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Le charivari — 48.1879

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https://doi.org/10.11588/diglit.25493#0123
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LE CHARIVARI

2e bourgeois. —Vous avez uu lot qui vous con-
vient ?

—Non ; je ne sais quel cadeau donner à ma femme
pour sa fête, alors je vais pouvoir lui offrir ce que
je viens de gagner.

— Un bracelet, sans doute?

— Non ; mais ce moulin à farine que vous voyez
là-bas dans le coin.

Un monsieur court après une voiture.

— Vous pouvez monter, bourgeois.

— Prêlez-moi vos deux chevaux, ou plutôt je les
prends pour une course ; vênez aussi, vous les
conduirez.

— Que voulez-vous faire de mes cheveux sans ma
voiture ?

— C'est pour les atteler à mon lot ; j’ai gagné cet
omnibus, dans lequel toute ma famille a déjà pris
place.

un monsieur (criant). — Qui veut sa peser?

un gardien de la paix. — Vous n’avez pas le
droit de vous établir là.

— J’ai gagné une balance et je tiens à en tirer
profit.

le gardien de la paix (à un monsieur qui se
promène en habit brodé). — Ce n'est pas aujour-
d’hui mardi gras, vous n’avez pas le droit de sortir
en chienlit.

— Mais je viens de gagner cet habit brodé qui
est estimé deux mille trois cent quarante - cinq
francs.

un rrocanteur, — J’achète les lots qui ne con-
viennent pas.

— Que m’offrez-vous de cet habit brodé ?

— Dix francs.

— Merci ! Pour le gagner, j’ai pris quarante francs j
de billets.

m. Alphonse. — Je suis content ! J’ai gagné une j
batteuse, ça me servira... pour Virginie.

1er monsieur. — J’ai gagné une passerelle pour ;
jardin ; je n’ai plus qu’à me procurer le jardin.

2° monsieur (très rêveur). - J’ai gagné un sous-
sol de restaurant... Qu’est-ce que cela peut donc
bien être ?

3° monsieur. — J’avais envie de gagner un meu-
ble pour garnir l'espace qui existe entre les deux
fenêtres de mon salon; j’y placerai toujours le
modèle de grue pivotante et roulante que je vienes !

de gagner.

4° monsieur.— Voulez-vous me la changer contre j
mon lot?

— Qu’est-ce que c’est?

— Un projet d’hôtel de ville avec tribunal de
commerce.

— Moi, comme je prends beaucoup de bains, je ;

ne suis pas fâché de mon lot : J’ai gagné le wagon
de cinq mille kilogrammes de carbonate de soude.
J’en mettrai mille dans la corbeille de mariage de
ma fille. 1

Adrien Huart.

i

i

D’APRÈS SA CORRESPONDANCE

Les lettres sont à la mode.

On recueille toutes les épaves épistolaires qu’on peut
rencontrer, et on en fait des volumes qui ont la préten-
tion de nous initier à la vie intime de ceux que la pos-
térité a commencé à admirer de loin.

Eugène Delacroix ne pouvait échapper aux recherches
des résurrecteurs.

C’est M. Philippe Bertin qui, avec l’intelligent et ar-
tistique concours de la librairie Quantin, s’est chargé
de rassembler la correspondance du maître.

Avouons-le, cette lecture nous a causé quelque dé-
ception.

Est-ce que les morceaux curieux n’ont pas été re-
trouvés ?

Est-ce que Delacroix ne se dépensait pas la plume
à la main ?

--<►-

CHRONIQUE DU JOUR

Lors du grand tralala de 1866 en Allemagne, non-
seulement'les Etats, mais les biens privés de l’électeur
de Hesse furent confisqués par le gouvernement de
Berlin.

C était la punition de cet électeur, qui s’était avisé
(voyez l’imprudence!) d’avoir une armée moins nom-
breuse que celle du roi de Prusse.

Si petite que soit la Hesse sur la carte, elle ne passe
pas, à ce qu’on raconte, par le gosier qui l’a avalée.

On en est aux pourparlers pour faire accepter une
rente aux héritiers du prince spolié. Moyennant quoi,
ceux-ci abandonneraient leurs prétentions aux divers
immeubles meublés, tels que châteaux et palais.

