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CONSEILS DE V1EN

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leurs précieuses qualités, la chaleur, le mouvement. « N’allez pas faire à Rome comme tant
d'autres, tâchez de ne pas vous y couler, rappelez-vous sans cesse votre charmante compo-
sition de Sénèque, » lui disait un graveur, et il répondait. « L’antique ne me séduira pas, il
manque d’entrain et ne remue pas. »
Son prix conservé aujourd’hui à l’École des Beaux-Arts nous montre en effet combien
il était éloigné de la simplicité des anciens, mais il y fait encore preuve d’une habileté dont
plus tard il aura bien de la peine à se défaire.
En même temps que son élève était couronné, Vien était nommé Directeur de l’Aca-
démie de France à Rome. M. D’Angiviller avait beaucoup tenu à cette nomination en vue
des réformes qu’il voulait apporter à l’École de Rome, où le désordre et l’indiscipline
s’étaient introduits pendant l’administration de Natoire qui dirigeait l’école depuis vingt-
cinq ans et auquel l’âge et la maladie enlevaient l’énergie nécessaire pour contenir d’une
main ferme tant d’éléments divers.

Hallé avait été envoyé en mission extraordinaire pour porter un premier remède
aux plus violents abus ; mais comme il ne pouvait accepter ce poste pour un temps conve-
nable, on pensa à Vien comme l’artiste dans les meilleures conditions par sa qualité
d’ancien pensionnaire de l’Académie et de professeur d’un nombreux atelier, pour ramener
le travail et le calme parmi les élèves. Pour l’encourager dans la tâche qu’il allait entre-
prendre, le Roi lui conféra avant son départ l’ordre de Saint-Michel, et pour les six années
de sa direction un traitement annuel de 6,000 livres avec les honneurs et les prérogatives
attachés à cette charge.
Vien proposa alors à David de l’emmener avec lui.
Celui-ci, qui venait de recevoir de M. D’Angiviller une gratification de 300 francs,
soit pour le reliquat du prix Caylus, soit pour ses frais de route, accepta avec empres-
sement, car c’était une bonne fortune de faire ce voyage avec un artiste qui avait déjà vu
l’Italie et su apprécier tous les trésors que cet admirable pays offre aux amis de la nature
et de l’art.

Vien prit congé de l’Académie le 30 septembre 177S. La petite compagnie, composée de
Vien, de sa femme, de David et de deux autres pensionnaires, partit le 2 octobre, mais ne
suivit pas la route la plus directe pour gagner Rome ; elle se détourna pour visiter Parme,
où David, en présence des peintures du Gorrège, ne put retenir son admiration. Vien tout
en applaudissant à l’ardeur de son élève lui dit : « Réservez votre enthousiasme pour Rome;
là vous comparerez et pourrez prononcer et choisir. »
Mais la vue de ces chefs-d’œuvre avait ébranlé la confiance de David en la supériorité
de l’École française ; à Bologne, où il croqua rapidement quelques tableaux du Guide et
du Gavedone, il commença à sentir sa propre infériorité ; à Florence, il n’en doutait
plus, et à Rome il se trouva presque honteux de son ignorance.
Tous les doutes qui assaillaient son esprit n’échappèrent pas à la bienveillance éclairée
de Vien. S’étant rencontré lui-même dans une situation pareille, il connaissait le remède
pour en sortir. Il savait quelle force et quelle sûreté de goût on puise à l’étude simultanée
des maîtres et de la nature, et combien les uns vous aident à voir et à juger les mérites
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