Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Chatelain, Henri Abraham; Gueudeville, Nicolas [Hrsg.]
Atlas Historique, Ou Nouvelle Introduction A l'Histoire, à la Chronologie & à la Géographie Ancienne & Moderne: Représentée dans de Nouvelles Cartes, Où l'on remarque l'établissement des Etats & empires du Monde, leur durée, leur chûte, & leurs differens Gouvernemens ... (Band 6): Qui comprend l'Afrique & l'Amerique Septentrionale & Meridionale, tant en général qu'en particulier; l'Egypte, la Barbarie, la Nigritie, la Guinée, l'Ethiopie, le Congo, la Cafrerie & le Cap de Bonne Esperance; la Canada ou la Nouvelle France, la Louisiane ou le Mississipi, la Virginie, la Floride, le Mexique, le Perou, le Chili & le Bresil; avec les Iles de Madagascar, les Philippines, les Moluques, les Antilles & l'Ile de Ceylan — Amsterdam, 1732

DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.8774#0216
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
DISSERT ATION

rons, ou une bride de Cheval ; on donnoit six fe-
melles humaines pour une épée. Les Indiens trou-
voient allez leur compte dans ce genre de trafic : ils
le servirent de ces instrumens pour guerroyer con-
tre les Espagnols ; & c'eit ce qu'ils continuèrent
avantageulèment pendant quarante-deux ans, tems
où le Gouverneur Vaidez eut l'adressè de conclure
la paix avec eux.
Le Chili, aiant dans sonvoisinageplusieurs mon-
tagnes qui jettent du feu, ce qu'on nomme Volcans^"
on attribue à cela les horribles tremblemens de ter-
re auxquels ilest sujet. Il y en eut un ri furieux qu'il
renverla des Villes entières & des montagnes; qu'il
arrêta le cours des Rivières ; que la Mer sortantde
ses bords, jetta les Vaisseaux à sec; & que le bruit
de cette furieuse secousse fut entendu à plus de
trois cens lieues de la Côte.
Ces Peuples font grand cas de la force du corps :
& si on en croit un Hi{torien,ils prennent ordinai-
rement pour leur Chef celui qui porte le plus long-
tems un gros .arbre sur les épaules.
Il n'y a point de Pais dans toute l'Amérique qui
approche plus de l'Europe Méridionale, &sur tout
de l'Espagne,quele Chili: situé entre laZoneTor-
ride & le Tropique du Capricorne, on y jouît d'une
agréable & féconde température de climat. Ou-
tre le Vin, le Blé, les Fruits & l'Or , productions
qui, comme on a vu,viennent là en abondance,on
y trouve encore beaucoup de bois de teinture, du
miel & quantité d Autruches. Depuis l'établissement
des Espagnols, les Chèvres y ont û bien multiplié,
que , s'il faut s'en raporter aux Relations , on en
tue plus de cinquante mille tous les ans, pour en
avoir la peau & le suif.
Les Chiliens sont ambitieux , impatiens, hardis,
braves & très-jaloux de la liberté ; de belle taille ; bien
proportionnez, & d'ailleurs d'une sorce athlétique ;
ausli sont-ils durs & infatigables dans la peine & dans
le travail. Ils exercent leurs enfans à la course, à la
chasse & aux armes ; ce qui les aguerrit de bonne
heure.
Comme je ne croi pas qu'on soit fâché de trouver
ici le Chriitianisme des Chiliens, voici ce qu'un ha-
bile Voyageur nous en apprend. Aux environs de la
Conception, peu d'Indiens professent serieusement.
l'Evangile, hors ceux qui sont sous le joug des Es-
pagnols : encore ne sont-ils apparemment Chrétiens
quedenom,n'aiant aucune connoiss'ance de la Doc-
trine eJTentielle du Culte de l'Homme-Dieu. Ce
qu'il y a de confiant , c'eit. que ces Chrétiens mal
inltruits & ignorans vénèrent les Images jusqu'à l'Ido- (
latrie : sans s'inquiéter de la manière relative ou ab-
solue, ils metamorphosent les saintes sigures en es- ;
pèces de Divinitez mortelles ; & ils font un grand
mérite de leur porter dequoi faire bonne chère,
superltition qui accommode trop les Officiers du
Sanctuaire pour la battre en ruïne. Ces bonnes gens
ne peuvent s'élever au deiTus du senlible ; &la dis- '
tinction , la separation entre le corps & l'ame sur-
palîe absolument leur foible portée. Comme les
Dogmatiseurs le soucient fort peu de prêcher sui-
vant la Foi Romaine, à ces Ouailles grolhéres,que
dans la bcatitude celeste les Saints voyent en Dieu ;
ce qui se palîè ici-bas ; que les prières & les vœux '
qu'on leur adreise, montant juiqu'à leurs oreilles, (
ils se rendent Intercesseurs ; & qu'enfin leurs Ima-
ges ne sont que des signes pour retracer leurs ac- '
rions; iln'est pas étonnant qu'ils leur portent aboi- l
re & à manger, puisque les voyant magnisiquement ! :

