DOI Heft:
Nr. 2
DOI Artikel:Laforgue, Jules: Le salon de Berlin
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LE SALON DK BERLIN.
177
courtes manches à jour, le bras droit allongé sur le haut dossier d’un fau-
teuil, l’autre retombant, les doigts écrasant un machinal accord au piano ;
largement brossé, dans une gamme riche mais exsangue et fanée sans
dessous pénibles et pédants, les chairs maladives en harmonie avec le
satin bleu appâli et le reste, des roses pâles d’un délicat effet sur la poi-
trine pâle, et, malgré cet étalage de décor sans sacrifices, il se dégage
du tout une très suggestive impression d’intimité.
Quelques célébrités. De Knaus, qui n’a pas de toile de genre, une
dame en noir assise, bien porcelainée, mais d’une simplicité d’aspect,
d’une particularité de physionomie assez expressives, fond nul. — De l’il-
lustre Richter, qui fut élève de Léon Cogniet, deux portraits de femme :
l’un celui de la comtesse Donhof, de la crème sans accent, remarquable
sous aucun rapport, sans être nul. — De Gussow, qui a les sympathies de
la jeune école et fait de bons élèves, trois portraits finement brossés,
rappelant inférieurement Jacquet, tous trois léchés dans une même crème
sympathique plus fraîche et plus tendre que nature, comme un teint
dont l’artiste tiendrait boutique: tout, excepté de la chair; qu’est-ce que
c’est d’ailleurs que ces fonds froids, cirés comme une botte ou crépis
comme un mur, où les beautés se découpent, glacées et rosées, comme
sur une boîte à savons de prix?—De Antoine de Werner, le pasteur
Frommel, banalement ressemblant peut-être, mais en carton platement
enluminé et noyé d’huile sur un insipide fond chocolat. —Plus, une série
de médaillés d’antan qui, vraiment, n’ont rien d’intéressant.
Gomme talents non encore consacrés : Jacobides, un portrait de
Mmc Gabriel Max, femme de Gabriel Max, peintre d’un talent fort original,
mais qui n’a rien envoyé; Dielitz, Lehmann, Fédor Encke, Bertier.
Point de nu ; l’école française demeure encore la plus victorieusement
fidèle à cet éternel thème à maîtrises; on le sait, et on ne manque pas
de lui en faire une étiquette, non sans pudiques sous-entendus.
, Passons au paysage. A la National-Galerie, comme au Salon et
ailleurs, notre incurable vanité aurait trop beau jeu à de certaines compa-
raisons. Si nous pouvons répondre au grand reproche dont nos voisins
n’ont jamais cessé de nous carctériser, en art comme en tout, — l’habileté
consommée remplaçant la foi profonde, la conviction, l’amour du vrai,
la spontanéité, tout en s’attribuant, eux, ces qualités, de droit divin, —
c’est par cette unique École de grands poètes du Vrai, qui va de
Troyon à Daubigny, et est en train de se renouveler dans une adoration
de plus en plus profonde ou raffinée de notre sol. Cités parfois dans quel-
ques comptes rendus, les noms qui font notre orgueil sont absolument
xxvm. — 2° PÉRIODE.
23
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courtes manches à jour, le bras droit allongé sur le haut dossier d’un fau-
teuil, l’autre retombant, les doigts écrasant un machinal accord au piano ;
largement brossé, dans une gamme riche mais exsangue et fanée sans
dessous pénibles et pédants, les chairs maladives en harmonie avec le
satin bleu appâli et le reste, des roses pâles d’un délicat effet sur la poi-
trine pâle, et, malgré cet étalage de décor sans sacrifices, il se dégage
du tout une très suggestive impression d’intimité.
Quelques célébrités. De Knaus, qui n’a pas de toile de genre, une
dame en noir assise, bien porcelainée, mais d’une simplicité d’aspect,
d’une particularité de physionomie assez expressives, fond nul. — De l’il-
lustre Richter, qui fut élève de Léon Cogniet, deux portraits de femme :
l’un celui de la comtesse Donhof, de la crème sans accent, remarquable
sous aucun rapport, sans être nul. — De Gussow, qui a les sympathies de
la jeune école et fait de bons élèves, trois portraits finement brossés,
rappelant inférieurement Jacquet, tous trois léchés dans une même crème
sympathique plus fraîche et plus tendre que nature, comme un teint
dont l’artiste tiendrait boutique: tout, excepté de la chair; qu’est-ce que
c’est d’ailleurs que ces fonds froids, cirés comme une botte ou crépis
comme un mur, où les beautés se découpent, glacées et rosées, comme
sur une boîte à savons de prix?—De Antoine de Werner, le pasteur
Frommel, banalement ressemblant peut-être, mais en carton platement
enluminé et noyé d’huile sur un insipide fond chocolat. —Plus, une série
de médaillés d’antan qui, vraiment, n’ont rien d’intéressant.
Gomme talents non encore consacrés : Jacobides, un portrait de
Mmc Gabriel Max, femme de Gabriel Max, peintre d’un talent fort original,
mais qui n’a rien envoyé; Dielitz, Lehmann, Fédor Encke, Bertier.
Point de nu ; l’école française demeure encore la plus victorieusement
fidèle à cet éternel thème à maîtrises; on le sait, et on ne manque pas
de lui en faire une étiquette, non sans pudiques sous-entendus.
, Passons au paysage. A la National-Galerie, comme au Salon et
ailleurs, notre incurable vanité aurait trop beau jeu à de certaines compa-
raisons. Si nous pouvons répondre au grand reproche dont nos voisins
n’ont jamais cessé de nous carctériser, en art comme en tout, — l’habileté
consommée remplaçant la foi profonde, la conviction, l’amour du vrai,
la spontanéité, tout en s’attribuant, eux, ces qualités, de droit divin, —
c’est par cette unique École de grands poètes du Vrai, qui va de
Troyon à Daubigny, et est en train de se renouveler dans une adoration
de plus en plus profonde ou raffinée de notre sol. Cités parfois dans quel-
ques comptes rendus, les noms qui font notre orgueil sont absolument
xxvm. — 2° PÉRIODE.
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