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SÉLINONTE
le feu à la flotte En même temps, Gélon attaquait le camp avec toutes ses forces,
taillait en pièces toute l'armée punique et libérait pour longtemps la Sicile du
péril carthaginois. Ainsi la cavalerie sélinontienne aurait sauvé la Sicile par
procuration! En tout cas, l'histoire ne dit pas que les véritables cavaliers de
Sélinonte se soient présentés sur le champ de bataille. Leur abstention ou leur
retard confirmerait plutôt l'hypothèse d'un stratagème favorable aux Grecs que
celle d'une version forgée après coup, pour blanchir l'honneur de Sélinonte aux
yeux des Hellènes.
Le triomphe de Gélon rallia autour de lui tous les dissidents. Diodore le dit
formellement2 : « Aussitôt ses anciens adversaires, villes et tyrans, lui dépêchèrent
des députés pour solliciter le
pardon de leurs erreurs passées
et l'assurer pour l'avenir de
leur soumission à toutes ses
volontés. » Sélinonte n'est pas
expressément nommée parmi les
cités qui se réconcilièrent alors
avec le maître et libérateur de la Sicile, mais elle dut faire comme les autres. Le
prestige du vainqueur imposait l'oubli des griefs particuliers contre sa politique
syracusaine, griefs que Gélon sut apaiser par sa bonne grâce conciliante'. Mais,
tout en rentrant au giron de l'hellénisme, la prudente cité croyait se ménager
l'avenir en donnant l'hospitalité au fils d'Hamilcar, Giscon, exilé par les Cartha-
ginois après la défaite de son père : il vint finir ses jours à Sélinonte, sans doute
accueilli par le parti le plus favorable à l'entente avec Carthage 4.
DEMi-LiTRA (argent) d Hi.MÈRE (v« s.) [Cabinet des Médailles.]
Avers : Harpie ou Chimère. — Revers : Jeune homme nu
à cheval sur un bouc.
La démocratie à Sélinonte (465). — Carthage vaincue, Ségeste se trouvait
découverte : la haine séculaire de l'Elyméen pouvait désormais à Sélinonte
s'affranchir des sujétions diplomatiques. Les partis durent se quereller à ce sujet.
Le vieux parti aristocratique, composé des anciens propriétaires fonciers et des
armateurs, intéressés au maintien des affaires avec la Libye, devait préconiser la
politique d'entente avec Carthage et de ménagements envers sa protégée Ségeste \
Au contraire, la faction démocratique devait soutenir la politique de la solidarité
1. Diodore, XI, 22, 21. — Autres récits de la bataille et de la mort d'Hamilcar dans Hérodote (VII, 166-167)
et Polyainos (I, 27, 2). La date légendaire de la bataille formait synchronisme soit avec celle des Thermopyles
(juillet 480) d'après Diodore (XI, 24), soit avec celle de Salamine (28 septembre 480) d'après la tradition sicilienne
(Hérodote, VII, 166). L'époque la plus plausible est le mois de juillet ou d'août.
2 Diodore, XI, 26.
3. Diodore, XI, 67.
4. Diodore, XIII, 43.
5. L'existence de ce parti carthaginois est formellement attestée par Diodore (XIII, 581; en 409, le chef de ce
parti s'appelait Empédion. (Voir ci-dessous, p. 114.)
SÉLINONTE
le feu à la flotte En même temps, Gélon attaquait le camp avec toutes ses forces,
taillait en pièces toute l'armée punique et libérait pour longtemps la Sicile du
péril carthaginois. Ainsi la cavalerie sélinontienne aurait sauvé la Sicile par
procuration! En tout cas, l'histoire ne dit pas que les véritables cavaliers de
Sélinonte se soient présentés sur le champ de bataille. Leur abstention ou leur
retard confirmerait plutôt l'hypothèse d'un stratagème favorable aux Grecs que
celle d'une version forgée après coup, pour blanchir l'honneur de Sélinonte aux
yeux des Hellènes.
Le triomphe de Gélon rallia autour de lui tous les dissidents. Diodore le dit
formellement2 : « Aussitôt ses anciens adversaires, villes et tyrans, lui dépêchèrent
des députés pour solliciter le
pardon de leurs erreurs passées
et l'assurer pour l'avenir de
leur soumission à toutes ses
volontés. » Sélinonte n'est pas
expressément nommée parmi les
cités qui se réconcilièrent alors
avec le maître et libérateur de la Sicile, mais elle dut faire comme les autres. Le
prestige du vainqueur imposait l'oubli des griefs particuliers contre sa politique
syracusaine, griefs que Gélon sut apaiser par sa bonne grâce conciliante'. Mais,
tout en rentrant au giron de l'hellénisme, la prudente cité croyait se ménager
l'avenir en donnant l'hospitalité au fils d'Hamilcar, Giscon, exilé par les Cartha-
ginois après la défaite de son père : il vint finir ses jours à Sélinonte, sans doute
accueilli par le parti le plus favorable à l'entente avec Carthage 4.
DEMi-LiTRA (argent) d Hi.MÈRE (v« s.) [Cabinet des Médailles.]
Avers : Harpie ou Chimère. — Revers : Jeune homme nu
à cheval sur un bouc.
La démocratie à Sélinonte (465). — Carthage vaincue, Ségeste se trouvait
découverte : la haine séculaire de l'Elyméen pouvait désormais à Sélinonte
s'affranchir des sujétions diplomatiques. Les partis durent se quereller à ce sujet.
Le vieux parti aristocratique, composé des anciens propriétaires fonciers et des
armateurs, intéressés au maintien des affaires avec la Libye, devait préconiser la
politique d'entente avec Carthage et de ménagements envers sa protégée Ségeste \
Au contraire, la faction démocratique devait soutenir la politique de la solidarité
1. Diodore, XI, 22, 21. — Autres récits de la bataille et de la mort d'Hamilcar dans Hérodote (VII, 166-167)
et Polyainos (I, 27, 2). La date légendaire de la bataille formait synchronisme soit avec celle des Thermopyles
(juillet 480) d'après Diodore (XI, 24), soit avec celle de Salamine (28 septembre 480) d'après la tradition sicilienne
(Hérodote, VII, 166). L'époque la plus plausible est le mois de juillet ou d'août.
2 Diodore, XI, 26.
3. Diodore, XI, 67.
4. Diodore, XIII, 43.
5. L'existence de ce parti carthaginois est formellement attestée par Diodore (XIII, 581; en 409, le chef de ce
parti s'appelait Empédion. (Voir ci-dessous, p. 114.)