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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 35.1887

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https://doi.org/10.11588/diglit.24189#0390

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360

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

pays ! Il faut le voir de cet endroit : l’Acropole, le mont Hymette, le Pentélique,
le Parnès, le port de Phalère, et ces lignes nettes et fines de Salamine et d’Égine :
prenez mes yeux de peintre, et vous vous imaginerez facilement les délices de
cette soirée...

« Comme vous le pressentiez, la Grèce au retour a effacé l’Orient, et j’ai vu
Athènes sous un aspect assez bizarre. Les poètes ne parlent que de la pureté du
ciel de l’Attique, du miel de l’Hymette, des cigales et des violettes; rien n’est plus
vrai; mais un vieil homme à la grande barbe, qui s’appelle Hiver, avait étendu
là-dessus un grand manteau gris. J’ai vu les classiques montagnes poudrées à
blanc par une petite gredine de neige, âpre comme le vin des outres de Parnès.
Cela me fît souvenir des crudités d’Aristophane et de ce joli tableau de lui, un
peu trop oublié, du climat athénien. 11 parle des gamins, vous vous souvenez,
dans les Nuées : « Quand ils se rendaient à l'école, tous les adolescents du quartier
marchaient nus et serrés en bon ordre, même quand la neige tombait à gros
flocons. » J’ai été ravi de revoir ce croquis d'après nature; et, bien que le vent
glacé du Nord me cinglât le visage, j’ai fait de longues haltes sur l’Acropole, je
regardais, la gorge un peu serrée, en profonde admiration, ces temples écroulés,
ces statues mutilées des divines cariatides du Pandrosium...

« J’ai revu la chère Italie, après avoir passé entre Itaque, la baie de Navarin,
Corfou et Brindisi. Pompéi, où j’ai tant aquarellé autrefois, m’a semblé un petit
musée de friperie. J’avais encore dans les yeux les splendeurs des marbres du
Pentélique. Ma vieille Rome, que j’aimais tant, m’a paru elle-même un peu misé-
rable avec ses pauvres ruines noires, bouleversées par le commendatore Rosa.
Nous causerons bientôt de tout cela. Je vous dirai mes impressions sur un pays,
inconnu des Français, qui s’appelle la France. Connaissez-vous le Puy-de-Dôme,
les bords du Lignon et la route de Riom à Thiers. C’est merveilleux... »

Dans les derniers mois de sa vie, lorsqu’il est en convalescence à Fontainebleau,
c’est encore au contact de la nature que Baudry sent renaître les chaudes sensa-
tions de sa jeunesse :

« ... Ce matin, j’ai fait une délicieuse promenade aux rochers du mont Ussy,
voilés d’abord par un léger brouillard qui s’est enlevé lentement pour me laisser
voir bientôt un ciel d’un bleu que les Parisiens ne connaissent pas... Je suis capable
de rester encore quinze jours ici, si le ciel m’est toujours clément; puisque je
prends des vacances pour la première fois de ma vie, prenons-en jusque-là. Je
m’imagine que cette coloration automnale va être tout à fait giorgionesque et je
veux voir ça! Je ne l’ai encore vu qu’en peinture... Nous irons dans cette partie de
la forêt remplie de ces arbres gigantesques, dont je commence à connaître les
noms et les histoires particulières. Je me porte admirablement, je sens une vraie
volupté à respirer le matin dans cette divine forêt de Fontainebleau... »

Nous pourrions poursuivre ces citations. Ce que nous avons donné, suffit à indi-
quer le charme captivant de ces lettres que le peintre a semées à profusion pendant
le cours de sa belle carrière et que son biographe a recueillies avec un soin pieux.

LOUIS GONSE.

Le Rédacteur en chef, gérant : LOUIS GONSE.

SCEAUX.

I MP. CHARAIRE ET FILS.
 
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