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ÉGLISES ROMANES DES VOSGES
mencement du XIXe siècle, alors que de notables parties de cet édifice étaient encore debout,
nous présentent celui-ci comme voûté sur croisée d’ogives ; mais nous verrons aussi, d’une
façon irréfutable, que ces voûtes avaient été construites après coup, à une époque que nous
ignorons, mais certainement assez avancée, sur une église qui en était primitivement dé-
pourvue.
L’abbaye de Sainte-Marie-aux-Bois (M.-et-M.) \ ordre de Prémontré, a été fondée en 1126 1 2,
dans un lieu solitaire, par Simon Ier, duc de Lorraine, à la suite d’une visite que saint
Norbert lui avait faite dans son château de Prény. Cette abbaye conserve encore presque in-
tacts, quoique livrés à peu près entièrement à des usages vulgaires, son église, sa salle capitu-
laire et son réfectoire, avec des restes de son cloître, le tout évidemment élevé d’un seul jet.
11 y a des voûtes sur croisées d’ogives, mais par la beauté de leur construction, par le style
très avancé de leur ornementation, par la perfection de leur sculpture, ces bâtiments ne peuvent
pas être considérés comme antérieurs à la seconde moitié du XIIe siècle. Si discrètement dis-
pensée quelle soit, il semble au surplus que la belle sculpture ornementale de celte église au-
rait paru à saint Norbert encore trop somptueuse pour ses religieux.
Le titre primordial de l’abbaye de Droiteval, émanant d’Henry de Lorraine, évêque de Toul
(1126-1165), doit dater, comme nous le verrons, des environs de 1140. Mais nous ne savons
si leglise qui en subsiste a été construite un peu avant ou un peu après celte date. Son tran-
sept, qui est voûté en berceau, a sa croisée couverte d’une voûte d’ogives.
Une des plus anciennes croisées d’ogives de la région, sinon la plus ancienne, paraît être,
comme nous l’avons vu, celle qui couvre la carré du transept de l’église de Champ-le-Duc.
Bien que soigneusement construite, cette église conserve encore dans son ornementation
quelque chose de rude et d’archaïque. Nous n’avons malheureusement aucune donnée sur
l’époque de sa construction, ni aucun point de comparaison permettant de la déterminer
approximativement.
Il n’est pas sans intérêt de remarquer que les ogives de Droiteval retombent déjà, quoique
d’une façon encore un peu gauche, en s’amincissant entre les arcs doubleaux, suivant la mode
du pays ($ig. 139, 140} ; tandis qu’au contraire le maître de l’œuvre de leglise de Champ-le-
Duc ne semble pas avoir très bien su comment arrêter les siennes, et il l’a fait assez maladroi-
tement ($ig. 5, 114, 115).
Les croisées d’ogives de Champ-le-Duc et de Droiteval pourraient donc passer pour les plus
anciennes subsistant dans la région.
Il résulterait de là que la croisée d’ogives, qui, suivant MM. Dehio et von Bezold, ne sem-
ble pas s’être répandue en Allemagne avant les dix dernières années du XIIe siècle3, mais qui
était déjà usitée en Alsace vers 1160 4, se serait implantée en Lorraine dès avant cette date,
et qu’elle y aurait eu tout de suite un grand succès.
En constatant l’antiquité de la croisée d’ogives en Alsace, et en s’aidant d’inductions assez
ingénieuses, M. Dehio a conclu qu’elle était' venue à cette province plutôt de la Lombar-
1. V. Digot et Châtelain, L'abbaye de Sainte-Marie-aux-Bois, dans Bull, de la Soc. d’archéol. lorr., t. VIII, 1857, p.
315, pl. — Henri Poulet, Vieilles abbayes de Lorraine, Sainte-Marie-au-Bois, dans Revue lorraine illustrée, 7e année,
1912, p. 73.
2. Cette date, sur laquelle les auteurs n’étaient pas d’accord, a été naguère précisée par M. E. Duvernoy, Le duc de
Lorr. Mathieu Ier, p. 79.