habillez, & de plus encensez par les Espagnols, ils
s'imaginent qu'ils ont auliî besoin d'alimens ; & que
la fumée^de l'encens ne suffit pas pour les repaître.
Par la même raison les encensemens du prétendu Sa-
crifice & du Sacrement doivent produire un effet
semblable chez ces Convertis ,qui ont trop de bon-
sens pour le Catholicisme.
Les Indiens de la Frontière , sur tout le long de
îa Côte , seroient assez faciles à chriltianiser sans
deux obstacles, la pluralité des femmes, & l'excès
de boisson. Quelques-uns même se lahTent batiser :
mais ils ne sauroient se vaincre sur la Polygamie &
sur l'Ivrognerie. Houvansales Montero visitant son
Diocèse en i712-. plus de quatre cens Indiens,per-
suadez que le motif de cette vilite-là étoit de rédui-
re leurs mariages à l'unité séminine, s'attroupèrent ;
& ils attendoient au delà du Biobio, -le Prélat pour
FalTassiner. Ce fut au Seigneur Evêque à éteindre
bien vite le feu de son zèle Apostolique : sa Gran-
deur Pastorale déclara à ces brebis rebelles , qu'il
ne prétendait les violenter en rien ; & cette timi-
dité , qui n'étoit ni édifiante, ni d'un homme qui eût
du goût pour le martire, le tira d'asfaire.
A proprement parler , les Chiliens Originaires
n'ont point de Religion. Un Jemite de bonne foi,
(c'eit un oiseau bien rare ! ) Procureur des Millions
que le Roi d'Espagne entretient en ce Païs-là , as-
sura notre Voyageur , que ces Peuples étoient de
vrais Athées;qu'ils n'avoient nul objet d'adoration;
& qu'ils tournaient en plailanterie le Catéchisme,
& les Trêchemens des Apôtres Tricornus. Cela s'ac-
corde bien mal avec les Lettres de ces Reverens,
qui, par une pieuse imposture , écrivent en Euro-
pe, qu'ils font au Chili de grands & féconds ex-
ploits dans la milice Millionnaire.
Ce qui prouve l'irréligion des Chiliens, c'eit qu'on
n'a jamais trouvé chez eux ni Temple, ni Idole, ni
aucun signe senuble de Culte &c de Religion. Ce
ne fut pas la même chose ailleurs : dans le Pérou,
par exemple,où on voit encore aujourd'hui les tra-
ces du Paganisme ; & sur tout le superbe & riche
Temple du Soleil à Cuzco. Si les Chiliens ont quel-
que apparence de sortilege , ce n'eft que pour le
poison ; car ils sont grands Sorciers de ce côté-là. Ce
qui eit plaisant dans le genre contradictoire, c'eit
que, nonobstant l'Atheïsme, & quoi qu'ils ne croyent
point d'ame immortelle , ils ne lahTent point de
croire une autre vie : autrement ils ne seroient pas
si soigneux de fournir aux morts dans la sepulture
tous les besoins des \ivans. Les Curez Espagnols, loin
de s'opposer à cet usage superstitieux , le tolèrent
volontiers chez leurs paroishens originaires ; ils sup-
pléent de bon cœur au peu d'appétit des défunts en-
terrez ; ils ont la charité de s'habiller pour eux ; & ce
n'est pas le moindre endroit du Casuel Curial.
Chez les Chiliens qui ont rejetté le Batême , les
Femmes passent quelque tems sur le sepulchre de
leurs Epoux, à leur faire la cuiline ; à lesarroser, au
lieu d'eau bénite, d'une boiiîbn nommée Chica ; &
à préparer le bagage ; & cela dans la ferme perlua-
sion que le mort sera très-longtems en chemin.
Il ne saut pas croire pour cela , que ces Peuples
ayent la moindre idée d'un Etre qui ne soit point
matériel: ils regardent l'ame comme quelque chose
de corporel, qui, après avoir traversé toutes les
Mers,arrive en des endroits voluptueux & enchan-
tez. Là les Hommes regorgeront de viandes & de
boissons ; ils goûteront un plaisir vénérien qui ne se-
ra sujet ni à la génération,ni à l'épuisement. Leurs
fem-
 
Annotationen