DES ARTS DECORATIFS ET INDUSTRIELS
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éminemment chrétien, dans un sujet où l’on
n’admire trop seuvent que l’agrément des con-
trastes et le charme de l’exécution. A cet égard il
n'y a pas d’exemple plus typique que Y Annon-
ciation de Jean Van Eyck du Musée de l’Ermi-
tage : l’archange esquisse un sourire plutôt bênet,
qu’excuse la jeunesse du personnage. Il existe,
il est vrai, sous le rapport du sentiment, des
sujets similaires mieux traités par Roger van der
Weyden,
M e m 1 i n g,
Gérard Da-
vid, etc. ;
mais, toutes
comparai-
sons faites,
on devra en-
core, à cet
égard, don-
ner la pri-
mauté à Hu-
go. Sans ar-
t i fi c e , il
obtient un
contraste
saisissant;
et, en dépit
de son réa-
lisme, il aU
teint au sen-
timent reli-
gieux le plus
élevé.
On pour-
rait rappro-
cher l’ar-
change Ga-
briel de cet
ange de très belle allure qui, dans l’un des pan-
neaux d’Holy Road, s’apprête à toucher de
l’orgue. Celui-ci a je ne sais quoi d’allègre et de
joyeux qui convient à un musicien épris de son
art; celui-là se présente avec un air de gravité
qu’on attend naturellement d’un ambassadeur
investi d’une mission considérable. Cette concep-
tion nous paraît plus juste en somme que celle
des artistes représentant l’annonciateur par un
adolescent couronné de grâce et de beauté.
On remarquera qu’Hugo s’évertue à ne point
se répéter, au risque même de ne pas rester égal
à lui-même. Dans le seul panneau médian du
triptyque de Florence, il s’est plu à varier l’ex-
pression des différents anges. Les anges-musiciens
ne brillent certes pas par la beauté des types, ni
FIG. 2. — ARCHANGE GABRIEL (DÉTAIL)
{Atelier photographique du Musée des Offices, à Florence)
par la grâce des attitudes, ni même par le choix
des expressions, tandis que ceux que l’on voit au-
dessus de saint Joseph, et les deux adorateurs en
robe bleue, sont pénétrés d’une admiration naïve
qui semble leur mettre au cœur une ardente
prière.
Faut-il encore signaler le type adopté pour
Marie qui s’éloigne quelque peu de celui du pan-
neau central que la gravure et la photographie
ont popula-
risé depuis
de longues
années. Il
s’en faut
qu’il soit
plus distin-
gué ; mais il
reflète une
jeunesse et
une paix in-
térieure qui
contrastent
avec l’air na-
vré qui do-
mine les
traits de Ma-
rie adorant
le divin En-
fant.
Que dire
du dessin si
net et à la
fois si déli-
cat par le-
quel notre
artiste re-
vend i q u e
une maîtrise
qu’aucun de nos primitifs ne saurait lui disputer !
Et il est parfaitement justifié ce jugement que
portait déjà de lui Le Maire de Belges, dans sa
Couronne margaritique :
« Hugues de Gand qui tant eut les tretz netz. »
Jos. Destrée.
AUX MUSÉES ROYAUX
DE PEINTURE ET DE SCULPTURE
Novembre 1911
'N mémoire de sa mère, M. Ch.-L. Cardon
vient de faire don au Musée ancien de trois
intéressantes Madones italiennes. Elles ont pris
E:
83
éminemment chrétien, dans un sujet où l’on
n’admire trop seuvent que l’agrément des con-
trastes et le charme de l’exécution. A cet égard il
n'y a pas d’exemple plus typique que Y Annon-
ciation de Jean Van Eyck du Musée de l’Ermi-
tage : l’archange esquisse un sourire plutôt bênet,
qu’excuse la jeunesse du personnage. Il existe,
il est vrai, sous le rapport du sentiment, des
sujets similaires mieux traités par Roger van der
Weyden,
M e m 1 i n g,
Gérard Da-
vid, etc. ;
mais, toutes
comparai-
sons faites,
on devra en-
core, à cet
égard, don-
ner la pri-
mauté à Hu-
go. Sans ar-
t i fi c e , il
obtient un
contraste
saisissant;
et, en dépit
de son réa-
lisme, il aU
teint au sen-
timent reli-
gieux le plus
élevé.
On pour-
rait rappro-
cher l’ar-
change Ga-
briel de cet
ange de très belle allure qui, dans l’un des pan-
neaux d’Holy Road, s’apprête à toucher de
l’orgue. Celui-ci a je ne sais quoi d’allègre et de
joyeux qui convient à un musicien épris de son
art; celui-là se présente avec un air de gravité
qu’on attend naturellement d’un ambassadeur
investi d’une mission considérable. Cette concep-
tion nous paraît plus juste en somme que celle
des artistes représentant l’annonciateur par un
adolescent couronné de grâce et de beauté.
On remarquera qu’Hugo s’évertue à ne point
se répéter, au risque même de ne pas rester égal
à lui-même. Dans le seul panneau médian du
triptyque de Florence, il s’est plu à varier l’ex-
pression des différents anges. Les anges-musiciens
ne brillent certes pas par la beauté des types, ni
FIG. 2. — ARCHANGE GABRIEL (DÉTAIL)
{Atelier photographique du Musée des Offices, à Florence)
par la grâce des attitudes, ni même par le choix
des expressions, tandis que ceux que l’on voit au-
dessus de saint Joseph, et les deux adorateurs en
robe bleue, sont pénétrés d’une admiration naïve
qui semble leur mettre au cœur une ardente
prière.
Faut-il encore signaler le type adopté pour
Marie qui s’éloigne quelque peu de celui du pan-
neau central que la gravure et la photographie
ont popula-
risé depuis
de longues
années. Il
s’en faut
qu’il soit
plus distin-
gué ; mais il
reflète une
jeunesse et
une paix in-
térieure qui
contrastent
avec l’air na-
vré qui do-
mine les
traits de Ma-
rie adorant
le divin En-
fant.
Que dire
du dessin si
net et à la
fois si déli-
cat par le-
quel notre
artiste re-
vend i q u e
une maîtrise
qu’aucun de nos primitifs ne saurait lui disputer !
Et il est parfaitement justifié ce jugement que
portait déjà de lui Le Maire de Belges, dans sa
Couronne margaritique :
« Hugues de Gand qui tant eut les tretz netz. »
Jos. Destrée.
AUX MUSÉES ROYAUX
DE PEINTURE ET DE SCULPTURE
Novembre 1911
'N mémoire de sa mère, M. Ch.-L. Cardon
vient de faire don au Musée ancien de trois
intéressantes Madones italiennes. Elles ont pris
E: