LE CHARIVARI
J’ignore, en vérité, quelle objection serait à op-
poser à cette élection qui s’impose.
Dira-t-on que Louis Blanc ne voudrait pas s'as-
servir à la formalité écœurante des visites, cette
mendicité à domicile?
En cela, il ferait bien.
Mais l’Académie ferait encore mieux en le nom-
mant spontanément.
Quand on est réflecteur, il faut chercher les lu-
mières.
LE PETIT DANTAN.
A PROPOS DE GALETTE
Une petite commune du département de la Nièvre
a un conseil municipal tout dévoué au clergé.
Depuis longtemps les habitants de Champalle-
ment se dispensaient d’assister aux saints offices,
mais ils continuaient à offrir le pain bénit.
Ils ont voulu dernièrement se soustraire à cet
impôt. Us aiment mieux manger en famille les ga-
lettes qu’ils préparent.
Mais le curé, privé de gâteau, ne fut pas content.
11 s’adressa alors au conseil municipal, dont tous
les membres sont des hommes bien pensants.
Le conseil se réunit pour étudier cette grave af-
faire et trouver une solution qui donnerait satisfac-
tion au curé de Champallement.
Après une longue délibération, il a pris la réso-
lution suivante :
« Tout habitant du culte catholique romain ha-
bitant le pays, et non reconnu indigent, sera tenu à
tour de rôle d’offrir, le dimanche, un pain bénit se-
lon ses moyens, faute de quoi il sera privé de sou
droit d’affouage, ainsi que cela se pratique dans
toutes les communes de la contrée. »
Le droit d’affouage est celui qui attribue à cha-
que habitant des communes possédant, des bois
communaux une certaine provision de bois an-
nuelle. Ainsi, de par le conseil municipal de Gham-
pallement, celui qui ne donne pas le pain bénit
n’aura pas sa part de bois.
Voilà un conseil qui ne se gêne pas. Il met en
pénitence les habitants qui ne veulent pas offrir de
la galette au curé.
Avec ce système-là, on pourrait aller loin.
Il est probable que les couseilfers municipaux de
Champallement vont imaginer d’autres peines en-
core plus sévères contre le3 mauvaises têtes de la
commune.
Us rédigeront un arrêté conçu en ces termes :
« Considérant que, pendant les fortes chaleurs,des
habitants de la commune de Chapellement ne re-
gardent pas comme une punition d’être privés du
IMPRESSION ZOLATIQUE
— Avez-vous lu ou vu l’Assommoir?
— Comme tout le monde.
— Voilà un éloge eu peu de mots.
— Je no sais si c’est un éloge, dans tous les cas il
serait involontaire. Et puis dire d’un volume que tout
le monde l’a lu, d’un drame que tout le monde l’a vu,
d’un refrain que tout le monde le répète, est-ce faire
l’éloge du refrain ?
— Dame, ce me semble.
— Vous connaissez ïAmant d’Amanda'l
-- Qui est-ce qui n’en a pas les oreilles rebattues?
— Cela prouve t-il en faveur de cette insanité?
— Non, sans doute; mais ce n’est pas la même chose.
— Un peintre de talent s’avise un jour de représenter
un ivrogne de bas étage au moment où, près d’une
borne, il vomit le trop plein de sa cuvée, rien ne man-
que à la vérité du tableau; l’expression est si fidèle, si
réaliste, qu’il est impossible de regarder, sans se sentir
pris du mal de cœur. Direz-vous que c’est là une heu-
euse idée?
— Non; assurément non.
— Et pourtant le tableau est d’un maître, fait à la
façon des maîtres; chaque partie, prise séparément, est
parfaitement peinte; le sujet n’est pas invraisemblable,
droit d’affouage, car par une température de trente
degrés ifs n’auront pas besoin de se chauffer ;
Considérant qu’ils pourraient en conséquence
s’abstenir de fournir des brioches pour le pain bé-
nit, nous, conseillers municipaux bien pensants,
proposons :
1° D’empêcher les récalcitrants d’aller faire boire
leurs best'aux dans la mare aux canards ;
2° De prendre part à la iête du village.
