Oscar ; tous savent trop bien la funeste influence que les
comètes exercent sur les constellations conjugales. —
Pline l'ancien, Aristote, Cicéron, d'Agnesseau et Paul de
Kock ont écrit là-dessus des considérations philosophi-
ques très profondes que je vous engage à lire attenti-
vement quand vous pourrez vous les procurer.
Comme je vous l'ai dit plus haut, les astronomes se
permettent de nier complètement l'influence des comè-
tes sur notre globe ; il est vrai qu'en revanche ils nous
annoncent qu'un de ses astres a si mal pris ses mesures
pour flâner dans le firmament qu'un de ces jours il serait
très possible qu'il se rencontrât avec la terre. Il semble
dès lors que ce choc exercerait une influence désagréa-
ble sur les petites affaires de chacun de nous, et les té-
lescopes des astronomes eux-mêmes seraient bien capa-
bles d'être brisés du coup.
Mais cette prévision est encore assez lointaine et ne
doit pas vous empêcher de renouveler votre abonnement
au Charivari.
LES MINISTRES ET LA ¥0IMIE9
L'honnête Système sous lequel nous avons le bonheur
d'être tripotés pourrait fournir matière à plusieurs mil-
liers de volumes de Mystères façon Eugène Sue. La ma-
nipulation des deniers publics ne manque certes pas de
pègres et de grinches, et la marche du gouvernement of-
fre suffisamment de Tortillards.
Quant à l'administration, les procès Kessner, Gisquet,
Hourdequin, etc., ont prouvé qu'elle renferme une mi-
ne d'édifiantes chroniques, non moins féconde que le
Tapis franc, ou n'importe quel cabaret borgne tenu par
une ogresse.
A propos du procès Hourdequin, les débats de cette
trop fameuse affaire ont constaté un nouveau fait géo-
graphique, savoir que ce n'est pas seulement la Seine,
mais encore le pot-de-vin qui coule à Paris.
On sait maintenant que si les plans d'alignement avor-
tent si souvent, c'est parce que beaucoup de gens aiment
peu la ligne droite, et que la capitale du monde civilisé
est condamnée à garder ses rues fangeuses et tortueuses;
pour faire pendant à des consciences idem.
Mais outre ces énormités scandaleuses il se commet
encore une foule de petites roueries, de passe-droit et
d'incongruités administratives sur le pavé de Paris. Il
n'est donc pas étonnant que ce pavé soit toujours si mal
propre.
A ce sujet, un journal grave raconte une piquante
anecdote qui revient de droit aux lecteurs du Charivari.
Une certaine rue étroite et boueuse avait été, il y a plus
de deux ans, comprise dans le plan, d'assainissement et
d'alignement. L'exécution du plan fut tout à coup sus-
pendue, et savez-vous pourquoi? Parce qu'un ex-ministre
possédait et habitait une maison dans ladite rue. Or,
l'immeuble ministériel était situé sur le côté droit, c'est-
à-dire précisément sur la partie désignée pour être sou-
mise aureculement. Le ministre, qui savait par expérien-
ce comment on interprète aujourd'hui les articles de la
charte-vérité et notamment celui qui déclare tous les
Français égaux devant la loi, refusa de se soumettre à
l'arrêté d'alignement. Lui qui, au temps de son exercice
ministériel, avait si souvent empiété sur les droits, les
libertés et les écus publics, déclara énergiquement qu'il
ne souffrirait pas qu'on empiétât d'un pouce (vieux style)
sur sa bicoque particulière.
Comme on devait s'y attendre, l'autorité administra-
tive s'empressa de se soumettre aux volontés de la ci-de-
vant Excellence. On avait trouvé naguère de très bonnes
raison, pour que l'alignement fût porté à.droite, on en
trouva alors de non moins concluantes pour le porter à
gauche. Les plans furent retournés aussi lestement qu'u-
ne conscience de ventru.