Il va donc falloir dresser des inventaires, estimer des
ustensiles de ménage ou de toilette : Tant pour les
casseroles ; — ce lavabo tant ; — la brosse à dents peut
passer par-dessus le marché ; — mais vous me comptez
cet autre vase un peu cher. — Etc.

Voilà comment le drame de la guerre peut se dé-
nouer piteusement dans une étude "d’huissier-priseur.
Les bulletins de la victoire sont rédigés aujourd’hui sur
papier timbré, et les plus glorieux.' lauriers négociés
au poids et à la botte.

Allons ! les monarques se jouent entre eux de bonnes
grosses farces ; mais leur prestige n’y gagne pas.

Cette forteresse de Podgoritza; qu’en dépit des traités
la Turquie tardait à livrer au Monténégro !...

Oh ! oh! c’était grave. Qui sait si l’Aogleterre n’agis-
saii pas en dessous, comme du temps où nous l’appe-
lions par son petit nom d’Albion? N’allait-on pas en-
core verser du sang slave pour le plus grand bien du
panslavisme?... La diplomatie ne dormait que d’un
œil.

Eh bien, tout est arrangé à l’heure où je vous parie.
Il y avait seulement ceci, que le pacha turc chargé de
livrer la chose, avait pris un gros rhume dans ces der-
niers temps, et que, s’exagérant son mal, il avait gardé
la ville tout entière, quand le médecin lui avait seu-
lement commandé de garder la chambre.

A quelques kilomètres plus loin, en Macédoine, les
autorités russes ont arrêté des chefs d’insurgés qui ré-
pondent à des noms germains, tels que Schultz et
Walter.

On sait, de reste qu’il n’y a pas de pays au monde
où le méli-mélo des races soit plus difficile à démêler.
C’est une vraie salade.

Eh! mais, j’y peDse; n’avons nous pas en cuisine ce
que nous appelons « une macédoine », soit l’échan-

llltonnage complet de tô»s les lé&iïTrïna connus?
Concluez vous-même à l’étymologie.

Sans èlre trop curieux, je voudrais, une fois dans ma
vie, voir le n° 1 sortir au tirage d’une loterie.

Sachez qu’aussi je me suis promis quelque chose s’il
surgit des roues du Trocadéro; et c’est la mauière que
j’ai inventée à mon usage pour prendre part à la grande
loterie, sans priver personne d’une chance de gain.

Mais ce bienheureux n° 1, l’égal de tous les autres
devant le destin, a la modestie obtinée de rester caché.

Cttte vertu lui est d’ailleurs unanimement reconnue.
Si, par hasard, il sort un ae ces prochains jours, vous
entendrez, en effet, des cris d’étonnement que ne sus-
citeront jamais le 697,432 ou le 23,903, lesquels pourtant
sont aussi uniques dans leur genre.

Le New-York Herald nous la bâille belle.

A l’en croire, un pont se serait formé sous les chutes
du Niagara, et serait assez solide pour porter des char-
rettes chargées de matières lourdes.

Ou a quelque soupçon que ce pont est celui que les
« canards ont bien passé. »

Il y a de cela quarante ans. Le théâtre des Variétés
exploitait encore par tradition le genre populaire dé-
rivant du genre « poissard », si en faveur au siècle
dernier. Les héros ordinaires de ses vaudevilles étaient
des égouliers, des balayeurs, des portefaix et des cuisi-
nières.

L’acteur Thiercelin (si élégant à la ville) excellait
dans les savetiers. On disait ‘même de lui, en prenant
un air fin, « qu’il eût été déplacé aans les rôles de
cordonniers ».

Celait les mœurs du petit monde travailleur qui
étaient mises sur la scène, les mœurs du vrai peuple,
du peuple honnête.

Mais voilà que deux auteurs, poussant leurs investi-
gations jusqu’à la bohème, donnèrent une pièce inti-
tulée : le Chenapan, qui était écrbe dans le plus impur
argot des bouges.

Cétait comme l'Assommoir de ce temps-là.

