SOIXANTE-UNIEME ANNÉE Prix do Numéro : ÊS centime* JEUDEfâl JANVIER 1892
ABONNEMENTS
PARIS
Trois mois. 18 fr.
Six mois. 36 —
Un an. 72 —
(les MANDATS TÉLÉGRAPHIQUES NB SONT PAS IlEÇUs)
les abonnements varient des i" et te de chaque mois
DIRECTION
Politique, Littéraire et Artistique
PIliKUE VÉli01\
Rédacteur en Cliel
BUREAUX
DB U RÉDACTION et de l’administration
Rue de la Victoire 20
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DÉPARTEMENTS
Trois mois. 20 fr.
Six mois. 40 —
Un an. 80 —
(les mandats télégraphiques nb sont pas reçus)
L’abonnement d’un an donne droit à la prime gratuite
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Politique, Littéraire et Artistique
PIEIÎRE VÉKON
Rédacteur en Chef
ANNONCES
ADOLPHE EWiG, fermier de i.a publicité
92, Rue Richelieu
BULLETIN POLITIQUE
Il ne paraît pas probable que la Chambre vote
le projet de renouvellement partiel qui lui est
soumis. Il sera combattu vivement par les radi-
caux, défendu mollement par le centre, et la
droite le repoussera sans doute.
Pour notre part, nous ne saurions etre piis
d’une bien vive tendresse à l’égard d’un système
qui rendrait, pour ainsi dire, chronique la fièvre
électorale dans notre pays.
Avoir tous les deux ans, sur un tiers du terri-
toire, le spectacle peu ragoûtant des ambitions
effrénées, des promesses fallacieuse», des décla-
mations furibondes, des courbettes plates, ce ne
serait pas, croyons-nous, fait pour ajouter au
prestige de la République.
Si l’on écoutait le simple bon sens, il nous sem-
ble qu’on espacerait plutôt les consultations du
suffrage universel.
Voyez ce qui se passe depuis 1871, avec le ré-
gime des législatures de quatre ans.
La première année est complètement perdue,
tes députés nouveaux ayant besoin de se mettre
au courant et d’apprendre leur métier.
Puis il faut le temps de formuler des projets de
réformes, en les faisant passer par la longue
filière des commissions et des délibérations suc-
cessives.
Si vous ajoutez que, pendant la dernière
ahtiée de leur mandat, les députés ne songent
Nus qu’à leur réélection future et sont beaucoup
ftus dans leur département qu’à la Chambre,
v°us arriverez à constater qu’avec le régime en
vtgueur on ne peut rien faire d’utile ni de pra-
tique.
L’est au moment même où l’on serait sur le
fi°int d’aboutir à quelque chose que la Chambre
licenciée. Après quoi, il faut recommencer le
travail d’avortement.
Ëlus pour six ans, nos députés pourraient sans
°ute rendre des services. Dans l’état actuel des
ils ne sont que des démolisseurs de minis-
f>e; des entrepreneurs de boucan.
’ «es t;mi t;|jrcütmLh uo uuuuttu.
Si vous voulez améliorer, prolongez la durée
fiu mandat,
de
—au lieu de sectionner le Parlement,
l’émietter par le renouvellement partiel.
fera rien du tout
, ^ais pas de danger, on ne
c est bien plus simple
Le régime parlementaire, tel qu’il fonctionne,
consiste à signaler les abus
mais.
sans y remédier ja-
l auvre petit I erdinand 1 H paraît que, malgré la
tendresse de Stamboulolî, il n’est pas content de
son sort.
Si peu content qu’aux réceptions du Jour de
1 An, il a répondu au doyen des officiers, qui
affirmait la loyauté de l’armée, par cette apos-
r°phe incongrue :
•--♦-—-
«Je ne conjj*t|%-malheureusement
cette loyauté, e$ je puis vous assurer, m '
que si je n’étais lié par le serment que j'aj£pPl||
et par l’amour sincère que je nourris pour ce
pays d’adoption, je serais aujourd’hui plus heu-
reux dans mes propriétés que sur le trône de
Bulgarie.
» Je suis convaincu qu’il y a dans mon armée
de très nombreux officiers qui honorent leur pro-
fession. Mais il y en a aussi quelques-uns qui
sont assez peu raisonnables pour se laisser en-
traîner à de criminelles tentatives. »
Mais retournez-y donc, dans vos propriétés,
mon pauvre fourvoyé 1 Votre serment, on ne de-
mande qu’à vous en délier. Votre prétendu
amour, on ne le partage pas.