Ceux qui n’auront pas fourni le pain bénit seront
enfermés chez eux par le garde champêtre, qui
aura la clé de tous les immeubles devenus momen-
tanément des cellules ;
3° Les filles des récalcitrants ne poutront concou-
rir pour les prix que l’on donne chaque année à la
rosière.
Ne pourra se présenter à ce concours que la fille
dont le père aura fourni très exactement la galette
nécessaire pour le service du culte.
U est expressément défendu aux pompiers d’é-
teindre le leu qui prendra à la maison d’un ennemi
de M. le curé.
La pompe ne servira qu’aux fidèles qui suivent
pieusement tous les offices.
5° Les fils de ceux qui n’auront pas fourni le pain
bénit seront seuls appelés à tirer au sort.
Les autres seront admis de droit dans la réserve
de l’armée leriitoriale.
6° Les coupables qui voudront faire amende ho-
norable pour jouir de tous les privilèges accordés
aux habitants de la commune, devront s’engager à
offrir tous les ans à notre bon curé un cochon en-
tier, deux sacs de pommes de terre et une barrique
de vieux vin.
7° Nous proposons, mais sans cependant espérer
que le préfet sanctionne notre proposition, à savoir
que tout individu ayant refusé de fournir le pain
bénit cessera d’être électeur.
8° Le montant de ses contributions sera doublé.
9° 11 ne pourra être marié dans la sal'e de la mai-
rie ; la cérémonie aura lieu dans une grange.
Défense expresse sera faite aux musiciens du
village d’accompagner la noce au son de la mu-
sique.
10° Enfin, tout réfractaire ne pourra être enterré
dauS le cimetière de la commune. Sa famille aura
le droit de faire mominfer le eurps pour le garder. »
Telles sont les surprises que le conseil municipal
de Champallement ménage aux ennemis de M. le
curé qui aime la religion autant que la brioche.
Adrien Huart.
—-—-—-
couru la, presse libérale... — « La presse qui... la presse
que... » etc. — à savoir qu’il a beaucoup plu ces temps
derniers 1
La cause de ces intempéries n’est point, comme le
prétend la science impie, dans une dépression atmos-
phérique continue, Non, le prélat nous le dit : « Dieu,
visiblement irrité, nous afflige ; et nous devons conve-
nir que nous méritons ses châtiments. »
On sent ce que ces paroles contiennent d’animadver-
sion pour la République, dont le clergé demande cepen-
dant au ciel le maintien et la prospérité. Il est vrai que
c’est en latin (Domine salvam fac Rempublicam!).
Ainsi, arrangez-vous de cela comme vous pourrez;
voilà un peuple qui a la vertu du travail, qui paie cor-
rectement ses împôis, qui, par des prodiges de sagesse
répare les dégâts du pouvoir absolu...
.Et c’est cette nation modèle, unique dans l’Eu-
rope, que vous condamnez au parapluie perpétuel 1...
Nous avons déjà feuilleté ensemble le Journal des
Avis et Affaires de Paris, publié au dix-septième siècle
par Colletet. Si vous le voulez, jetons y encore un
regard.
Voici par quelle périphrase il indique l’adresse de
ses bureaux (puisque l’idée si simple de numéroter les
maisons n’a elé trouvéeque cent ans plus tard, sous le
règne de Louis XVI).
Le Journal de Colletet se rédigeait donc ;
« Quai de l’Horloge, autrement dit des Morfondus,
qui regard» celui de la Mégisserie et qui aboutit d’un
bout au Cheval de Bronze et de l’autre à la rue du
Harlay, contre un notaire qui fait le coin de la rue, à
l’enseigne du Roi d’Angleterre. Les affiches marquent
la porte. »
A ce compte, et en supposant que l’humanité ne
jouisse pas encore de ta grande découverte du numéro-
tage des immeubles, le Charivari aurait son domicile :
« Rue d‘ la Victoire, ci-devant Chautereine, parallèle à
celle de Chàteauduu, ci-devant Olivier, aboutissant d’un
côté à la chaussée de M. le duc d’Antin, de l’autre au
faubourg Montmartre, s’adresser à la maison la mieux
fréquentée du quariier. »
Au lieu de ce logogriphe, le progrès des lumières a
permis de dire tout bonnement : Rue de la Victoire,
n° 20.
