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54

CHRONIQUE DES ARTS

écrivait-il ci son ami Stassov, « je suis tombé sur la
mélodie que créa cette parole, je suis arrivé à incarner
le récitatif dans la mélodie ». Je voudrais l’appeler
« mélodie significative ». Notons chez lui. l’étroite
union du texte à cette mélodie qui souvent passe du
chant à l’accompagnement, comme pour affirmer davan-
tage leur essentielle unité.

Tour à tour simple et .complexe, archaïque et révo-
lutionnaire, Moussorgsky nous a donné là son chef-
d’œuvre — et un chef-d’œuvre. Mais nous n’en pou-
vons juger que d’après une seconde version, retouchée
avec beaucoup de tact, d’intelligence et de respect, il
n’en faut point douter, par l’éminent musicien que fut
Rimsky-fCorsakov, ami et conseiller de Moussorgsky
dont il rendit, si nous nous en rapportons à Borodine,
« les œuvres infiniment plus musicales ». Qui sait,
toutefois, si celle-ci n’aurait pas,, d'aventure, perdu
en originalité ce qu’elle gagnait en perfection techni-
que ? Non point que nous estimions, avec certains
idolâtres, qu’il faille admirer chez un génial autodi-'
dacte jusqu’aux lacunes mêmes de son éducation, ne
pensant pas comme eux que la connaissance de l’ortho-
graphe et de la syntaxe puisse nuire au style d’un
grand écrivain. — N’importe ! nous eussions aimé
entendre Boris tel qu’il surgit de ce puissant créateur
dont Balakirev (encore un de ses amis !) jugeait le
cerveau « quelque peu faible». Mais que ce souhait ne
détourne aucun lecteur de l’aller écouter — et voir —
tel que nous l’a présenté l’Opéra, car c’est assurément
un émouvant spectacle.

Une mise en scène passable y sert de cadre à de
bons chanteurs, parmi lesquels se détachent M. Vanni
Marcoux, intéressantsuccédanéde Chaliapine, MmeGer-
maine Lubin, MM. Sullivan, Huberty et Fabert. Les
chœurs sont dignes d’éloges, et aussi l’orchestre, le
tout remarquablementdirigé par la souple et magistrale
baguette de M. Serge Koussevitzky.

René Brancour

BIBLIOGRAPHIE

Paul Fort. — Chansons françaises, illustrées de
cent bois originaux par Émile Bernard. — Paris,
Éditions d’art Édouard Pelletan. Melleu et Sergent,
éditeurs, 1922, pet. in-8 carré, 154 p.

MM. Helleu et Sergent continuent brillamment la
tradition d'Édouard Pelletan en nous donnant ce beau
livre où le poète, l’illustrateur et l’éditeur collaborent
pour parfaire une œuvre. Les livres illustrés ne sont
pas rares de nos jours; il n’est même pas rare qu’ils
fassent paraître d’ingénieux détails et une sorte de
magnificence. Mais la réussite qui vient d’une harmonie
préétablie entre le'texte du poète et l'art du graveur
est bien peu commune. Devant ces bois largement
taillés par un artiste qui a l’imagination toujours prête
et la main sûre et qui n’est inégal à aucun sujet, à
aucune tâche, on se souviendra de l’admirable Villon
naguère édité par M. Ambroise Vollard. Il ne déplaira
sans doute pas à fauteur des Chansons françaises que
l’on pense à Villon en lisant Paul Fort. Je croirai
faire le meilleur éloge du poète et de son illustrateur
en citant ce que celui-ci écrivait à un ami qui avait

suggéré ce rapprochement : « Oui, Villon se retrouve
dans Paul Fort, le plus populaire de nos poètes, par
l’inspiration libre, la philosophie facile, la création
hardie, variée, colorée, humaine... [J’ai eu] le plus
grand plaisir à illustrer... ces exquis poèmes, chansons
vraiment françaises de nos rues, de nos- soldats, de
nos enfants ». C’est parce que l’artiste a si bien
pénétré l’âme du poète que nous éprouvons une satis-
faction complète, unissant l’émotion de l’art et celle de
la vie, quand nos yeux, sur la même page, contemplent
un dessin expressif et simple, tragique et naïf, d’Émile
Bernard et lisent tel petit poème exquis, celui, par
exemple, de La fille morte dans ses amours.

Paul Jamot

NÉCROLOGIE

Le 1e1' avril est mort à Paris, sa ville natale, l’archi-
tecte et peintre d’histoire Henri-Paul Motte, che-
valier de la- Légion d’honneur, membre de la Société
des Artistes français, auteur de peintures décoratives
pour l’hôtel de ville de Limoges et le théâtre de
Monte-Carlo, et de nombreux tableaux parmi lesquels
les Oies du Capitole, le Cheval de Troie, Richelieu sur la
digue de La Rochelle. Il avait obtenu le premier prix
pour la construction du temple neuf de Strasbourg, en
1872; — vers la même date, à Paris, l’architecte
Henri Deverin, architecte en chef honoraire des
monuments historiques, chevalier de la Légion d’hon-
neur ; — vers le 3, à Paris, à 60 ans, l’architecte
Henri Eustache, né à Versailles, grand prix de
Rome (1891), chevalier de la Légion d’honneur,
membre de la Société des Artistes français, titulaire
d’une médaille d’honneur au Salon de 1902, chargé de
mission en Grèce et professeur à l’Ecole des Beaux-
Arts, architecte en chef du gouvernement, architecte
de la Ville, auteur, en dernier lieu, de la mosquée de
Paris, rue Monge. Il avait agrandi le palais de la
Bourse ; — vers le 1 1, à Paris, à 39 ans, le critique
musical Pierre d’Alheim, spécialiste des composi-
teurs russes et particulièrement de Moussorgsky, et
créateur, à Moscou, d’une « maison du Lied » pour
l’expansion de la musique française ; — le 2 octobre
1921, à Upsal (Suède), l’égyptologue allemand Georg
Moller, né le 5 novembre 1876 à Caracas (Vénézuéla).

MOUVEMENT DES ARTS
Les grandes ventes prochaines

Collection de Mme la Marçuise de Ganay
née Ridgway(i)

Longtemps interrompue depuis l’automne où pas-
sèrent les collections variées de l’aimable érudit
Gaston Le Breton, puis les derniers trésors (estampes
et médailles) de la collection Engel-Gros, la série des
grandes ventes ne pouvait mieux reprendre qu’avec ce
magnifique ensemble qui porte un nom vénéré de tous

(1) Dont la vente aura lieu, galerie Georges Petit, les
8, 9 et 10 mai.
 
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