Quant à l’armée bulgare, plus elle est patriote,
moins elle doit de dévouement à un étranger tel
que vous.
Pierre, Véron.
LE QUATRAIN D'HIER
LE SPIRITE
— Ce qui se passe au sein des immeubles hantes!
Tout est bouleversé', tapages effroyables ;
Les têtes à Venvers; des cris épouvantables...
le néophyte
— Tiens! Mais on dirait La Chambre des députés.
SIFFLET.
PROCÉDÉS PERFECTIONNÉS
Minuit (l’heure des crimes)!
Une chambre d’hôtel plongée dans l’obscurité.
Un ronflement sort de l’alcôve; c’est le ronfle-
ment d’un illustre personnage politique étranger
qui, arrivé à Paris deux heures plus tôt, est des-
cendu incognito dans un quartier excentrique
pour se dérober aux importunités des repor-
ters.
Tout à coup... (ce « tout à coup » indique su-
rabondamment que le drame commence) tout à
coup les carreaux de la fenêtre volent en éclats...
L’illustre personnage est réveillé en sursaut et
ses cheveux se hérissent d’épouvante... Deux
hommes viennent de faire irruption dans la
chambre!. . Avant qu’il ait eu le temps de pous-
ser un cri, il est terrassé, ligotté savamment,
ficelé comme un saucisson.
Ses deux agresseurs, un petit brun et un grand
blond, sont très correctement vêtus ; habit noir,
gardénia à la boutonnière et gants crème.
A la lueur d’une lanterne sourde (Brrr!. .) le
petit brun, qui paraît être le chef, crochète meu-
bles et malles d’une main expérimentée, boule-
versant linge et papiers, puis revient vers le
lit...
L’illusire personnage, vert de terreur, croyant
sa dernière heure arrivée, s’empresse de lui ten-
dre son porte - monnaie, en claquant des dents.
Le petit brun, repoussant le porte-monnaie
avec un geste de dignité blessée et se décou-
vrant poliment. — Votre Excellence me per-
mettra-t-elle de lui demander quelle est son opi-
nion relativement à l’évacuation de l’Egypte?
(L'illustre personnage, paralysé par tapeur, ne
répond pas.) Votre Excellence épargnera, j’en
suis sûr, à un homme de mon éducation la dou-
leur d’avoir recours à des extrémités... {Ilexhibe
un revolver. Gestes convulsifs et bredouille-
ments confus de VExcellence.) Gela suffit!...
{Au grand blond qui a tiré de sa poche un
carnet et un crayon.) Ecris... Quel âge a Votre
Excellence? {Silence.) Mets 50, il les paraît bien...
Etes-vous marié?... Oui, il a une alliance au doigt...
Votre femme a-t-elle des amants?... Sapristi!
Excellence, dépêchons... il est plus de minuit et
demi... A-t-elle des amants? {Pas deréponse. Au
grand brun.) Mets qu’elle en a un... c’est bien
le moins.., Maintenant, passons au physique,,.
{Il arrache les couvertures du lit et retourne
sans façon VExcellence comme une côtelette
sur le gril.) Pardon, Excellence... {Dictant.) Du-
rillon au petit doigt du pied gauche. {Auscul-
tant.) Craquements au sommet du poumon... Son
Excellence est phtisique. {Ouvrant la table de
nuit dans laquelle il a flairé un document se-
cret.) Son Excellence a le diabète... As-tu écrit?,..
Ah! j’allais oublier que Son Excellence couche
avec un bonnet de cotoii.
Le grand blond. — En soie noire. Faut-il spé-
cifier?
Le petit brun. — G’est essentiel. Ajoute que
Son Excellence aime la table... Regarde-moi ce
nez rouge I {Rabattant les couvertures, qu'il
borde avec une sollicitude maternelle.) Il nous
reste à prier Votre Excellence d’agréer nos
excuses... Mais, dans notre profession, nous
avons si souvent affaire àdes sujets récalcitrants,
que nous sommes bien forcés d’employer des
procédés... perfectionnés.
L’illustre personnage, commençant à se ras-
surer. — Ah! çà, qui donc êtes-vous?