Mais avant de remettre dans notre bibliothèque ce
curieux Journal des Avis cl affaires de Pans, emprun-
tons-lui une annonce qui est bien caractéristique de
l’état des choses en l’année 1676:
« Nous savons un particulier, homme de boutique,
qui a un petit bien de campagne à vendre, à six petites
lieues de Paris, du côté de Marcoussis... »
Suit la description très engageante de ce domaine
qui contient plusieurs chambres, une grange et Uü jar~
din « plamé d’arbres qui t y plai-enl ». Le tout situé à
int-cOie, ave : vue sur un éïaug et, do» bols.
Quant aux conditions du marché... « La maison doit
une rente de six livres, rachetable à une abbaye; et
trois livres à la paroi-se, pareillement rachetables. Elle
a toujours été louée vingt-deux ou vingt-trois livres, et
on paie présentement neuf livres dix sous de rente.
Nous la ferons avoir pour soixante écus, si nous som-
mes consulté dans cettle affaire, qui serait fort propre
pour un petit bourgeois de Paris. »
Mœurs du temps 1
CHRONIQUE DU JOUB
L’évêque de Montauban vient de publier une lettre
pastorale qui traite de météorologie... (Je supplienotre
imprimeur de ne pas substituer au mot de météorologie
celui de mythologie, ainsi que, comme on va le voir,
il pourrait s'y laisser entraîner.)
Cette lettre contient une remarque qui avait déjà
Un congrès de femmes vient de se réunir en Angle-
terre. Le but poursuivi est « ]a recherche de Remplace-
ment du Paradis terrestre. »
Si on voulait être galant, on dirait à ces dames : « Ne
vous dérangez pas. Ce que vous voulez aller chercher
bien loin est tout près de vous. Le Paradis terrestre,
c'est votre foyer que vous embellissez de toutes les
grâces, de tout le charme de vos adorables personnes 1 »
Mais ces madrigaux à la française sont démodés même
en France.
fous les jours nous voyons de ces scènes de sales dé-
bauches.
Cependant j’avoue que, pour mon goût, je ne puis
croire que le but de l’art soit do représenter des sujets
dont je me détourne avec horreur, quand je les ren-
contre sur ma route, ces sujets fussent-ils peints dans
la dernière perfection.
— C’est aussi ce que je pense.
— Ce n’est pas que je prétende, comme certaines
gens, que le but de l’art soit exclusivement de repré-
senter des sujets tirés de la Morale en action: non, je
cruis qu’il est permis d’aspirer moins haut; et pourvu
qu’il nous entretienne de sujets que nous recher-
chons avec plaisir, avec intérêt dans la vie, sa fin est
remplie. Chaque chose a son moment, les aspirations
sublimes comme les sensations agréables ou intéres-
santes.
— En conscience, je n’oserais dire le contraire.
— Certes, je puis un jour entrer à la Morgue pour
avoir une idée de la chose; je puis, en pensant à autre
chose, fredonner le Pied qui remue; si je l’avais sous )a
main, je pourrais par curiosité lire quelques chapitres
de Julie; mais si je voyais dans un salon un superbe
tableau de maître représentant la Morgue; si la mai-
tresse de maison ouvrait son piano pour jouer le Pied
qui remue; si mon ami se complaisait dans la lecture du
livre ignoble dont je parlais tout à l’heure, je me di-
rais : Ces gens-là Sont malades d’esprit tout au moins;
et si j’éiais artiste, je ne croirais pas utile ni agréable
de travailler pour ces gens-là.
— Oui, et si l’artiste ne traitait jamais et de parti
pris que des sujets analogues, je le croirais atteint du
môme mal. Pour en revenir à l’auteur de l'Assommoir,
je le considère comme un homme de talent, mais d’un
goût problématique ; à moins, et je le soupçonne, que
son livre ne soit le coup de pistolet d’un artiste
qui veut attirer si'” lui les regards de la foule, sauf à '
prouver bientôt à cette foule qu’il est homme à faire
un chef-d œuvre. L’ambition a de ces ruses.
