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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 35.1887

DOI issue:
Nr. 6
DOI article:
Hamel, Maurice: Le Salon de 1887, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24189#0552

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508

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Guidé par l’atmosphère, le regard glisse aux fonds lointains où,
parmi les verts assoupis, luit faiblement la note rouge sombre du
gaard norvégien. Le charme du lieu., de l’heure, la naïveté de cette
promenade en musique, la pâleur délicieuse de la lumière, tout cela
est dit avec une admirable simplicité : c’est un pur chef-d’œuvre.

Le Soleil cle mars à Lépaud n’est pas moins juste d’impression.
Largement, sans insistance, le peintre a noté la clarté blonde du soir
et le bleu délicat dont s’imprègne l’ombre. Cette étude, d’une rare
vigueur, a le plus persuasif accent de vérité.

Dans Un Jour d’été sur la plage de Skagen, M. S. Ivroyer a réalisé
l’impression de la vive lumière étalée sur des surfaces planes. Douce
et chaleureuse, vraie clarté du nord, elle vient du fond, un peu à
droite, allongeant sur nous les ombres des barques mises à sec. Des
bambins nus gambadent dans l'eau et placés à contre-jour dessinent
des silhouettes bleuâtres : la perspective est d’une sûreté absolue.

Cet artiste d’un talent très souple aborde dans Une Soirée musicale,
un problème singulièrement compliqué : exprimer tous les accidents de
la lumière et de l’ombre dans une vaste salle modérément éclairée
par des bougies et des lampes. L’a-t-il pleinement résolu?La tonalité
générale ne s’impose pas au regard ; certains détails laissent un doute ;
le rayonnement des bougies au premier plan n’est-il pas circonscrit
bien sèchement et trop localisé sur les feuillets blancs des partitions ?
Mais l’ombre circule bien dans la pièce, plus dense au faîte et à la
base, éclairée au milieu. Bientôt l’œil y pénètre, y habite, y découvre
des merveilles. De cette transparence obscure les figures des musi-
ciens et des auditeurs surgissent peu à peu, fixées par un merveilleux
physionomiste ; des poses, des regards qui écoutent, l’attitude négligée
d’un fumeur suivant sa rêverie musicale dans le sans-gêne d’une
réunion d’amis, tout au fond, dans un triangle de lumière, des
physionomies évoquées, devinées. Quelle science et quels scrupules
d’artiste ! Tout y est, le point rouge des cigares, le luisant des binocles,
les reflets des cadres et des cuivres, le scintillement prismatique d’un
lustre, les fumées bleuâtres qui montent en spirale, restent suspendues,
et qu’on devine dans l’atmosphère embrumée.

Il faut le reconnaître, il y a là un art de toute conscience et de
toute probité. Le tableau que M. Johansen, intitulé Chez moi, n’est pas
moins remarquable. On entre sans hésiter dans cet intérieur où la
lampe baigne de sa douce lumière six personnages groupés à gauche
autour d’une table, où les deux bougies du piano éclairent plus faible-
ment le coin droit. C’est intime, bien clos, d’un intérêt concentré.
 
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