Mais il paraît que les spectateurs de 1839 avaient les
oreilles autrement chatouilleuses que les nôtres, car il
fallu baisser le rideau avant le dénouement.

Que les temps sont changés!... Nos oreilles, voyez-
vous, sont devenues comme des bouches d’égout. Elles
reçoivent sans se plaindre tous les détritus de la lan-
gue, et jusqu’aux mots les plus rebutants qu’il plait
aux auteurs d’y jeter.

Il y avait pourtant dans ce Chenapan une réplique
bien spirituelle, et qui a une verdeur à la Beaumar-
chais :

— Tu paies tes dettes? disait Odryà un de ses cama-
rades... alors ce n’est pas la peine d’en faire I

Albert de Lasalle

---—-*■-

OBSERVATIONS

Il est si vrai que les femmes sont, avant tout,
nées pour faire des enfants , qu’elles n’aspirent
guère qu’à séduire sous le rapport physique : « Je
donnerais tous mes livres pour avoir cette jolie
tête-là, » disait Mmo de [Staël parlant de son amie,
Mm) Récamier.

*

* *

Il arrive un âge où certaines gens n’ayant pu rien
produire, cherchent à tout démolir : comme ces en-
fants qui, n’ayant pu élever leur château de cartes,
renversent de dépit celui de leurs camarades.

Le nombre des éditions d’un livre est utile à
constater, non pour témoigner du mérite de l’au-
teur, mais du goût du public.

Il y a des livres honnêtes femmes qui passent
sans qu’on les aperçoive, et des livres filles pu-
bliques qui attirent les regards de la foule par
tout ce qu’ils promettent de gravelures.

Toujours est-il que rien ne nous paraît s’élever au- j
dessus d’une moyenne courante dans ces feuilles cou- :
sues ensemble.

11 y a ci pendant à glaner en pareil cas.

Glanons.

Un des signes caractéristiques qui apparaissent tout
d’abord dans nombre de lettres, c’est le goût de Dela-
croix pour le petit coin, pour la vie à l’écart.

Dans une lettre datée de 1829, il déclare la guerre au
monde, sous la forme de cette énergique boutade :

A SOULIER.

« 29 janvier 1829.

» Cher ami, comment faire pour écrire par un temps
aussi scélérat! Aujourd’hui, je ne me suis levé qu’à
deux heures après-midi pour avoir moins froid. Je suis
dans les horreurs du déménagement. J’espère que je
serai bien. Tu voudras bien m’écrire dorénavant, quai
Voltaire n° 13. Tu vois que je me rapproche du quartier
de la bonne compagnie, et cela sera, s’il plait à Dieu
pour me faire devenir le plus insociable possible, pom-
me coucher de bonne heure, narguer les insolents et
les cousus d’or, comme c’est ma nature, il faut lâcher
d’ètre gueux en enrageant le moins possible, »

Dans une lettre écrite du fond d’un hameau de Seine-
et-Oise, le peintre s’exprimait ainsi :

« Mon ami, il faut venir au mois de mars dans ce vil-
lage pelé des environs de Paris, comme ils sont tous,
pour renverser en esprit tous les systèmes sur le beau,
l’idéal, le choix, etc. La plus pauvre allée avec ses ba-
guettes toutes droites, sans feuilles, dans un horizon
plat et terne, en dit autant à l’imagination que tous

les sites les plus vantés. Ce petit cotylédon qui perce

la terre, cette violette qui répand son premier parfum
sont ravissants. J’aime autant cela que les pins d’Italie
qui ont l’air de panaches et les fabriques dans les;pay-
sages, qui sont comme des assiettes montées pour le
dessert. Vivo la chaumière 1 Vive tout ce qui parle à
l’âme !

» Heureux qui possède un coin de terre ; mais si ce
coin de terre a dix mille arpents, je n en veux pas sans
souvenirs qui m’y rattachent et my rappellent à cha-
que pas ceux que j’ai aimés. Je préférerais à une villa
magnifique le plus petit enclos où se serait passée ma
jeunesse. -

Le morceau n’est pas sans charme.

Mais rien de particulièrement éclatant comme per-
sonnalité, avouez-le.

Si Delacroix avait sincèrement le goût de l’isolement,
 
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