Déjà la ligne gauche allait être attaquée lorsqu'un au-
tre ci-devant ministre acheta une maison de ce côté. Le
nouveau propriétaire, non moins versé que son confrère
dans le jeu de nos institutions, déclara qu'il n'était pas
fait pour se soumettre au droit commun.Leconfrère per-
sista également à soutenir ce qu'il appelait la préroga-
tive de son rang. Les aligneurs se se trouvèrent alors
excessivement perplexeset renvoyés tantôt à droite,tantôt
à gauche.
Enfin, ce qui était facile à prévoir, les deux puissans
propriétaires finirent par s'entendre comme ministres en
budget.
Tous deux s'accordèrent pour repousser l'alignement
et pour déclarer que la rue n'avait nullement besoin
d'être élargie, ajoutant qu'en fait d'élargissement ils ne
concevaient que celui des poches officielles.
Et l'autorité administrative s'empressa de déclarer que
leurs Excellences avaient raison ; que c'était elle-même
qui avait eu tort de songer à aligner dans cet endroit, et
l'alignement fut enfoncé comme un contribuable.
Avis aux propriétaires parisiens qui auraient envie de
se soustraire aux plans de réforme de l'édilité et de la
voirie. Ils n'ont qu'à se cotiser pour offrir une maison
dans leur rue à un ministre ou à un ex-ministre. Inu-
tile de dire que les ministres prendront la maison com-
me ils prennent tout, avec un plaisir toujours nouveau.
Les aligneurs reculeront devant les superbes privilè-
ges des pachas officiels. Les ministres joueront ici enco-
re le rôle de bornes.
Et grâce à eux, les rues de Paris seront comme les
voies politiques, c'est-à-dire de plus en plus bouchées et
crottées.
ÏBaéâtoe alla' Falals»KfflyaB.
Déjazel, au Sérail, vaudeville en un acte, par M. Bayard.
Transportez-vous dans l'avenir, en 1875. Trente ans
ont passé; Mlle Déjazet existe encore; elle n'est plus jeu-
ne, et depuis, vingt ans elle a quitté le théâtre. Retirée
aux dames Sl-Michel, où elfe expie les peccadilles d'un
autre âge, elle apprend tout à coup qu'on va jouer au
théâtre du Palais-Royal, une pièce dont le titre porte son
nom. .... '. ,■ • ! •
Elle quitte le couvent, arrive au théâtre, force la con-
signe, et'malgré le concierge et le régisseur, qui ne la
connaissent pas, elle parvient jusqu'au directeur.
Or, la direction a subi Ja loi du temps : elle a changé
comme le reste. M. Dormeuil est au Sénégal, où il s'oc-
cupe d'une plantation de cannes. Le théâtre est dirigé
par M. Sainville, non plus ce joyeux Sainville dont la
graîté nous délecte aujourd'hui, mais par son fils, qui lui
ressemble trait pour trait.
Déjazet arrive au milieu d'une répétition. On répète
précisément la pièce de Déjaset au Sérail, drame en trois
actes. Elle déclare formellement qu'elle s'oppose à la re-
présentation, attendu 1° qu'elle vit encore ; 2° qu'on a
dû mettre dans sa bouche une foule de mots lestes et de
calembredaines, qu'elle n'a jamais proférés ; 5° qu'elle
ne veut pas et que sa volonté doit être respectée.
Cependant le directeur est aux abois : il compte sur
son nouveau drame pour relever son théâtre ; il supplie
Déjazet et l'engage à rester à la représentation afin de
juger par elle-même de la convenance du sujet et de la
modération des détails.
Déjazet consent. On commence à répéter , mais bien-
tôt elle se lève furieuse du personnage;qu'on lui fait jouer.
Elle demande l'auteur ou les auteurs ; on lui répond qu'il
n'y a plus d'auteurs, qu'on les a supprimés ; c'est le di-
recteur qui fait les pièces avec sa femme. Son fils com-
mence aussi à tailler des plumes assez proprement.
La répétition continue. On apporte un coffre rempli
de costumes ; Déjazet reconnaît là tous les costumes
d'autrefois, l'habit de Richelieu, le chapeau de Letorières,
lajupedeFrétillon. Les souvenirs de ses anciens triom-
phes ont plus d'empire sur e]le que les prières du direc-
teur : ses scrupules s'évanouissent, elle permet la repré-
sentation, elle offre même d'y jouer un rôle.
