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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 38.1888

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Nr. 2
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Michel, André: Salon de 1888, 3
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https://doi.org/10.11588/diglit.24192#0166

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SALON DE 1888.

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qui ont dû subir cette nécessité, sur les conditions inévitables de leur
œuvre.
C'est ainsi que le groupe érigé par M. Chapu à la mémoire des
frères Galignani a déconcerté le public. Que vouliez-vous qu'il fit
cependant? Pouvait-il affubler ces braves gens d'une toge romaine ou
les représenter nus comme le AVellington deHyde-Park? Il les a pris
tels qu'ils étaient; il les a posés avec beaucoup d'art dans leur
attitude assurément peu sublime et pas du tout héroïque. L'un est
assis, l'autre debout près de lui ; ils causent ; ils ont l'air heureux
parce qu'ils vont faire une bonne action ; ils ont devant eux les
plans de l'asile qu'ils vont fonder; l'un explique, l'autre écoute.
C'est l'apothéose du notaire bienfaisant. On a sans doute le droit
de préférer la Victoire de Samothrace, mais il faut hardiment et fran-
chement accepter le costume moderne dans la statuaire moderne
quand le sujet l'exige. L'œil du public et la main du sculpteur s'y
feront. On ne doit jamais tricher. Aussi doit-on remercier M. Mercié
comme M. Chapu, de n'avoir pas hésité à représenter le banquier
Zahri, en redingote. Il est assis à l'orientale, sur un divan, un livre
à la main. Il a interrompu sa lecture et il rêve entre deux pages.
Tout ce que fait M. Mercié a un caractère de certitude, de soiidité —
une simplicité virile — une autorité et une carrure que l'on retrou-
vera dans son œuvre nouvelle.
Mais, plus heureux assurément, le sculpteur, quand son pro-
gramme lui permet d'employer sans arrière-pensée le nu et la dra-
perie : c'est là son domaine propre, son grand moyen d'expression
plastique, son inépuisable répertoire. Il y a tant de manières diffé-
rentes d'interpréter la figure humaine! Une jeune hlle,M'^C. Claudel,
a su mettre dans un groupe d'exécution inégale, mais d'inspiration
puissante, un sentiment profond de tendresse chaste et
passionnée, je ne sais quel frémissement et quelle ardeur contenue,
quelle aspiration et quelle plainte étouffée.
Son maître, Rodin, a enfermé dans un admirable buste de femme,
une palpitation de passion et de vie d'une intensité véritablement
troublante.
C'est aussi de la vie, et de la vie frémissante, que M. Falguière
a mis dans sa suivante ou plutôt soubrette de
Diane, qui nous revient en marbre cette fois, et plus belle, semble-
t-il, dans cette dernière incarnation.
Que le lecteur et les sculpteurs nous pardonnent de passer si
rapidement devant de si belles œuvres; mais nous avons déjà épuisé
 
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