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porte étrusque modifiée. Rome demande à des ingénieurs d’Étrurie
sa Cloaca Maxima, et c’est l’intestin de la ville, le viscère organique
autour duquel sa matérialité profonde s’installera pour croître peu
à peu et projeter ses bras de pierre sur le monde ancien tout entier.
L’Étrusque, dès le sixième siècle, n’apporte pas seulement à Rome
sa religion et sa science augurale, il creuse les égouts, bâtit les temples,
dresse les premières statues, forge les armes par lesquelles Rome l’as-
servira. Il coule le bronze, et ses bronzes ont une âpre force, tout entière
tendue vers l’expression la plus intransigeante, rugueuse et drue comme
les chênes ramassés de l’Apennin. Le symbole de Rome, la rude louve
du Capitole, est d’un vieux bronzier toscan.

II
Dès ses débuts, Rome est elle-même. Elle détourne à son profit
les sources morales du vieux monde, comme elle détournait les eaux
dans les montagnes pour les amener dans ses murs. Une fois la source
captée, son avidité l’épuise, elle va plus loin pour en capter une autre.
Dès le commencement du troisième siècle l’Étrurie, broyée par Rome,
cimente de son sang, de ses nerfs, avec le sang et les nerfs des Latins,
des Sabins, le bloc où Rome s’appuiera pour se répandre sur la terre,
en cercles concentriques, dans un effort profond. Toutes les résistances
rencontrées, Pyrrhus, Carthage, Hannibal, ne seront pour elle que
des moyens de cultiver sa volonté et de l’accroître. Les légions pro-
gressent comme une alluvion régulière.
Si le positivisme romain n’avait pas comprimé le Latin etl’Étrusque,
on se demande, à lire Plaute, Lucrèce, Virgile, Juvénal, quel art
eût pu réaliser cette rude synthèse des vieux peuples italiques, épris
des bois et des jardins et dont le génie est amer comme ses feuil-
lages, nourri comme ses labours. Mais le Romain fut trop tendu vers
la conquête du dehors pour conquérir tout ce qu’il avait en lui-même
de vigueur et d’âpreté. Tant que dura la guerre méthodique —■ cinq
ou six siècles — il n’eut pas le temps de s’exprimer. Dès que les res-
sorts se détendirent, l’esprit de la Grèce conquise les faussa. Mum-
mius, après le sac de Corinthe, disait aux entrepreneurs chargés de

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