—J’aime à le croire; car ce serait chose déplorable que
la mode vint de cette littérature marécageuse.
A ce propos, j’ai été hier témoin d’une scène que
j’appellerai zolalique, tant elle est digne, traitée par le
maître, d’entrer dans sa collection.
— Dites.
— Non. On regarde ces horreurs un instant, on ne
cherche pas à lés reproduire.
— Dites toujours, nous ne sommes que nous deux.
— Vous avez vu cela cent fois.
— Qu’importe.
— Vous le voulez, je ne ferai qu’une esquisse incom-
plète et mauvaise assurément, mais qui viendra a 1 ap-
pui de la thèse. ,, .
— Toujours le sonnet d’Oronte ; allez donc, douaecî—
derons ensuite si un tel sujet devait être rep ente ou
décrit dans un livre? ,,
— S’il y était décrit tout au long, cr. ?u? * ^Uteur
procéderait à la façon de Lycurgue a- K u des Ilotes.
— La chose est ‘faite après i’appantion du fameux
livre en question.
— Je commence donc.
J’étais assez loin de f 1dfns un de nos fau-
bourgs, quand je fus surp«1S P” une bourrasque de
mars. Je cherchais un refuge , J avise un petit café bor-
gne où i’entre pour me nature a labri. Cette sorte de
caboulot était rernP.U dei consommateurs à figures plus
ou moins pympa'Juques. Une petite table était vide
dans le fond de l'etablissement, je m’y installe.
J’étais à peine assis que je vois la porte d’entree s ou-
vrir brus<fuement el battre les parois avec fracas, tous
les consommateurs de regarder qui faisait tant de bruit,
et bientôt apres ne se remettre à jouer les u9® aux
cartes, les autres aux domiuos, comme s’ils s® lussent
dit : Ah! ce n’est que cela, ce n’est pas étonwaU •
J’ignore, en vérité, quelle objection serait à op-
poser à cette élection qui s’impose.
Dira-t-on que Louis Blanc ne voudrait pas s'as-
servir à la formalité écœurante des visites, cette
mendicité à domicile?
En cela, il ferait bien.
Mais l’Académie ferait encore mieux en le nom-
mant spontanément.
Quand on est réflecteur, il faut chercher les lu-
mières.
LE PETIT DANTAN.
A PROPOS DE GALETTE
Une petite commune du département de la Nièvre
a un conseil municipal tout dévoué au clergé.
Depuis longtemps les habitants de Champalle-
ment se dispensaient d’assister aux saints offices,
mais ils continuaient à offrir le pain bénit.
Ils ont voulu dernièrement se soustraire à cet
impôt. Us aiment mieux manger en famille les ga-
lettes qu’ils préparent.
Mais le curé, privé de gâteau, ne fut pas content.
11 s’adressa alors au conseil municipal, dont tous
les membres sont des hommes bien pensants.
Le conseil se réunit pour étudier cette grave af-
faire et trouver une solution qui donnerait satisfac-
tion au curé de Champallement.
Après une longue délibération, il a pris la réso-
lution suivante :
« Tout habitant du culte catholique romain ha-
bitant le pays, et non reconnu indigent, sera tenu à
tour de rôle d’offrir, le dimanche, un pain bénit se-
lon ses moyens, faute de quoi il sera privé de sou
droit d’affouage, ainsi que cela se pratique dans
toutes les communes de la contrée. »
Le droit d’affouage est celui qui attribue à cha-
que habitant des communes possédant, des bois
communaux une certaine provision de bois an-
nuelle. Ainsi, de par le conseil municipal de Gham-
pallement, celui qui ne donne pas le pain bénit
n’aura pas sa part de bois.
Voilà un conseil qui ne se gêne pas. Il met en
pénitence les habitants qui ne veulent pas offrir de
la galette au curé.
Avec ce système-là, on pourrait aller loin.
