DOI Heft:
Nr. 1
DOI Artikel:Courajod, Louis: Obervations sur deux bustes du musée de sculpture de la Renaissance au Louvre
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
de cet objet ; et son protégé, le paladin destitué, ne tarda pas à retomber
dans la disgrâce et le mépris, expiation naturelle de ses premières pré-
tentions.
Il est extrêmement difficile d’établir la provenance de ce buste avant
le moment où on l’aperçoit sur l’inventaire de la Restauration. Il n’a cer-
tainement pas été fourni par le fonds de l’ancien garde-meuble de la
couronne. Il n’apparaît pas sur l’inventaire imprimé de 1791, ni sur les
inventaires manuscrits de 1688, 1729, 1775 et 1788. 11 n’a jamais été
signalé dans les collections royales comme faisant partie des magasins des
Antiques, ni par Sauvai, ni par Piganiol, ni par d’Argenville,nipar Thiéry.
Le costume empêchant qu’il soit regardé comme un personnage de
l’antiquité et qu’il puisse être confondu avec les bustes antiques, il
ne rentre dans aucune des catégories d’objets désignés en bloc, où l’on
pourrait supposer qu’il eût été compris. D’un autre côté, il ne vient pas
des Petits-Augustins et n’a pas figuré, même sous un nom d’emprunt, au
catalogue du Musée des monuments français. Et cependant sa présence
dans les collections nationales au commencement de la Restauration suf-
fit à prouver qu’il y est entré par suite de confiscation révolutionnaire.
Un dépouillement minutieux de tous les documents d’acquisition révolu-
tionnaire ne m’a donné que les résultats suivants. On lit dans un état
daté du 2h messidor an V et intitulé État des objets déposas au Dépôt
national de la rue de Beaune et remis à VAdministration du Muséum
central :
Condé Ch[antilly] — 157 — Un buste de marbre blanc dont le nez cassé,
id. — 10 — Un buste sans piékouche.
id. — 17 — Un buste avec draperies, etc.
C’est bien peu de chose que ce renseignement. Il y a cependant quel-
ques raisons de croire que le buste sans piédouche est la pièce que nous
cherchons. Cette absence de support choquait toutes les idées reçues en
matière d’élégance au moment de la Révolution, et a pu devenir pour un
rédacteur d’inventaire le trait caractéristique d’une œuvre d’art. En 1816,
on a également soin de constater, au milieu de la description du n° 2596,
que ce buste se présente dans des conditions anormales et qu’il est, proh
pudvr ! sans piédouche. C’est en obéissant aux mêmes idées qu’on a
depuis imposé, d’autorité, à cette sculpture la tenue réglementaire et
qu’on l’avait affublée du traditionnel piédouche indispensable à tout
buste qui veut être respecté. Quand on a récemment fait disparaître cet
appendice parasite, la vieille sculpture, en reprenant son aspect primitif
et son aplomb originel, a singulièrement gagné. Tout le monde d’ail-
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
de cet objet ; et son protégé, le paladin destitué, ne tarda pas à retomber
dans la disgrâce et le mépris, expiation naturelle de ses premières pré-
tentions.
Il est extrêmement difficile d’établir la provenance de ce buste avant
le moment où on l’aperçoit sur l’inventaire de la Restauration. Il n’a cer-
tainement pas été fourni par le fonds de l’ancien garde-meuble de la
couronne. Il n’apparaît pas sur l’inventaire imprimé de 1791, ni sur les
inventaires manuscrits de 1688, 1729, 1775 et 1788. 11 n’a jamais été
signalé dans les collections royales comme faisant partie des magasins des
Antiques, ni par Sauvai, ni par Piganiol, ni par d’Argenville,nipar Thiéry.
Le costume empêchant qu’il soit regardé comme un personnage de
l’antiquité et qu’il puisse être confondu avec les bustes antiques, il
ne rentre dans aucune des catégories d’objets désignés en bloc, où l’on
pourrait supposer qu’il eût été compris. D’un autre côté, il ne vient pas
des Petits-Augustins et n’a pas figuré, même sous un nom d’emprunt, au
catalogue du Musée des monuments français. Et cependant sa présence
dans les collections nationales au commencement de la Restauration suf-
fit à prouver qu’il y est entré par suite de confiscation révolutionnaire.
Un dépouillement minutieux de tous les documents d’acquisition révolu-
tionnaire ne m’a donné que les résultats suivants. On lit dans un état
daté du 2h messidor an V et intitulé État des objets déposas au Dépôt
national de la rue de Beaune et remis à VAdministration du Muséum
central :
Condé Ch[antilly] — 157 — Un buste de marbre blanc dont le nez cassé,
id. — 10 — Un buste sans piékouche.
id. — 17 — Un buste avec draperies, etc.
C’est bien peu de chose que ce renseignement. Il y a cependant quel-
ques raisons de croire que le buste sans piédouche est la pièce que nous
cherchons. Cette absence de support choquait toutes les idées reçues en
matière d’élégance au moment de la Révolution, et a pu devenir pour un
rédacteur d’inventaire le trait caractéristique d’une œuvre d’art. En 1816,
on a également soin de constater, au milieu de la description du n° 2596,
que ce buste se présente dans des conditions anormales et qu’il est, proh
pudvr ! sans piédouche. C’est en obéissant aux mêmes idées qu’on a
depuis imposé, d’autorité, à cette sculpture la tenue réglementaire et
qu’on l’avait affublée du traditionnel piédouche indispensable à tout
buste qui veut être respecté. Quand on a récemment fait disparaître cet
appendice parasite, la vieille sculpture, en reprenant son aspect primitif
et son aplomb originel, a singulièrement gagné. Tout le monde d’ail-