Un autre embarras se présente. L'actriee chareée <]*
jouer le personnage de Déjazet, est aimée par un jeun!
Andaloux, qui a pris le chemin de fer à Madrid sur 1>
sept heures et qui arrive à neuf à Paris.
Ce jeune homme est le fils d'un grand d'Espagne
marquis de la Rossa Bianca. Ce marquis a poursuivi'son
fils par le convoi de sept heures et demie.
Il vient s'opposer aux inclinations dramatiques de son
coquin de fils. Il lui enjoint de le suivre sur-le-champ ■
mais Déjazet le reconnaît : son nez le trahit ; c'est Alcidc
Tousez couvert de plaques et de décorations.
Il reconnaît aussi Déjazel et lui raconte ses aventures
On le croit mort ; le bruit s'est répandu en 1850 qu'Al-
cide Tousez avait reçu cent soixante-quinze coups de
poignard d'une Andalouse éprise de ses charmes. La vé-
rité est qu'il a été enlevé par une noble Espagnole, qu'il
l'a épousée et qu'il est devenu grand d'Espagne. '
Déjazet prévient les amoureux et leur conseille de sup-
plier le marquis au nom de Jocrisse.
Ce talisman produit un effet magique. Le marquis de
de la Rossa Bianca, craignant le scandale des reconnais-
sances, consent au mariage de son petit.
Quant à Déjazet, elle remonte sur le théâtre et joue
son personnage pour cette fois seulement.
Ce vaudeville n'est pas traité avec toute la convenan-
ce désirable. Auteurs et acteurs s'y occupent d'eux-mê-
mes et parlent de leur personne avec un sans-façon et
une complaisance qui peuvent avoir un grand succès
derrière le rideau, mais ne sont guère de nature à in-
téresser le parterre. Ces choses-là devraient se garder
pour être jouées entre deux paravens dans une soirée
intime chez M. Bayard ou chez M. Dormeuil ; le public y
est de trop. Il y a eu pourtant une espèce de succès dont
la faute est à Mlle Déjazet, Sainville et Alcide Tousez,
qui ont joué fort gaîment leur rôle.
Les ministres ont fait voler au galop les crédits sup-
plémentaires de 1842. C'eût été pourtant le cas de re-
mettre le ministère au pas.
— Le Cabinet espère que les crédits extraordinaires
demandés pour l'Algérie sur le budget de 1843 seront
volés en famille. Sur ce sujet pourtant, les ministres et
les chambres ne seront pas cousins.
— Le maréchal Soult a la confiance que, relativement
à l'Afrique, on approuvera tous ses comptes. On peut
dire d'avance, en effet, que là dessus son compte est
bon.
— Le ministre de la guerre demande pour les voyages
de M. Laurence en Algérie une indemnité de 100 fr. par
jour. Les jours de M. Laurence sont bien chers au ma-
réchal.
—11 paraît que si M. Laurence est si prodigue de
flatteries envers le président du conseil, il ne les lui
donne pas tout à fait gratis. Ses paroles sont mielleu-
ses ; mais ses prétentions ne laissent pas que d'être sa-
lées.
— Une feuille de l'opposition vient d'êlre citée devant
le tribunal civil pour avoir publié un article contre
les fonctionnaires corrupteurs. Les lecteurs du journal
incriminé avaient trouvé l'article assez juste pour méri-
ter d'être cité.
QUESTIONS POLITIQUES.
51 mars.
M. Sébasliani a deviné juste « quelles sont les person-
nes qui aiment le plus venir à domicile divaguer chez les
gens.»—« Ce sont les amateurs de botanique, a-t-il dit a
M. Decazes, parce qu'ils aiment à venir causer a pro-
pos de botanologie (à propos de bottes à nos logis-)»
M. Decazes a demandé encore à M. Sébasuaw .
« Quand les petits pois ont-ils une bonne odeur?» '
comètes exercent sur les constellations conjugales. —
Pline l'ancien, Aristote, Cicéron, d'Agnesseau et Paul de
Kock ont écrit là-dessus des considérations philosophi-
ques très profondes que je vous engage à lire attenti-
vement quand vous pourrez vous les procurer.