Il est probable que les couseilfers municipaux de
Champallement vont imaginer d’autres peines en-
core plus sévères contre le3 mauvaises têtes de la
commune.
Us rédigeront un arrêté conçu en ces termes :
« Considérant que, pendant les fortes chaleurs,des
habitants de la commune de Chapellement ne re-
gardent pas comme une punition d’être privés du
IMPRESSION ZOLATIQUE
— Avez-vous lu ou vu l’Assommoir?
— Comme tout le monde.
— Voilà un éloge eu peu de mots.
— Je no sais si c’est un éloge, dans tous les cas il
serait involontaire. Et puis dire d’un volume que tout
le monde l’a lu, d’un drame que tout le monde l’a vu,
d’un refrain que tout le monde le répète, est-ce faire
l’éloge du refrain ?
— Dame, ce me semble.
— Vous connaissez ïAmant d’Amanda'l
-- Qui est-ce qui n’en a pas les oreilles rebattues?
— Cela prouve t-il en faveur de cette insanité?
— Non, sans doute; mais ce n’est pas la même chose.
— Un peintre de talent s’avise un jour de représenter
un ivrogne de bas étage au moment où, près d’une
borne, il vomit le trop plein de sa cuvée, rien ne man-
que à la vérité du tableau; l’expression est si fidèle, si
réaliste, qu’il est impossible de regarder, sans se sentir
pris du mal de cœur. Direz-vous que c’est là une heu-
euse idée?
— Non; assurément non.
— Et pourtant le tableau est d’un maître, fait à la
façon des maîtres; chaque partie, prise séparément, est
parfaitement peinte; le sujet n’est pas invraisemblable,
droit d’affouage, car par une température de trente
degrés ifs n’auront pas besoin de se chauffer ;
Considérant qu’ils pourraient en conséquence
s’abstenir de fournir des brioches pour le pain bé-
nit, nous, conseillers municipaux bien pensants,
proposons :
1° D’empêcher les récalcitrants d’aller faire boire
leurs best'aux dans la mare aux canards ;
2° De prendre part à la iête du village.
Ceux qui n’auront pas fourni le pain bénit seront
enfermés chez eux par le garde champêtre, qui
aura la clé de tous les immeubles devenus momen-
tanément des cellules ;
3° Les filles des récalcitrants ne poutront concou-
rir pour les prix que l’on donne chaque année à la
rosière.
Ne pourra se présenter à ce concours que la fille
dont le père aura fourni très exactement la galette
nécessaire pour le service du culte.
U est expressément défendu aux pompiers d’é-
teindre le leu qui prendra à la maison d’un ennemi
de M. le curé.
La pompe ne servira qu’aux fidèles qui suivent
pieusement tous les offices.
5° Les fils de ceux qui n’auront pas fourni le pain
bénit seront seuls appelés à tirer au sort.
Les autres seront admis de droit dans la réserve
de l’armée leriitoriale.
6° Les coupables qui voudront faire amende ho-
norable pour jouir de tous les privilèges accordés
aux habitants de la commune, devront s’engager à
offrir tous les ans à notre bon curé un cochon en-
tier, deux sacs de pommes de terre et une barrique
de vieux vin.
7° Nous proposons, mais sans cependant espérer
que le préfet sanctionne notre proposition, à savoir
que tout individu ayant refusé de fournir le pain
bénit cessera d’être électeur.
8° Le montant de ses contributions sera doublé.
9° 11 ne pourra être marié dans la sal'e de la mai-
rie ; la cérémonie aura lieu dans une grange.
Défense expresse sera faite aux musiciens du
village d’accompagner la noce au son de la mu-
sique.
10° Enfin, tout réfractaire ne pourra être enterré
dauS le cimetière de la commune. Sa famille aura
le droit de faire mominfer le eurps pour le garder. »
Telles sont les surprises que le conseil municipal
de Champallement ménage aux ennemis de M. le
curé qui aime la religion autant que la brioche.
Adrien Huart.
