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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 35.1887

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Nr. 2
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Durand-Gréville, Émile: Les noveaux documents hollandais sur la "Ronde de Nuit" de Rembrandt
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https://doi.org/10.11588/diglit.24189#0192

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176

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Pourquoi, se demande l’auteur de l’article, la Sortie des arquebusiers s’est-elle
un peu assombrie? Un peu, n’est pas assez dire, à notre avis; mais n’importe.
La Sortie était, avec deux autres toiles de dimensions analogues, suspendue à un
des longs côtés de la salle du Tir des arquebusiers, et elle se trouvait dans le
voisinage d’une cheminée : le feu, alimenté avec de la tourbe, devait produire une
épaisse fumée. En outre, les gardes civiques organisées au xve et au xvie siècle
ayant été transformées en 1672, les trois tirs d’Amsterdam devinrent la propriété de
la ville avec tout ce qu’ils renfermaient, et deux d’entre eux, dont l’un était celui
des arquebusiers, devinrent des lieux de réunion, soit pour les Sociétés de tir, soit
pour des meetings politiques ; elles servirent même d’estaminets, et l’on y venait
prendre une pinte de vin et fumer la pipe en regardant les peintures. Tout cela
explique fort bien comment Van Dijk trouva le tableau tout « goudronné » et
comment il eut quelque mérite à découvrir que Rembrandt « avait voulu y exprimer
une forte lumière de soleil ».

Passons sur l’histoire de ce nettoyage de 1758 et sur la réapparition de l’écusson
où étaient inscrits les noms des personnages représentés et demandons-nous
à quelle époque la Sortie des arquebusiers fut transportée à l’Hôtel de Ville.
M. Meyer penche pour une date postérieure à 1748; il se base sur une gravure de
Fokke qui représente la salle du Tir avec ce tableau sur le mur, mais il doute lui-
même de l’importance de ce document, et selon nous avec raison. Il nous apprend
d’ailleurs dans le Nederlandsche Spectator, n° 43, que, dès le 5 décembre 1682, le
conseil des prud’hommes avait donné l’ordre de transporter à l’Hôtel de Ville les
tableaux des salles civiques. Reste à savoir à quelle époque ou à quelles époques
l’ordre fut exécuté. En ce qui concerne la Sortie, Vosmaer penche pour les pre-
mières années du xvme siècle, au plus tard, et cela paraît probable.

Faut-il admettre que la magistrale misé en scène de la Ronde de nuit soit sortie
tout entière du cerveau de Rembrandt? Pour notre part, nous avions toujours
supposé que le maître avait vu non pas seulement avec les yeux de l’esprit, mais
avec ceux du corps, cette vaste cour, ce pont, cette rampe en fer au bord d’un
quai, ce large perron, cette façade monumentale, cette grande porte cintrée d’où
la foule s’échappe dans un pittoresque tohu-bohu; nous avions toujours été persuadé
que l’effort de son génie avait uniquement consisté — et c’est bien assez — à
choisir l’éclairage le plus favorable, à saisir sur le vif les attitudes de ses modèles,
à soumettre aux lois de l’eurythmie le chaos d'une foule grouillante. Mais M. Meyer
n’est pas de cet avis. Il écrit, p, 201 :

« Les arquebusiers sortent d’une porte, de laquelle? Inutile de chercher. La
porte des Réguliers, la seule à laquelle on aurait pu songer pour ce quartier, n’a
rien de commun avec celle du tableau. Mais Rembrandt, pour sa composition,
afin de rendre visibles d’une façon naturelle les groupes de derrière au-dessus de
ceux du premier plan, avait besoin d’un pont avec un escalier, ce qui n’existait
pas à Amsterdam... Il employa donc une architecture de fantaisie... »

Là-dessus, le critique anonyme du Spectator du 9 octobre dernier vient
apporter un document qui nous avait un instant paru décisif : « ... Wagenaar, dans
sa description (VII, 251) du Kloveniers-Roelen (tir des arquebusiers), dit : On entre
de la Doelenstraat (rue des Tirs) par une grande porte décorée d’arquebuses et
d’autres insignes de l’ancien Klovenier... » Interrompons ici la citation pour rappeler
au lecteur que l’écrit de Wagenaar est de 1765, — d’où l’expression d’ « ancien »
 
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