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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 23.1881

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Nr. 1
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Mantz, Paul: Rubens, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.22843#0011

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RUBENS.

7

Rubens a entonné avec éclat une chanson qui, bien avant lui, était
dans l'âme flamande ; il a parlé plus haut que les autres et son génie
a eu l'éloquence du clairon qui fait écrouler les murailles. Des choses
excellentes, des choses sacrées ont péri dans la démolition de la vieille
cité: les tendresses du cœur, l'émotion secrète, le drame moral qui
ne fait pas de bruit, ont disparu dans la grande fanfare de Rubens ; car
si le glorieux maître est un progrès, il est aussi une décadence. Il
vient et l'art intime s'efface devant l'art en dehors. Rubens n'a pas l'air
de penser beaucoup. Mais, alors même qu'il ne cherche pas les belles
formes, son inépuisable imagination lui permet une sorte d'accent hé-
roïque, la magnificence des pompes théâtrales, les triomphes du décor.
Et ici sa main vaut son esprit. Rubens a une virtuosité d'exécution qui
ne fut jamais égalée. S'il n'a pas toutes les qualités du coloriste, il en
a quelques-unes, et il a mieux connu que personne ces heureuses mer-
veilles qui s'appellent le ton clair, la note brillante, la palette en fleur.

L'homme est peut être aussi intéressant que l'artiste. Lettré, archéo-
logue, diplomate, il est mêlé aux événements politiques de son temps,
et, toujours affairé, il trouve moyen d'entretenir avec des savants et des
ambassadeurs une correspondance sans repos. Sans quitter le pinceau,
sans négliger son a3uvre, il a le don de s'occuper de plusieurs choses à
la fois. On le voit toujours au travail, toujours en mouvement, toujours
brûlé de la flamme qui ne s'éteint pas.

Ce héros compliqué, qui peut être étudié sous tant d'aspects diffé-
rents, a été l'occasion et le sujet de bien des livres. Lorsqu'on range en
bon ordre les volumes et les brochures que Rubens a inspirés, on se
trouve en présence d'une véritable bibliothèque. Le maître d'Anvers a
été célébré dans toutes les langues, car il n'est personne qui n'ait com-
pris qu'il est— avec Rembrandt à qui il ressemble si peu — un des plus
fidèles réprésentants de l'esprit et du rêve du xvir siècle. Quand tant
de livres excellents ont été consacrés à Rubens, quand, à propos du
quatrième centenaire de sa naissance, tant de savants travaux ont été
mis au jour, il peut paraître outrecuidant, ou pour le moins inutile, de
venir une fois encore parler de lui et disserter sur des choses qui sem-
blent connues. Nous l'essayerons cependant, non que nous ayons eu
l'heureuse fortune de faire sur Rubens quelque découverte imprévue et
d'ajouter une fleur inédite au bouquet déjà cueilli. On le verra : en ce
qui concerne le fait historique, l'acte notarié, la pièce d'archivé, nous
serions pauvre si nous n'avions pas la richesse de nos prédécesseurs;
nous travaillons avec les travaux des autres, comme le modeste ouviier
qui construit un mur en se servant des pierres qu'il n'a point taillées
 
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