—-—-—-
couru la, presse libérale... — « La presse qui... la presse
que... » etc. — à savoir qu’il a beaucoup plu ces temps
derniers 1
La cause de ces intempéries n’est point, comme le
prétend la science impie, dans une dépression atmos-
phérique continue, Non, le prélat nous le dit : « Dieu,
visiblement irrité, nous afflige ; et nous devons conve-
nir que nous méritons ses châtiments. »
On sent ce que ces paroles contiennent d’animadver-
sion pour la République, dont le clergé demande cepen-
dant au ciel le maintien et la prospérité. Il est vrai que
c’est en latin (Domine salvam fac Rempublicam!).
Ainsi, arrangez-vous de cela comme vous pourrez;
voilà un peuple qui a la vertu du travail, qui paie cor-
rectement ses împôis, qui, par des prodiges de sagesse
répare les dégâts du pouvoir absolu...
.Et c’est cette nation modèle, unique dans l’Eu-
rope, que vous condamnez au parapluie perpétuel 1...
Nous avons déjà feuilleté ensemble le Journal des
Avis et Affaires de Paris, publié au dix-septième siècle
par Colletet. Si vous le voulez, jetons y encore un
regard.
Voici par quelle périphrase il indique l’adresse de
ses bureaux (puisque l’idée si simple de numéroter les
maisons n’a elé trouvéeque cent ans plus tard, sous le
règne de Louis XVI).
Le Journal de Colletet se rédigeait donc ;
« Quai de l’Horloge, autrement dit des Morfondus,
qui regard» celui de la Mégisserie et qui aboutit d’un
bout au Cheval de Bronze et de l’autre à la rue du
Harlay, contre un notaire qui fait le coin de la rue, à
l’enseigne du Roi d’Angleterre. Les affiches marquent
la porte. »
A ce compte, et en supposant que l’humanité ne
jouisse pas encore de ta grande découverte du numéro-
tage des immeubles, le Charivari aurait son domicile :
« Rue d‘ la Victoire, ci-devant Chautereine, parallèle à
celle de Chàteauduu, ci-devant Olivier, aboutissant d’un
côté à la chaussée de M. le duc d’Antin, de l’autre au
faubourg Montmartre, s’adresser à la maison la mieux
fréquentée du quariier. »
Au lieu de ce logogriphe, le progrès des lumières a
permis de dire tout bonnement : Rue de la Victoire,
n° 20.
Mais avant de remettre dans notre bibliothèque ce
curieux Journal des Avis cl affaires de Pans, emprun-
tons-lui une annonce qui est bien caractéristique de
l’état des choses en l’année 1676:
« Nous savons un particulier, homme de boutique,
qui a un petit bien de campagne à vendre, à six petites
lieues de Paris, du côté de Marcoussis... »
Suit la description très engageante de ce domaine
qui contient plusieurs chambres, une grange et Uü jar~
din « plamé d’arbres qui t y plai-enl ». Le tout situé à
int-cOie, ave : vue sur un éïaug et, do» bols.
Quant aux conditions du marché... « La maison doit
une rente de six livres, rachetable à une abbaye; et
trois livres à la paroi-se, pareillement rachetables. Elle
a toujours été louée vingt-deux ou vingt-trois livres, et
on paie présentement neuf livres dix sous de rente.
Nous la ferons avoir pour soixante écus, si nous som-
mes consulté dans cettle affaire, qui serait fort propre
pour un petit bourgeois de Paris. »
Mœurs du temps 1
CHRONIQUE DU JOUB
L’évêque de Montauban vient de publier une lettre
pastorale qui traite de météorologie... (Je supplienotre
imprimeur de ne pas substituer au mot de météorologie
celui de mythologie, ainsi que, comme on va le voir,
il pourrait s'y laisser entraîner.)
Cette lettre contient une remarque qui avait déjà
Un congrès de femmes vient de se réunir en Angle-
terre. Le but poursuivi est « ]a recherche de Remplace-
ment du Paradis terrestre. »
Si on voulait être galant, on dirait à ces dames : « Ne
vous dérangez pas. Ce que vous voulez aller chercher
bien loin est tout près de vous. Le Paradis terrestre,
c'est votre foyer que vous embellissez de toutes les
grâces, de tout le charme de vos adorables personnes 1 »
Mais ces madrigaux à la française sont démodés même
en France.
fous les jours nous voyons de ces scènes de sales dé-
bauches.
