CORRESPONDANCE D’ITALIE.
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un lion qui abat un taureau. Une troisième a une grâce délicieuse; de la main
elle tient ouvert le livre qu’elle a cessé de lire pour regarder en riant l’enfant
Jésus qui, debout dans son étroite chemisette, saisit fortement son voile, et lui
montre un oiseau qu’il serre de son petit poing. C’est la conception un peu bour-
geoise et terre à terre de nos petites madones françaises, chez qui la vivacité fami-
lière et gaie remplace la religieuse gravité des madones italiennes. Cette aimable
statuette est posée sur une base hexagonale de métal orné d’émaux, qui a fait partie
d’un reliquaire, comme l’explique la légende f OV. VESEL. Q. GESTE. IMAGE.
TIENT. A. VNE. DENT. ET. DES. 1IOS. LA. BENOITE. MARIE. MAGDALAINE.
Les diptyques d’église sont très intéressants. Le plus fin, très petit, terminé de
fleurons aigus, oppose au Crucifiement du Christ le Couronnement de la Vierge ; un
autre, de grand format, se divise en quatre compartiments qui enferment l’Adora-
tion des Mages, le Crucifiement, le Jugement universel et le Couronnement de la
Vierge. Celui que nous reproduisons, d’un travail très spirituel, est soigneusement
rehaussé de couleurs et de dorures. Dans la zone supérieure sont réunies l’Annon-
ciation, la Visitation et l’Adoration des bergers; dans la zone inférieure la Visite
des Mages à Hérode, l’Adoration des Mages et le Massacre des Innocents. Un retable
français, du xve siècle, groupe des scènes de la vie de la Vierge dans un amusant
paysage qu’il encadre d’une architecture fantaisiste et de l’arbre généalogique du
Christ.
Une des merveilles de la collection, qui mérite également une gravure, c’est
une statuette bourguignonne du xve siècle, une jolie sainte Catherine aux mains
effilées, assise sous un dais ajouré où des anges font de la musique, et foulant aux
pieds le tyran Maxence, qui implore miséricorde.
Parmi les objets du mobilier civil viennent en premier lieu les coffrets. Il y en
a deux du xiv° siècle français, ornés d’histoires prises aux romans de chevalerie, et
de figures de dames et de chevaliers qui devisent amoureusement. Dans un coffret
d’ébène sont encastrées des plaquettes d'ivoire avec des figures de seigneurs et de
bouffons en costume du xve siècle.
La collection compte neuf de ces boîtes à miroir françaises que les dames por-
taient suspendues à la ceinture. Ces gracieux objets sont trop connus pour être
longuement décrits; on y voit l’assaut du château d’amour, où les dames se défen-
dent en jetant des roses, puis la prise du château d’amour, dont les assiégeants sont
tendrement accueillis, puis des tournois à armes courtoises et de galantes chevau-
chées.
Un échiquier, qui porte au revers un jeu de trictrac, occupe une vitrine distincte.
C’est un excellent spécimen de l’art bourguignon du xve siècle. Les bordures sont
ornées de petits bas reliefs qui racontent toute la vie et les amusements des châ-
teaux : tournois, chasses, jeux de toute sorte, danses et festins. Aux quatre angles
sont ménagés des écussons d’où ont été effacées les armes du propriétaire.
L’école de Mantoue a donné un intéressant bas-relief du xve siècle, un triomphe
d'amour, conçu selon la formule habituelle ; Cupidon aux yeux bandés est debout
sur le char à deux chevaux auquel Hercule est enchaîné; des personnages allégo-
riques et des divinités païennes font à ce char une nombreuse escorte.
Après avoir cité une statuette maniérée de David vainqueur de Goliath, et un
Mars allemand du xvie siècle, il est inutile de pousser plus loin; l’habileté trop
ingénieuse des ivoiriers du xvne siècle n’a point laissé de traces dans la collection
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un lion qui abat un taureau. Une troisième a une grâce délicieuse; de la main
elle tient ouvert le livre qu’elle a cessé de lire pour regarder en riant l’enfant
Jésus qui, debout dans son étroite chemisette, saisit fortement son voile, et lui
montre un oiseau qu’il serre de son petit poing. C’est la conception un peu bour-
geoise et terre à terre de nos petites madones françaises, chez qui la vivacité fami-
lière et gaie remplace la religieuse gravité des madones italiennes. Cette aimable
statuette est posée sur une base hexagonale de métal orné d’émaux, qui a fait partie
d’un reliquaire, comme l’explique la légende f OV. VESEL. Q. GESTE. IMAGE.
TIENT. A. VNE. DENT. ET. DES. 1IOS. LA. BENOITE. MARIE. MAGDALAINE.
Les diptyques d’église sont très intéressants. Le plus fin, très petit, terminé de
fleurons aigus, oppose au Crucifiement du Christ le Couronnement de la Vierge ; un
autre, de grand format, se divise en quatre compartiments qui enferment l’Adora-
tion des Mages, le Crucifiement, le Jugement universel et le Couronnement de la
Vierge. Celui que nous reproduisons, d’un travail très spirituel, est soigneusement
rehaussé de couleurs et de dorures. Dans la zone supérieure sont réunies l’Annon-
ciation, la Visitation et l’Adoration des bergers; dans la zone inférieure la Visite
des Mages à Hérode, l’Adoration des Mages et le Massacre des Innocents. Un retable
français, du xve siècle, groupe des scènes de la vie de la Vierge dans un amusant
paysage qu’il encadre d’une architecture fantaisiste et de l’arbre généalogique du
Christ.
Une des merveilles de la collection, qui mérite également une gravure, c’est
une statuette bourguignonne du xve siècle, une jolie sainte Catherine aux mains
effilées, assise sous un dais ajouré où des anges font de la musique, et foulant aux
pieds le tyran Maxence, qui implore miséricorde.
Parmi les objets du mobilier civil viennent en premier lieu les coffrets. Il y en
a deux du xiv° siècle français, ornés d’histoires prises aux romans de chevalerie, et
de figures de dames et de chevaliers qui devisent amoureusement. Dans un coffret
d’ébène sont encastrées des plaquettes d'ivoire avec des figures de seigneurs et de
bouffons en costume du xve siècle.
La collection compte neuf de ces boîtes à miroir françaises que les dames por-
taient suspendues à la ceinture. Ces gracieux objets sont trop connus pour être
longuement décrits; on y voit l’assaut du château d’amour, où les dames se défen-
dent en jetant des roses, puis la prise du château d’amour, dont les assiégeants sont
tendrement accueillis, puis des tournois à armes courtoises et de galantes chevau-
chées.
Un échiquier, qui porte au revers un jeu de trictrac, occupe une vitrine distincte.
C’est un excellent spécimen de l’art bourguignon du xve siècle. Les bordures sont
ornées de petits bas reliefs qui racontent toute la vie et les amusements des châ-
teaux : tournois, chasses, jeux de toute sorte, danses et festins. Aux quatre angles
sont ménagés des écussons d’où ont été effacées les armes du propriétaire.
L’école de Mantoue a donné un intéressant bas-relief du xve siècle, un triomphe
d'amour, conçu selon la formule habituelle ; Cupidon aux yeux bandés est debout
sur le char à deux chevaux auquel Hercule est enchaîné; des personnages allégo-
riques et des divinités païennes font à ce char une nombreuse escorte.
Après avoir cité une statuette maniérée de David vainqueur de Goliath, et un
Mars allemand du xvie siècle, il est inutile de pousser plus loin; l’habileté trop
ingénieuse des ivoiriers du xvne siècle n’a point laissé de traces dans la collection