L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré (10.1877)

29 Juillet 1877.

L'ÉCLIPSÉ, REVUE COMIQUE ILLUSTRÉE

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a

—• Pardon, murmure madame, au moment où
monsieur ouvre la porte pour sortir; mais c'est au-
jourd'hui samedi, mon ami, et...

— Et il faut de l'argent. Toujours de l'argent!

Et avant que la femme ait eu le temps de répon-
dre il jette un billet de cent francs sur la table.

*

* *

SECOND TABLEAU

CHEZ ELLE

M110 Miette est actrice. Elle l'assure et ce qui le
prouve, c'est que tous les papetiers de Paris vendent
sa photographie avec cette souscription : Miette
(des Bouffes).

En réalité, elle ne joue la comédie que dans la vie
privée, mais c'est un genre où elle excelle.

11 est neuf'heures du soir. M1Ie Miette sort de son
boudoir pimpante et parée. Elle se mire tout à l'aise
dans sa petite glace à main, lorsque sa bonne,
qui connaît son service, paraît à la porte du fond, et
dit :

—■ Madame, voilà votre singe.

En effet, il ne tarde pas à paraître, le singe. C'est
monsieur, le même que nous avons vu tout à l'heure
chez lui de si charmante humeur. 11 est méconnais-
sable. Autant il était tout à l'heure hargneux,
autant il s'efforce maintenant de paraître aimable et
souriant.

* *

Il dépose, à son entrée, un vaste bouquet sur un
fauteuil et, descendant à Miette, il lui baise respec-
tueusement la main.

Elle le reçoit avec un geste de reine, et lui dési-
gnant un tabouret :

— Asseyez-vous-là, lui dit-elle, là tout près de moi.
Et monsieur, doux, obéissant comme un petit

agneau blanc, s'assied.

— Et maintenant, dit Miette, faites-moi rire,
amusez-moi.

Et cet homme grave se met alors à débiter une
foule de chatteries croustillantes. Il raconte des
historiettes grivoises avec des allures de gamin et
des intonations de gavroche. Miette rit beaucoup.
Elle appelle monsieur « grand enfant » et, pour le
récompenser de sa joviale humeur, elle lui donne
sur ses favoris noirs de petites tapes amicales.

Il la remercie avec des regards de reconnaissance
et d'amour.

Tout à coup un petit garçon tout rose et tout frisé
fait son entrée, traînant après lui un cheval en bois
éventré et fourbu.

— Je vous présente mon fils Hector, dit alors
Miette en montrant le bambin à monsieur.

■ Et avant que monsieur ait pu présenter ses civili-
tés au fils de la maison, le jeune Hector lui crie
dans les oreilles :

— Monsieur, donne-moi des bonbons.

— Il est charmant, dit monsieur en embrassant
Hector qui fait la grimace ; et tirant de sa poche un
sac de pralines il l'offre à l'enfant.