Comme je vous l'ai dit plus haut, les astronomes se
permettent de nier complètement l'influence des comè-
tes sur notre globe ; il est vrai qu'en revanche ils nous
annoncent qu'un de ses astres a si mal pris ses mesures
pour flâner dans le firmament qu'un de ces jours il serait
très possible qu'il se rencontrât avec la terre. Il semble
dès lors que ce choc exercerait une influence désagréa-
ble sur les petites affaires de chacun de nous, et les té-
lescopes des astronomes eux-mêmes seraient bien capa-
bles d'être brisés du coup.
Mais cette prévision est encore assez lointaine et ne
doit pas vous empêcher de renouveler votre abonnement
au Charivari.
LES MINISTRES ET LA ¥0IMIE9
L'honnête Système sous lequel nous avons le bonheur
d'être tripotés pourrait fournir matière à plusieurs mil-
liers de volumes de Mystères façon Eugène Sue. La ma-
nipulation des deniers publics ne manque certes pas de
pègres et de grinches, et la marche du gouvernement of-
fre suffisamment de Tortillards.
Quant à l'administration, les procès Kessner, Gisquet,
Hourdequin, etc., ont prouvé qu'elle renferme une mi-
ne d'édifiantes chroniques, non moins féconde que le
Tapis franc, ou n'importe quel cabaret borgne tenu par
une ogresse.
A propos du procès Hourdequin, les débats de cette
trop fameuse affaire ont constaté un nouveau fait géo-
graphique, savoir que ce n'est pas seulement la Seine,
mais encore le pot-de-vin qui coule à Paris.
On sait maintenant que si les plans d'alignement avor-
tent si souvent, c'est parce que beaucoup de gens aiment
peu la ligne droite, et que la capitale du monde civilisé
est condamnée à garder ses rues fangeuses et tortueuses;
pour faire pendant à des consciences idem.
Mais outre ces énormités scandaleuses il se commet
encore une foule de petites roueries, de passe-droit et
d'incongruités administratives sur le pavé de Paris. Il
n'est donc pas étonnant que ce pavé soit toujours si mal
propre.
A ce sujet, un journal grave raconte une piquante
anecdote qui revient de droit aux lecteurs du Charivari.
Une certaine rue étroite et boueuse avait été, il y a plus
de deux ans, comprise dans le plan, d'assainissement et
d'alignement. L'exécution du plan fut tout à coup sus-
pendue, et savez-vous pourquoi? Parce qu'un ex-ministre
possédait et habitait une maison dans ladite rue. Or,
l'immeuble ministériel était situé sur le côté droit, c'est-
à-dire précisément sur la partie désignée pour être sou-
mise aureculement. Le ministre, qui savait par expérien-
ce comment on interprète aujourd'hui les articles de la
charte-vérité et notamment celui qui déclare tous les
Français égaux devant la loi, refusa de se soumettre à
l'arrêté d'alignement. Lui qui, au temps de son exercice
ministériel, avait si souvent empiété sur les droits, les
libertés et les écus publics, déclara énergiquement qu'il
ne souffrirait pas qu'on empiétât d'un pouce (vieux style)
sur sa bicoque particulière.
Comme on devait s'y attendre, l'autorité administra-
tive s'empressa de se soumettre aux volontés de la ci-de-
vant Excellence. On avait trouvé naguère de très bonnes
raison, pour que l'alignement fût porté à.droite, on en
trouva alors de non moins concluantes pour le porter à
gauche. Les plans furent retournés aussi lestement qu'u-
ne conscience de ventru.