Cependant j’avoue que, pour mon goût, je ne puis
croire que le but de l’art soit do représenter des sujets
dont je me détourne avec horreur, quand je les ren-
contre sur ma route, ces sujets fussent-ils peints dans
la dernière perfection.
— C’est aussi ce que je pense.
— Ce n’est pas que je prétende, comme certaines
gens, que le but de l’art soit exclusivement de repré-
senter des sujets tirés de la Morale en action: non, je
cruis qu’il est permis d’aspirer moins haut; et pourvu
qu’il nous entretienne de sujets que nous recher-
chons avec plaisir, avec intérêt dans la vie, sa fin est
remplie. Chaque chose a son moment, les aspirations
sublimes comme les sensations agréables ou intéres-
santes.
— En conscience, je n’oserais dire le contraire.
— Certes, je puis un jour entrer à la Morgue pour
avoir une idée de la chose; je puis, en pensant à autre
chose, fredonner le Pied qui remue; si je l’avais sous )a
main, je pourrais par curiosité lire quelques chapitres
de Julie; mais si je voyais dans un salon un superbe
tableau de maître représentant la Morgue; si la mai-
tresse de maison ouvrait son piano pour jouer le Pied
qui remue; si mon ami se complaisait dans la lecture du
livre ignoble dont je parlais tout à l’heure, je me di-
rais : Ces gens-là Sont malades d’esprit tout au moins;
et si j’éiais artiste, je ne croirais pas utile ni agréable
de travailler pour ces gens-là.
— Oui, et si l’artiste ne traitait jamais et de parti
pris que des sujets analogues, je le croirais atteint du
môme mal. Pour en revenir à l’auteur de l'Assommoir,
je le considère comme un homme de talent, mais d’un
goût problématique ; à moins, et je le soupçonne, que
son livre ne soit le coup de pistolet d’un artiste
qui veut attirer si'” lui les regards de la foule, sauf à '
prouver bientôt à cette foule qu’il est homme à faire
un chef-d œuvre. L’ambition a de ces ruses.
—J’aime à le croire; car ce serait chose déplorable que
la mode vint de cette littérature marécageuse.
A ce propos, j’ai été hier témoin d’une scène que
j’appellerai zolalique, tant elle est digne, traitée par le
maître, d’entrer dans sa collection.
— Dites.
— Non. On regarde ces horreurs un instant, on ne
cherche pas à lés reproduire.
— Dites toujours, nous ne sommes que nous deux.
— Vous avez vu cela cent fois.
— Qu’importe.
— Vous le voulez, je ne ferai qu’une esquisse incom-
plète et mauvaise assurément, mais qui viendra a 1 ap-
pui de la thèse. ,, .
— Toujours le sonnet d’Oronte ; allez donc, douaecî—
derons ensuite si un tel sujet devait être rep ente ou
décrit dans un livre? ,,
— S’il y était décrit tout au long, cr. ?u? * ^Uteur
procéderait à la façon de Lycurgue a- K u des Ilotes.
— La chose est ‘faite après i’appantion du fameux
livre en question.
— Je commence donc.
J’étais assez loin de f 1dfns un de nos fau-
bourgs, quand je fus surp«1S P” une bourrasque de
mars. Je cherchais un refuge , J avise un petit café bor-
gne où i’entre pour me nature a labri. Cette sorte de
caboulot était rernP.U dei consommateurs à figures plus
ou moins pympa'Juques. Une petite table était vide
dans le fond de l'etablissement, je m’y installe.
J’étais à peine assis que je vois la porte d’entree s ou-
vrir brus<fuement el battre les parois avec fracas, tous
les consommateurs de regarder qui faisait tant de bruit,
et bientôt apres ne se remettre à jouer les u9® aux
cartes, les autres aux domiuos, comme s’ils s® lussent
dit : Ah! ce n’est que cela, ce n’est pas étonwaU •