rejeté en arrière,
de braies gris-brun ; à sa ceinture de cuir est
suspendu son sac ou musette, son couteau avec sa
gaine de cuir, son chalumeau et une paire de casta-
gnettes. A sa droite broute un mouton.
De l’autre côté, un berger, également assis, im-
berbe, au teint rosé, mais dont le cou tiré ne laisse
pas de doute sur l’âge avancé, tient sur son genou
gauche un mouton dont il s’apprête à enlever la
laine au moyen de ses forces. Il est vêtu d’une
tunique bleu - pâle et de housseaux en laine
blanche, et il a pour coiffure un chaperon rouge
dont la queue retombe en collier sur la poitrine ;
cinq moutons, dont l’un àla noire toison, entourent
Hauteur im65 ; longueur 2m24.
BULLETIN DES MUSÉES ROYAUX
LA TONTE DES MOUTONS.
savoir-faire, ni toutes les habiletés de Boucher ne
sauraient nous faire oublier les créations naïves
de leurs devanciers. A cet égard, peu de pages
donnent mieux une impression de vérité et de
fraîcheur que la tapisserie acquise par nos Musées,
l’an dernier, de MM. Bacri frères, à Paris. Elle
figura de longues années dans l'atelier d’un artiste
parisien et fut exposée à l’Union des arts décoratifs
il y a une trentaine d’années.
La scène se passe à l’ombre de jeunes arbres,
d’un chêne, d’un châtaignier, d'un houx couvert
de baies rouges, et au-dessus d’une mare entourée,
là, d’un clayonnage pour le maintien de la berge,
et agrémentée, ici, de narcisses, de pensées, de
roseaux, de ronces couvertes de mûrons noirs.
Au milieu apparaît, assise sur la berge herbue, une
femme âgée. Sa tête étroite, maigre et exsangue, à
la bouche édentée, au nez relevé, au menton en
galoche, s’abrite dans une coiffe serrée par un ban-
deau et munie d’un couvre-nuque. Notre toute
vieille pastourelle vêtue d’une robe rouge et d’une
sorte de scapulaire vert aux lumières jaunes,
(Musées royaux du Cinqiiantenaire.)
tient de la main droite une écuelle profonde rem-
plie de lait qui excite la convoitise d’un tendre
agneau ; elle prend de la main gauche un morceau
de pain bis aux raisins que lui tend un berger assis
plus haut qu’elle.
C’est un homme barbu, dans la force de l'âge,
le pastoureau, coiffé d’un bonnet, au galon duquel
est passé une cuillère courte. Il est vêtu d’une
tunique beige, d’un caban bleu rejeté en arrière,
de braies gris-brun ; à sa ceinture de cuir est
suspendu son sac ou musette, son couteau avec sa
gaine de cuir, son chalumeau et une paire de casta-
gnettes. A sa droite broute un mouton.
De l’autre côté, un berger, également assis, im-
berbe, au teint rosé, mais dont le cou tiré ne laisse
pas de doute sur l’âge avancé, tient sur son genou
gauche un mouton dont il s’apprête à enlever la
laine au moyen de ses forces. Il est vêtu d’une
tunique bleu - pâle et de housseaux en laine
blanche, et il a pour coiffure un chaperon rouge
dont la queue retombe en collier sur la poitrine ;
cinq moutons, dont l’un àla noire toison, entourent
Hauteur im65 ; longueur 2m24.