Déjà la ligne gauche allait être attaquée lorsqu'un au-
tre ci-devant ministre acheta une maison de ce côté. Le
nouveau propriétaire, non moins versé que son confrère
dans le jeu de nos institutions, déclara qu'il n'était pas
fait pour se soumettre au droit commun.Leconfrère per-
sista également à soutenir ce qu'il appelait la préroga-
tive de son rang. Les aligneurs se se trouvèrent alors
excessivement perplexeset renvoyés tantôt à droite,tantôt
à gauche.
Enfin, ce qui était facile à prévoir, les deux puissans
propriétaires finirent par s'entendre comme ministres en
budget.
Tous deux s'accordèrent pour repousser l'alignement
et pour déclarer que la rue n'avait nullement besoin
d'être élargie, ajoutant qu'en fait d'élargissement ils ne
concevaient que celui des poches officielles.
Et l'autorité administrative s'empressa de déclarer que
leurs Excellences avaient raison ; que c'était elle-même
qui avait eu tort de songer à aligner dans cet endroit, et
l'alignement fut enfoncé comme un contribuable.
Avis aux propriétaires parisiens qui auraient envie de
se soustraire aux plans de réforme de l'édilité et de la
voirie. Ils n'ont qu'à se cotiser pour offrir une maison
dans leur rue à un ministre ou à un ex-ministre. Inu-
tile de dire que les ministres prendront la maison com-
me ils prennent tout, avec un plaisir toujours nouveau.
Les aligneurs reculeront devant les superbes privilè-
ges des pachas officiels. Les ministres joueront ici enco-
re le rôle de bornes.
Et grâce à eux, les rues de Paris seront comme les
voies politiques, c'est-à-dire de plus en plus bouchées et
crottées.
ÏBaéâtoe alla' Falals»KfflyaB.
Déjazel, au Sérail, vaudeville en un acte, par M. Bayard.
Transportez-vous dans l'avenir, en 1875. Trente ans
ont passé; Mlle Déjazet existe encore; elle n'est plus jeu-
ne, et depuis, vingt ans elle a quitté le théâtre. Retirée
aux dames Sl-Michel, où elfe expie les peccadilles d'un
autre âge, elle apprend tout à coup qu'on va jouer au
théâtre du Palais-Royal, une pièce dont le titre porte son
nom. .... '. ,■ • ! •
Elle quitte le couvent, arrive au théâtre, force la con-
signe, et'malgré le concierge et le régisseur, qui ne la
connaissent pas, elle parvient jusqu'au directeur.
Or, la direction a subi Ja loi du temps : elle a changé
comme le reste. M. Dormeuil est au Sénégal, où il s'oc-
cupe d'une plantation de cannes. Le théâtre est dirigé
par M. Sainville, non plus ce joyeux Sainville dont la
graîté nous délecte aujourd'hui, mais par son fils, qui lui
ressemble trait pour trait.
Déjazet arrive au milieu d'une répétition. On répète
précisément la pièce de Déjaset au Sérail, drame en trois
actes. Elle déclare formellement qu'elle s'oppose à la re-
présentation, attendu 1° qu'elle vit encore ; 2° qu'on a
dû mettre dans sa bouche une foule de mots lestes et de
calembredaines, qu'elle n'a jamais proférés ; 5° qu'elle
ne veut pas et que sa volonté doit être respectée.
Cependant le directeur est aux abois : il compte sur
son nouveau drame pour relever son théâtre ; il supplie
Déjazet et l'engage à rester à la représentation afin de
juger par elle-même de la convenance du sujet et de la
modération des détails.
Déjazet consent. On commence à répéter , mais bien-
tôt elle se lève furieuse du personnage;qu'on lui fait jouer.
Elle demande l'auteur ou les auteurs ; on lui répond qu'il
n'y a plus d'auteurs, qu'on les a supprimés ; c'est le di-
recteur qui fait les pièces avec sa femme. Son fils com-
mence aussi à tailler des plumes assez proprement.
La répétition continue. On apporte un coffre rempli
de costumes ; Déjazet reconnaît là tous les costumes
d'autrefois, l'habit de Richelieu, le chapeau de Letorières,
lajupedeFrétillon. Les souvenirs de ses anciens triom-
phes ont plus d'empire sur e]le que les prières du direc-
teur : ses scrupules s'évanouissent, elle permet la repré-
sentation, elle offre même d'y jouer un rôle.
