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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 5.1922

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Nr. 1
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Clemenceau, Thérèse: Un regard sur la mode (1919 - 1921)
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https://doi.org/10.11588/diglit.24938#0076

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UN REGARD SUR LA MODE

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si gênante que soit cette sorte de gaine, on la rend tout à fait odieuse en l’agré-
mentant de talons hauts de dix centimètres. Mais quelle femme ne sait cacher son
supplice sous un sourire, du moment qu’elle est certaine d’être à la mode?

Armées sans doute des mêmes ciseaux qui ont raccourci leurs jupes, quelques
femmes ont décidé tout net la suppression de leurs chevelures: « Adieu, mes
longs cheveux dont parfois j’étais si fière, vous ne m’embellissez plus, et vous me
vieillissez ! » Cinq minutes de réflexion, cinq minutes d’exécution, et une petite
tête, toute bouclée, surgit rieuse et
satisfaite. Elle reste jolie, naturelle-
ment, cette petite tête; mais qu’est
devenue sa personnalité ? qu’est devenu
son charme ? Avoir une amusante fri-
mousse et quinze ans, c’est gentil, mais
être parvenue à la quarantaine et s’être
laissé imposer par son coifleur une
mode absurde, c’est bête à pleurer.

Pourquoi faut-il hélas ! que ce soit à
l’âge dit de raison que l’on commette
le plus de folies? Tout de même le bon
sens a réagi ; les cheveux repoussent.

Le couturier, ayant jugé inutile de
torturer sa cliente quand elle est bien
faite, décide la suppression du corset
devenu trop rigide et crée la « cein-
ture » qui laisse le corps souple, ondu-
leux, tout en maintenant les formes
féminines. On habille la jolie dame de
la robe dite « chemise » ; c’est la ligne
droite. Un mince ruban indique la
taille. Chaque geste souligne la grâce
du mouvement.

Voilà qui est délicieux pour la femme
parfaite. Ai-je besoin d’ajouter que
celles qui ne l’étaient pas ont voulu se
vêtir de même? « Dites moi, petite
personne toute rondelette qui passez devant les glaces du boulevard, regardez votre
silhouette. Qu’en pensez-vous? » « Je pense que je suis à la mode ». Ah ! la mode...
la mode..., cette hantise de la Parisienne !

Toujours dans la pensée de donner plus de liberté au corps, les cols disparaissent,
les manches s’écourtent, plus de poignets serrant les bras. Les agréments qui avaient
été supprimés se montrent à nouveau : voici les franges, grandes sur les jupes,
petites aux corsages, les broderies, les damas, les dentelles d’or et d’argent. Tout
cela fait d’abord une apparition fugitive, qui bientôt se fixera.

DANSER, PAR

(1920)

■TEA.NNE L A N V I N
 
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