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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 35.1887

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Nr. 1
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Michel, André: Le Musée de Brunswick, 3
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https://doi.org/10.11588/diglit.24189#0021

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LE MUSÉE DE BRUNSWICK.

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des moulins vert d’eau et des rochers bleuâtres. On a dressé de grandes
tables en équerre, couvertes de nappes blanches et de faïences bleues;
au centre est assis, sous un dais de brocart or et lilas, un personnage
à turban jaune, manteau noir et robe bleue, devant lequel les men-
diants défilent avec componction et qui distribue des aumônes. Sur
la place et entre les tables, la pieuse fête prend plutôt des airs de
kermesse; la foule des loqueteux, des infirmes y grouille, — et les
rouges, les jaunes et les bleus des costumes s’enlèvent en taches vives
sur l’herbe foncée du terrain. La couleur est corsée, pas très disci-
plinée; la facture un peu lourde; mais l’œuvre est très importante
et du plus grand intérêt.

On attribue au même maître un autre tableau de la galerie (n° 429),
qui paraît bien, en effet de sa main, mais ne porte pas son mono-
gramme. C’est, dans un champ de blés mûrs piqués de fleurettes
rouges et bleues, un paysan et une femme en qui les Hollandais, de
tout temps très forts en histoire « sainte », reconnaissaient à première
vue Juda et Thamar. La femme est assise ; elle ouvre les bras et
l’homme est debout devant elle ébauchant un geste difficile à rap-
porter... Que va-t-il faire? Ici, l’exégète est fort embarrassé. Si le
lecteur se rappelle l’histoire particulièrement scabreuse de cette
Thamar et comment, après son veuvage, Juda, son brave homme de
beau-père, fut amené à penser qu’il devait à sa bru des compen-
sations nécessaires, il nous dispensera d’insister davantage.

Toujours est-il que notre peintre n’était pas en peine pour si peu
et qu’ayant sans doute beaucoup observé les paysans dans les blés,
l’illustration de certains chapitres de la Bible lui paraissait la chose
la plus simple du monde. Ce qui autorise du reste à penser que Juda
se prépare simplement ici à remplir un devoir, c’est que Thamar
avec son profil camard, ses bas noirs, sa coiffe blanche et son jupon
rouge est d’une laideur accomplie.

Ajoutons, pour en finir avec notre monogrammiste, que le Musée
de Berlin possède une scène d’orgie (n°558) et le Louvre un sacrifice
d’Abraliam (n° 598), qui lui ont été également attribués, mais où l’on
ne retrouve pas son monogramme U

Ce sont là des documents curieux pour l’histoire de l’art; voici un
chef-d’œuvre qui se passe de commentaires ; c’est le Portrait de famille
(n° 124) de Jean van Ravesteyn ; admirable peinture qui supporterait
sans faiblir les voisinages les plus redoutables et qu’on ne se lasse

1. C’est le catalogue de Berlin qui donne à notre monogrammiste le n° 598
du Louvre. Le morceau est assez de sa manière, mais moins corsé.
 
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