Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Le charivari — 61.1892

DOI Heft:
Janvier
DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.23886#0023
Überblick
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
ACTUALITÉS

3

_ Drôle d’idée de porter ainsi un chapeau de cocher d’omnibus !

— Dame ! mon cher, c’est qu’il y a pas mal de l’omnibus dans leur cas !

TEMPÊTE DÉCHAÎNÉE

Vous est-il arrivé d’avoir au-dessus de votre tête,
Pour voisine immédiate, une pianiste enragée? Si
°ui, vous compatirez à l’infortune du pauvre Adol-
phe Malvenu.

Toutes les fois qu’il entrait dans son appartement,
les gammes, les trilles, les arp èges déchaînés rou-
laient, éclataient, tonitruaient sur sa tète.

Adolphe tenait beaucoup à son appartement, où il
avait coulé des jours plus calmes

Comment mettre une digue à cette avalanche mu-
sicale ?

Il réfléchit longtemps et finit par trouver.

11 avait connu vaguement un garçon un peu hir-
sute qui gagnait sa vie en jouant du trombone, le
soir, dans un Eden quelconque, et en initiant, pon-
dant le jour, de jeunes impru dents à l’art de faire
hurler le cuivre.

A la porte de son sixième, une pancarte indi-

quait :

M. ISIDORE
LEÇONS DE TROMBONE

Adolphe songea à renouer connaissance avec ce

bruyant.

11 grimpa donc chez l’artiste, fut aimable, enjoué,
bon enfant, puis, avant de partir, il lui dit, avec un
bon trémolo de derrière le Conservatoire :

— Mon ami, tu pourrais me rendre bienheureux.

— Ah! s'écria le pauvre trombone, si j’étais capa-
ble de rendre quelqu’un heureux, j’aurais commencé
par moi!... Enfin, parle.

— J’ai une passion secrète pour le trombone !...
J’adore entendre cet instrument puissant!

— II y en a que ça embête !... Tu veux que je te
joue quelque chose?

— Oui, mais pas ici... chez moi, dans l’intimité!...
Par exemple, je ne voudrais pas te faire perdre ton
temps .. Tu donneras tes leçons tout de même; je
mets mon salon à ta disposition.

Dès le lendemain, le professeur de trombone
s’installa chez Adolphe.

Pauvre Malvenu! Au-dessus de sa tête, le piano
était déchaîné; à côté de lui, le trombone hurlait
sous le soulfle vague des élèves. Mais il tenait bon
quand même, se disant :

— Un peu de patience!,.. Ceci détruira cela... Avec
ce trombone béant, l’exercice du piano deviendra
bientôt impossible et l’impitoyable voisine sera obli-
gée de déménager.

Cependant, Adolphe fut bientôt à bout de force, et
il dut imaginer une foule de prétextes pour aller
prendre l’air pendant que l’inconscient Isidore s’é-
poumonnait.

Ces absences finirent par ne plus étonner le pro-

fesseur; même un jour, voyant que son ami ne sor-
tait pas, il s’écria :

— Tu ne sors pas aujourd’hui ?... Tu restes trop
renfermé, tu te rendras malade... Tu as une nature
qui réclame de l’exercice.

Bravo Isidore! II venait de trouver la formule dé-
finitive des excuses journalières.

Adolphe devait sortir pour sa santé !

Le pauvre! S’il avait pu deviner quel machiavé-
lisme cachait cet apparent intérêt.

Hélas! le hasard d’une rencontre dans l'escalier
avait rapproché le trombone de la pianiste.

— Vous êtes artiste, mademoiselle? avait dit le
trombone en s’inclinant.

— Comme vous, avait répondu la pianiste avec
modestie.. Vous avez remplacé le mélophobe qui
habitait au-dessous.

Et les relations devinrent de plus en plus suivies.

Adolphe restait absent toute la journée, laissant
le trombone seul.

Celui-ci en profitait pour aller rendre visite à la
voisine, et exécuter avec elle des duos passionnés.

Un jour, Adolphe connut toute l’étendue de son
■malheur.

Il reçut un billet d’Isidore, ainsi libellé :

« Mon cher ami,

« Je suis enfin heureux! J’épouse ta voisine la pia-
niste!... Aussitôt après la noce, je viens habiter chez
ma femme, — nous serons voisins! »

Jules Demolliens.
Bildbeschreibung
Für diese Seite sind hier keine Informationen vorhanden.

Spalte temporär ausblenden
 
Annotationen