GAZETTE DES BEAUX-ARTS
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gorgent, se pavanent, font la roue, baissent et relèvent la tête en roucoulant
des modulations amoureuses, surprenants de blancheur et de vie. C’est
encore en Italie, sans doute à Venise, qu’il conçut cette œuvre.
Ses planches faites de croquis pris sur le vif l’emportent sur celles comjaosées
à la manière de tableaux, et donnent la meilleure idée de son talent. Quant
à sa fantaisie, à cette ironie légère qui séduisait dans sa conversation, il
l’exprimait encore en dessins humoristiques qu’il envoyait régulièrement en
Suisse, au Papillon, et, aux Etats-Unis, au Scribners Magazine.
Le Cabinet des estampes avait acquis en 1889 une importante collection
de ses œuvres ; il la compléta au fur et à mesure de ses nouvelles productions.
D’autres séries assez complètes existent au Cabinet fédéral des estampes
à Zurich, aux Musées de Bâle, de Genève et de Neufchâtel.
D’intelligence cultivée, van Muyden joignait un joli brin de plume à sa
pointe d’aquafortiste. On pouvait s’en douter en lisant les articles où il
traitait de questions d’art, et notamment de l’eau-forte, dans la revue Gra-
vure et lithographie françaises ; il y laissait percer son admiration pour Dela-
croix et pour Barye. Après sa mort, on a trouvé dans ses papiers un volume
de souvenirs qui méritent certes de voir le jour. Le Journal de Genève a
publié dernièrement ceux qui se réfèrent à un séjour cju'il fit à Tivoli en 1885.
Il avait vingt-huit ans. Ces pages sont alertes, colorées, teintées de poésie,
d’une observation vive et nuancée ; il lui suffit de quelques lignes pour faire
tableau. Mais l’enthousiasme tombe lorsqu'il rentre à l’auberge ; là, la note
légère et moqueuse reprend le dessus. Il s’attable avec deux amis, artistes
comme lui, et il consigne sur ses tablettes : « Ce soir, nous avons entamé
et développé une discussion si profonde sur l’art en Italie, que nous nous y
sommes noyés. » Il raillait doucement les discussions de ce genre; il savait
qu’il vaut mieux réaliser son œuvre que la parler.
HENRI M A L O
CARTE DE VISITE d’e. VAN MUYDEN
EAU-FORTE ORIGINALE DE l’aRTISTE
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gorgent, se pavanent, font la roue, baissent et relèvent la tête en roucoulant
des modulations amoureuses, surprenants de blancheur et de vie. C’est
encore en Italie, sans doute à Venise, qu’il conçut cette œuvre.
Ses planches faites de croquis pris sur le vif l’emportent sur celles comjaosées
à la manière de tableaux, et donnent la meilleure idée de son talent. Quant
à sa fantaisie, à cette ironie légère qui séduisait dans sa conversation, il
l’exprimait encore en dessins humoristiques qu’il envoyait régulièrement en
Suisse, au Papillon, et, aux Etats-Unis, au Scribners Magazine.
Le Cabinet des estampes avait acquis en 1889 une importante collection
de ses œuvres ; il la compléta au fur et à mesure de ses nouvelles productions.
D’autres séries assez complètes existent au Cabinet fédéral des estampes
à Zurich, aux Musées de Bâle, de Genève et de Neufchâtel.
D’intelligence cultivée, van Muyden joignait un joli brin de plume à sa
pointe d’aquafortiste. On pouvait s’en douter en lisant les articles où il
traitait de questions d’art, et notamment de l’eau-forte, dans la revue Gra-
vure et lithographie françaises ; il y laissait percer son admiration pour Dela-
croix et pour Barye. Après sa mort, on a trouvé dans ses papiers un volume
de souvenirs qui méritent certes de voir le jour. Le Journal de Genève a
publié dernièrement ceux qui se réfèrent à un séjour cju'il fit à Tivoli en 1885.
Il avait vingt-huit ans. Ces pages sont alertes, colorées, teintées de poésie,
d’une observation vive et nuancée ; il lui suffit de quelques lignes pour faire
tableau. Mais l’enthousiasme tombe lorsqu'il rentre à l’auberge ; là, la note
légère et moqueuse reprend le dessus. Il s’attable avec deux amis, artistes
comme lui, et il consigne sur ses tablettes : « Ce soir, nous avons entamé
et développé une discussion si profonde sur l’art en Italie, que nous nous y
sommes noyés. » Il raillait doucement les discussions de ce genre; il savait
qu’il vaut mieux réaliser son œuvre que la parler.
HENRI M A L O
CARTE DE VISITE d’e. VAN MUYDEN
EAU-FORTE ORIGINALE DE l’aRTISTE