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ÉGLISES ROMANES DES VOSGES
Ce type de clocher simplifié a eu un très grand succès en Lorraine, où il a persisté jusqu’aux
temps modernes, et il est très diflcile, souvent même impossible de dater, même approximative-
ment, les innombrables spécimens qui en subsistent dans tout le pays. Il y en avait encore bien
plus autrefois. On peut dire que c’est le type classique du clocher lorrain1. Tous ces clochers
sont l’œuvre de maçons de campagne, et le semblant de décoration que ceux-ci ont parfois pu y
mettre, est généralement dénué de style. Beaucoup, qui devaient originairement remonter à
l'époque romane ont subi par la suite des remaniements qui les ont transformés.
Ce qui augmente encore la difficulté de les dater, c’est que le plein cintre y a été presque tou-
jours conservé ; l’arc brisé s’y montre très rarement2. Quelquefois, surtout aux époques les plus
modernes, au XVIIe ou au XVIIIe siècle, on a même fait de simples ouvertures en plein cintre,
percées à cru dans le mur, sans tympan.
En général, ces sortes de clochers construits après l’époque romane, ou du moins après le
XIII0 siècle, ne sont plus placés sur le chœur, mais le plus souvent sur la façade occiden-
tale, avec une porte.
Certains cependant révèlent leur âge peu avancé par des signes infaillibles. Ainsi le reinplage
des ouïes en cintre brisé du clocher de Serécourt (V.) ne semble pas antérieur à la fin du XIIIe
siècle ou même au XIVe ; on peut en dire autant de la façade et du clocher de l’église de Marey
(V.) ; le clocher de Notre-Dame de Mirecourt n’est pas antérieur à 1303 3 ; la mouluration et la
porte de celui de Dignonville (V.) appartiennent certainement au gothique flamboyant ; de même
le clocher de Saint-Julien date certainement, comme l’église elle-même, des environs de 1500 ;
les clochers d’Adompt, de Dommartin-lès-Remiremont (V.) ne sont pas non plus antérieurs au
XVIe siècle ; l’église Saint-Privat ou du petit ban, à Vittel (V.), y compris son clocher couvert
en bâtière, date tout entière du XVIe siècle avancé. Le clocher de la petite église aujourd’hui
abandonnée de Hardoncourt (V.), ne peut être incontestablement, comme la totalité de celle-ci.
antérieur au XVIIIe siècle. Il représente même un des derniers rejetons du type. On pourrait
multiplier les exemples.
CONCLUSION.
En résumé, comme nous le disions en commençant, l’architecture romane de la Lorraine se
rattache par ses origines à l’architecture carolingienne. Au XL siècle, elle évolue encore dans
l’orbite lombardo-germanique. Dès la fin du même siècle, les maîtres-maçons lorrains, déplus
en plus habiles, commencent à voler de leurs propres ailes, tout en conservant certaines tradi-
tions, mais en les développant à leur manière, et, vers le milieu du XIIe siècle, ils furent en
possession d’un style bien homogène et bien à eux. Ils sont restés généralement fidèles au plan
carré ; ils ont pratiqué l’alternance des piliers et des colonnes, les fenêtres accouplées ; ils ont
conservé le chapiteau cubique, et, jusqu’à un certain point, le plein cintre ; ils ont encore sculp-
1. Callot l’a reproduit fréquemment dans ses gravures, et très souvent avec le toit en bâtière.
2. On le voit cependant à Serécourt (V.) ; à Thelod (M.-et-M.).
3. V. André Philippe, L’Eglise Saint-Maurice d'Epinal, dans Les Marches de l'Est, année 1909-1910.
ÉGLISES ROMANES DES VOSGES
Ce type de clocher simplifié a eu un très grand succès en Lorraine, où il a persisté jusqu’aux
temps modernes, et il est très diflcile, souvent même impossible de dater, même approximative-
ment, les innombrables spécimens qui en subsistent dans tout le pays. Il y en avait encore bien
plus autrefois. On peut dire que c’est le type classique du clocher lorrain1. Tous ces clochers
sont l’œuvre de maçons de campagne, et le semblant de décoration que ceux-ci ont parfois pu y
mettre, est généralement dénué de style. Beaucoup, qui devaient originairement remonter à
l'époque romane ont subi par la suite des remaniements qui les ont transformés.
Ce qui augmente encore la difficulté de les dater, c’est que le plein cintre y a été presque tou-
jours conservé ; l’arc brisé s’y montre très rarement2. Quelquefois, surtout aux époques les plus
modernes, au XVIIe ou au XVIIIe siècle, on a même fait de simples ouvertures en plein cintre,
percées à cru dans le mur, sans tympan.
En général, ces sortes de clochers construits après l’époque romane, ou du moins après le
XIII0 siècle, ne sont plus placés sur le chœur, mais le plus souvent sur la façade occiden-
tale, avec une porte.
Certains cependant révèlent leur âge peu avancé par des signes infaillibles. Ainsi le reinplage
des ouïes en cintre brisé du clocher de Serécourt (V.) ne semble pas antérieur à la fin du XIIIe
siècle ou même au XIVe ; on peut en dire autant de la façade et du clocher de l’église de Marey
(V.) ; le clocher de Notre-Dame de Mirecourt n’est pas antérieur à 1303 3 ; la mouluration et la
porte de celui de Dignonville (V.) appartiennent certainement au gothique flamboyant ; de même
le clocher de Saint-Julien date certainement, comme l’église elle-même, des environs de 1500 ;
les clochers d’Adompt, de Dommartin-lès-Remiremont (V.) ne sont pas non plus antérieurs au
XVIe siècle ; l’église Saint-Privat ou du petit ban, à Vittel (V.), y compris son clocher couvert
en bâtière, date tout entière du XVIe siècle avancé. Le clocher de la petite église aujourd’hui
abandonnée de Hardoncourt (V.), ne peut être incontestablement, comme la totalité de celle-ci.
antérieur au XVIIIe siècle. Il représente même un des derniers rejetons du type. On pourrait
multiplier les exemples.
CONCLUSION.
En résumé, comme nous le disions en commençant, l’architecture romane de la Lorraine se
rattache par ses origines à l’architecture carolingienne. Au XL siècle, elle évolue encore dans
l’orbite lombardo-germanique. Dès la fin du même siècle, les maîtres-maçons lorrains, déplus
en plus habiles, commencent à voler de leurs propres ailes, tout en conservant certaines tradi-
tions, mais en les développant à leur manière, et, vers le milieu du XIIe siècle, ils furent en
possession d’un style bien homogène et bien à eux. Ils sont restés généralement fidèles au plan
carré ; ils ont pratiqué l’alternance des piliers et des colonnes, les fenêtres accouplées ; ils ont
conservé le chapiteau cubique, et, jusqu’à un certain point, le plein cintre ; ils ont encore sculp-
1. Callot l’a reproduit fréquemment dans ses gravures, et très souvent avec le toit en bâtière.
2. On le voit cependant à Serécourt (V.) ; à Thelod (M.-et-M.).
3. V. André Philippe, L’Eglise Saint-Maurice d'Epinal, dans Les Marches de l'Est, année 1909-1910.