Le petit brun, saluant gracieusement. —
Huntell, reporter à l’Information instantanée,
l’inventeur de l’interview obligatoire... Monsieur
est mon secrétaire {Récapitulant.) Durillon,
Égypte, etc., ça va faire quatre-vingt dix lignes
de copie... c'est assez... Bonne nuit, Excellence!
{Au grand blond.) Déficèle monsieur et filons,
{Ils sortent par la fenêtre.)
Deux heures du matin. — Au journal.
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ANNONCES
ADOLPHE EWiG, fermier de i.a publicité
92, Rue Richelieu
BULLETIN POLITIQUE
Il ne paraît pas probable que la Chambre vote
le projet de renouvellement partiel qui lui est
soumis. Il sera combattu vivement par les radi-
caux, défendu mollement par le centre, et la
droite le repoussera sans doute.
Pour notre part, nous ne saurions etre piis
d’une bien vive tendresse à l’égard d’un système
qui rendrait, pour ainsi dire, chronique la fièvre
électorale dans notre pays.
Avoir tous les deux ans, sur un tiers du terri-
toire, le spectacle peu ragoûtant des ambitions
effrénées, des promesses fallacieuse», des décla-
mations furibondes, des courbettes plates, ce ne
serait pas, croyons-nous, fait pour ajouter au
prestige de la République.
Si l’on écoutait le simple bon sens, il nous sem-
ble qu’on espacerait plutôt les consultations du
suffrage universel.
Voyez ce qui se passe depuis 1871, avec le ré-
gime des législatures de quatre ans.
La première année est complètement perdue,
tes députés nouveaux ayant besoin de se mettre
au courant et d’apprendre leur métier.
Puis il faut le temps de formuler des projets de
réformes, en les faisant passer par la longue
filière des commissions et des délibérations suc-
cessives.
Si vous ajoutez que, pendant la dernière
ahtiée de leur mandat, les députés ne songent
Nus qu’à leur réélection future et sont beaucoup
ftus dans leur département qu’à la Chambre,
v°us arriverez à constater qu’avec le régime en
vtgueur on ne peut rien faire d’utile ni de pra-
tique.
L’est au moment même où l’on serait sur le
fi°int d’aboutir à quelque chose que la Chambre
licenciée. Après quoi, il faut recommencer le
travail d’avortement.
Ëlus pour six ans, nos députés pourraient sans
°ute rendre des services. Dans l’état actuel des
ils ne sont que des démolisseurs de minis-
f>e; des entrepreneurs de boucan.
’ «es t;mi t;|jrcütmLh uo uuuuttu.
Si vous voulez améliorer, prolongez la durée
fiu mandat,
de
—au lieu de sectionner le Parlement,
l’émietter par le renouvellement partiel.
fera rien du tout
, ^ais pas de danger, on ne
c est bien plus simple
Le régime parlementaire, tel qu’il fonctionne,
consiste à signaler les abus
mais.
sans y remédier ja-
l auvre petit I erdinand 1 H paraît que, malgré la
tendresse de Stamboulolî, il n’est pas content de
son sort.
Si peu content qu’aux réceptions du Jour de
1 An, il a répondu au doyen des officiers, qui
affirmait la loyauté de l’armée, par cette apos-
r°phe incongrue :
•--♦-—-
«Je ne conjj*t|%-malheureusement
cette loyauté, e$ je puis vous assurer, m '
que si je n’étais lié par le serment que j'aj£pPl||
et par l’amour sincère que je nourris pour ce
pays d’adoption, je serais aujourd’hui plus heu-
reux dans mes propriétés que sur le trône de
Bulgarie.
» Je suis convaincu qu’il y a dans mon armée
de très nombreux officiers qui honorent leur pro-
fession. Mais il y en a aussi quelques-uns qui
sont assez peu raisonnables pour se laisser en-
traîner à de criminelles tentatives. »
Mais retournez-y donc, dans vos propriétés,
mon pauvre fourvoyé 1 Votre serment, on ne de-
mande qu’à vous en délier. Votre prétendu
amour, on ne le partage pas.
Quant à l’armée bulgare, plus elle est patriote,
moins elle doit de dévouement à un étranger tel
que vous.
Pierre, Véron.
LE QUATRAIN D'HIER
LE SPIRITE
— Ce qui se passe au sein des immeubles hantes!