3. Die Kirchl. Bauk. des Abendl., t. I, p. 481.
4. Notamment Rosheim, Sainte-Foy de Schlesladt. V. Dehio und von Bezold, op. cil., t. I, p. 4(57.
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mencement du XIXe siècle, alors que de notables parties de cet édifice étaient encore debout,
nous présentent celui-ci comme voûté sur croisée d’ogives ; mais nous verrons aussi, d’une
façon irréfutable, que ces voûtes avaient été construites après coup, à une époque que nous
ignorons, mais certainement assez avancée, sur une église qui en était primitivement dé-
pourvue.
L’abbaye de Sainte-Marie-aux-Bois (M.-et-M.) \ ordre de Prémontré, a été fondée en 1126 1 2,
dans un lieu solitaire, par Simon Ier, duc de Lorraine, à la suite d’une visite que saint
Norbert lui avait faite dans son château de Prény. Cette abbaye conserve encore presque in-
tacts, quoique livrés à peu près entièrement à des usages vulgaires, son église, sa salle capitu-
laire et son réfectoire, avec des restes de son cloître, le tout évidemment élevé d’un seul jet.
11 y a des voûtes sur croisées d’ogives, mais par la beauté de leur construction, par le style
très avancé de leur ornementation, par la perfection de leur sculpture, ces bâtiments ne peuvent
pas être considérés comme antérieurs à la seconde moitié du XIIe siècle. Si discrètement dis-
pensée quelle soit, il semble au surplus que la belle sculpture ornementale de celte église au-
rait paru à saint Norbert encore trop somptueuse pour ses religieux.
Le titre primordial de l’abbaye de Droiteval, émanant d’Henry de Lorraine, évêque de Toul
(1126-1165), doit dater, comme nous le verrons, des environs de 1140. Mais nous ne savons
si leglise qui en subsiste a été construite un peu avant ou un peu après celte date. Son tran-
sept, qui est voûté en berceau, a sa croisée couverte d’une voûte d’ogives.
Une des plus anciennes croisées d’ogives de la région, sinon la plus ancienne, paraît être,
comme nous l’avons vu, celle qui couvre la carré du transept de l’église de Champ-le-Duc.
Bien que soigneusement construite, cette église conserve encore dans son ornementation
quelque chose de rude et d’archaïque. Nous n’avons malheureusement aucune donnée sur
l’époque de sa construction, ni aucun point de comparaison permettant de la déterminer
approximativement.
Il n’est pas sans intérêt de remarquer que les ogives de Droiteval retombent déjà, quoique
d’une façon encore un peu gauche, en s’amincissant entre les arcs doubleaux, suivant la mode
du pays ($ig. 139, 140} ; tandis qu’au contraire le maître de l’œuvre de leglise de Champ-le-
Duc ne semble pas avoir très bien su comment arrêter les siennes, et il l’a fait assez maladroi-
tement ($ig. 5, 114, 115).
Les croisées d’ogives de Champ-le-Duc et de Droiteval pourraient donc passer pour les plus
anciennes subsistant dans la région.
Il résulterait de là que la croisée d’ogives, qui, suivant MM. Dehio et von Bezold, ne sem-
ble pas s’être répandue en Allemagne avant les dix dernières années du XIIe siècle3, mais qui
était déjà usitée en Alsace vers 1160 4, se serait implantée en Lorraine dès avant cette date,
et qu’elle y aurait eu tout de suite un grand succès.
En constatant l’antiquité de la croisée d’ogives en Alsace, et en s’aidant d’inductions assez
ingénieuses, M. Dehio a conclu qu’elle était' venue à cette province plutôt de la Lombar-
1. V. Digot et Châtelain, L'abbaye de Sainte-Marie-aux-Bois, dans Bull, de la Soc. d’archéol. lorr., t. VIII, 1857, p.
315, pl. — Henri Poulet, Vieilles abbayes de Lorraine, Sainte-Marie-au-Bois, dans Revue lorraine illustrée, 7e année,
1912, p. 73.
2. Cette date, sur laquelle les auteurs n’étaient pas d’accord, a été naguère précisée par M. E. Duvernoy, Le duc de
Lorr. Mathieu Ier, p. 79.
3. Die Kirchl. Bauk. des Abendl., t. I, p. 481.
4. Notamment Rosheim, Sainte-Foy de Schlesladt. V. Dehio und von Bezold, op. cil., t. I, p. 4(57.