Un autre embarras se présente. L'actriee chareée <]*
jouer le personnage de Déjazet, est aimée par un jeun!
Andaloux, qui a pris le chemin de fer à Madrid sur 1>
sept heures et qui arrive à neuf à Paris.
Ce jeune homme est le fils d'un grand d'Espagne
marquis de la Rossa Bianca. Ce marquis a poursuivi'son
fils par le convoi de sept heures et demie.
Il vient s'opposer aux inclinations dramatiques de son
coquin de fils. Il lui enjoint de le suivre sur-le-champ ■
mais Déjazet le reconnaît : son nez le trahit ; c'est Alcidc
Tousez couvert de plaques et de décorations.
Il reconnaît aussi Déjazel et lui raconte ses aventures
On le croit mort ; le bruit s'est répandu en 1850 qu'Al-
cide Tousez avait reçu cent soixante-quinze coups de
poignard d'une Andalouse éprise de ses charmes. La vé-
rité est qu'il a été enlevé par une noble Espagnole, qu'il
l'a épousée et qu'il est devenu grand d'Espagne. '
Déjazet prévient les amoureux et leur conseille de sup-
plier le marquis au nom de Jocrisse.
Ce talisman produit un effet magique. Le marquis de
de la Rossa Bianca, craignant le scandale des reconnais-
sances, consent au mariage de son petit.
Quant à Déjazet, elle remonte sur le théâtre et joue
son personnage pour cette fois seulement.
Ce vaudeville n'est pas traité avec toute la convenan-
ce désirable. Auteurs et acteurs s'y occupent d'eux-mê-
mes et parlent de leur personne avec un sans-façon et
une complaisance qui peuvent avoir un grand succès
derrière le rideau, mais ne sont guère de nature à in-
téresser le parterre. Ces choses-là devraient se garder
pour être jouées entre deux paravens dans une soirée
intime chez M. Bayard ou chez M. Dormeuil ; le public y
est de trop. Il y a eu pourtant une espèce de succès dont
la faute est à Mlle Déjazet, Sainville et Alcide Tousez,
qui ont joué fort gaîment leur rôle.
Les ministres ont fait voler au galop les crédits sup-
plémentaires de 1842. C'eût été pourtant le cas de re-
mettre le ministère au pas.
— Le Cabinet espère que les crédits extraordinaires
demandés pour l'Algérie sur le budget de 1843 seront
volés en famille. Sur ce sujet pourtant, les ministres et
les chambres ne seront pas cousins.
— Le maréchal Soult a la confiance que, relativement
à l'Afrique, on approuvera tous ses comptes. On peut
dire d'avance, en effet, que là dessus son compte est
bon.
— Le ministre de la guerre demande pour les voyages
de M. Laurence en Algérie une indemnité de 100 fr. par
jour. Les jours de M. Laurence sont bien chers au ma-
réchal.
—11 paraît que si M. Laurence est si prodigue de
flatteries envers le président du conseil, il ne les lui
donne pas tout à fait gratis. Ses paroles sont mielleu-
ses ; mais ses prétentions ne laissent pas que d'être sa-
lées.
— Une feuille de l'opposition vient d'êlre citée devant
le tribunal civil pour avoir publié un article contre
les fonctionnaires corrupteurs. Les lecteurs du journal
incriminé avaient trouvé l'article assez juste pour méri-
ter d'être cité.
QUESTIONS POLITIQUES.
51 mars.
M. Sébasliani a deviné juste « quelles sont les person-
nes qui aiment le plus venir à domicile divaguer chez les
gens.»—« Ce sont les amateurs de botanique, a-t-il dit a
M. Decazes, parce qu'ils aiment à venir causer a pro-
pos de botanologie (à propos de bottes à nos logis-)»
M. Decazes a demandé encore à M. Sébasuaw .
« Quand les petits pois ont-ils une bonne odeur?» '