Tout est bouleversé', tapages effroyables ;
Les têtes à Venvers; des cris épouvantables...
le néophyte
— Tiens! Mais on dirait La Chambre des députés.
SIFFLET.
PROCÉDÉS PERFECTIONNÉS
Minuit (l’heure des crimes)!
Une chambre d’hôtel plongée dans l’obscurité.
Un ronflement sort de l’alcôve; c’est le ronfle-
ment d’un illustre personnage politique étranger
qui, arrivé à Paris deux heures plus tôt, est des-
cendu incognito dans un quartier excentrique
pour se dérober aux importunités des repor-
ters.
Tout à coup... (ce « tout à coup » indique su-
rabondamment que le drame commence) tout à
coup les carreaux de la fenêtre volent en éclats...
L’illustre personnage est réveillé en sursaut et
ses cheveux se hérissent d’épouvante... Deux
hommes viennent de faire irruption dans la
chambre!. . Avant qu’il ait eu le temps de pous-
ser un cri, il est terrassé, ligotté savamment,
ficelé comme un saucisson.
Ses deux agresseurs, un petit brun et un grand
blond, sont très correctement vêtus ; habit noir,
gardénia à la boutonnière et gants crème.
A la lueur d’une lanterne sourde (Brrr!. .) le
petit brun, qui paraît être le chef, crochète meu-
bles et malles d’une main expérimentée, boule-
versant linge et papiers, puis revient vers le
lit...
L’illusire personnage, vert de terreur, croyant
sa dernière heure arrivée, s’empresse de lui ten-
dre son porte - monnaie, en claquant des dents.
Le petit brun, repoussant le porte-monnaie
avec un geste de dignité blessée et se décou-
vrant poliment. — Votre Excellence me per-
mettra-t-elle de lui demander quelle est son opi-
nion relativement à l’évacuation de l’Egypte?
(L'illustre personnage, paralysé par tapeur, ne
répond pas.) Votre Excellence épargnera, j’en
suis sûr, à un homme de mon éducation la dou-
leur d’avoir recours à des extrémités... {Ilexhibe
un revolver. Gestes convulsifs et bredouille-
ments confus de VExcellence.) Gela suffit!...
{Au grand blond qui a tiré de sa poche un
carnet et un crayon.) Ecris... Quel âge a Votre
Excellence? {Silence.) Mets 50, il les paraît bien...
Etes-vous marié?... Oui, il a une alliance au doigt...
Votre femme a-t-elle des amants?... Sapristi!
Excellence, dépêchons... il est plus de minuit et
demi... A-t-elle des amants? {Pas deréponse. Au
grand brun.) Mets qu’elle en a un... c’est bien
le moins.., Maintenant, passons au physique,,.
{Il arrache les couvertures du lit et retourne
sans façon VExcellence comme une côtelette
sur le gril.) Pardon, Excellence... {Dictant.) Du-
rillon au petit doigt du pied gauche. {Auscul-
tant.) Craquements au sommet du poumon... Son
Excellence est phtisique. {Ouvrant la table de
nuit dans laquelle il a flairé un document se-
cret.) Son Excellence a le diabète... As-tu écrit?,..
Ah! j’allais oublier que Son Excellence couche
avec un bonnet de cotoii.
Le grand blond. — En soie noire. Faut-il spé-
cifier?
Le petit brun. — G’est essentiel. Ajoute que
Son Excellence aime la table... Regarde-moi ce
nez rouge I {Rabattant les couvertures, qu'il
borde avec une sollicitude maternelle.) Il nous
reste à prier Votre Excellence d’agréer nos
excuses... Mais, dans notre profession, nous
avons si souvent affaire àdes sujets récalcitrants,
que nous sommes bien forcés d’employer des
procédés... perfectionnés.
L’illustre personnage, commençant à se ras-
surer. — Ah! çà, qui donc êtes-vous?
Le petit brun, saluant gracieusement. —
Huntell, reporter à l’Information instantanée,
l’inventeur de l’interview obligatoire... Monsieur
est mon secrétaire {Récapitulant.) Durillon,
Égypte, etc., ça va faire quatre-vingt dix lignes
de copie... c'est assez... Bonne nuit, Excellence!
{Au grand blond.) Déficèle monsieur et filons,
{Ils sortent par la fenêtre.)
Deux heures du matin. — Au journal.