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1 ités qui en fuit une des choses les mieux
réussies dans un genre dont la noie morale
a toujours été forcée par les soi-disant maî-
tres de ce genre. Il faut louer bien haut
M. Baugniet de ne pas être entré dans cette
voie facile et malsaine où,avec son talent,il
eût obtenu des succès plus bruyants peut-
être mais peu durables ; succès marqués de
ce signe réprobateur que la saine partie du
public sait infliger aux insinuations plus ou
moins délicates au moyen desquelles cer-
tains modernes démoralisent les masses.
Nous ne saurions séparer l’art de la bonne
éducation,et,si tout le monde avait pensé de
même, on ne verrait pas le premier tombé
si bas, si bas,que,dans la personnede Cour-
bet, il a franchi toutes les hontes et mérite
le pilori de l’ignominie. Mais rentrons dans
notre sujet dont les graves enseignements
du présent ne nous excitent que trop à
sortir.

M. Cluysenaar n’a pas grand’chose au
Salon,maiscette chose est jolie et originale.
C’est un portrait, dit le Catalogue, soit,mais
le portrait d’une personne qui ouvre une
porte peut à bon droit passer pour un tableau
de genre à une époque où ii subit pour
cela d’une dame cachetant une lettre. C’est
égal, il y a dans le tableau de M, Cluyse-
naar un attrait irrésistible. M. Germak a
aussi une exposition insuffisante quant à la
quantité,mais la qualité y supplée. Sa Tête de
jeune fille Vainque est une noble et belle
peinture dans sa petitesse.

M.Dansaerl est encore un des heureux du
Salon; celui-ci possède,sans contredit, un de
ses tableux les mieux sentis et les mieux
peints: Les nouvellcsde famille forment uné-
pisode compris avec une intelligence d’obser-
vation remarquable ; chacun, dans cette scè-
ne charmante et douce, joue son rôle avec
un à propos irréprochable. Les physiono-
mies sont avenantes et spirituelles, les
costumes rendus avec une grâce et une
aisance familières du reste à l’artiste. Il n’y
a pas jusqu’à la disposition de l’appartement
qui ne soit un chef-d’œuvre d’agencement.
Le coloris général est d’une finesse, d’une
douceur et d’une harmonie chaude et fraî-
che à la fois. Les deux autres tableaux de
M. Dansaert participent des mêmes quali-
tés. Dans la Courbette, il a forcé sa palette
avec succès.

Fière humilité,de M. Soubre.est aussi une
des bonnes toiies de l’exposition de Gand.
Palette brillante, composition iacile et pit-
toresque, scène bien mouvementée, aspect
agréable et même séduisant, rien n’y man-
que... que le sujet, incompréhensible sans
livret. C’est fâcheux ; nous ne saurions trop
démontrer aux artistes l’importance de la
clarté du sujet. La moitié du succès est
là et bien souvent le public refuse d’ac-
corder l’autre moitié au tableau quand il
s’irrite de n’en point comprendre le motif.
M. Dauriac donne à son coloris un soin
extrême. Cette préoccupation pourrait le
conduire à la froideur et à la monotonie; il
faut qu’il s’arrête. Ses œuvres ont de la
tournure, de la vie et une coquetterie d’as-
pect peu commune, et ce serait dommage

de gâter ces qualités par leur excès même.
Dans des sujets comme le Pistolet chargé,
cette minutie est peut-être nécessaire, ail-
leurs elle absorberait sa nature d’artiste. Ce
Pistolet chargé est bien la chose du monde
la plus incroyable comme vérité. Jamais
nous n’avons vu un groupe d’accessoires
d’une exactitude plus complète, c’en est
effrayant ! M. Claes,lui,reste doux et moel-
leux dans ses sujets comme dans leur in-
terprétation. Ses trois tableaux de Gand
plaisent aux natures calmes et sensibles et
ce n’est pas sans raison. M. Claes sait pour-
tant travailler avec plus d’énergie : nous
avons vu dernièrement de lui, à Huy, un
colossal Christ en croix d’un très grand sen-
timent et d’une magnifique facture.

Il y a deux nudités au Salon, toutes deux
dignes d’attention. L’une est de M. Lefevre
d’après son grand tableau : la Vérité; tout
j y esÇforl beau,excepté la figure un peu re-
vêche et aux yeux gonflés. La baigneuse de
M. SchuIzenberger, est un chef-d’œuvre de
grâce, de morbidesse et de vérité dans la
partie supérieure du corps de la femme. I!
est regrettable que cette dame ôte son bas
à la façon vulgaire d’une femme du quartier
Mouffetard. (A continuer.)

Discours prononcé par M. Gallaii,

Président de b Académie et Directeur de la Çlasse

des Beaux-Arts, à la Séance publique de celle

Classe, le 26 Septembre. (1)

« Un objet digne du plus vif intérêt, des
plus ardentes affections, nous rassemble
aujourd’hui. Est-il nécessaire d’ajouter que
c’est de l’art qu’il s’agit. 11 n’y a que les dés-
hérités du côté de l’intelligence et du côté
du cœur qui n’aient pas ressenti la profonde
influence de ce puissant agent des impres-
sions humaines.

» N’ayons pas d’amères paroles pour ceux
qui ne professent pas le culte des beaux-
arts, qui méconnaissent leurs souveraines
beautés, leur souveraine puissance. Plai-
gnons-! es : iis ne savent pas de quelles
jouissances les prive l’infériorité de leur
organisation.

» L’art est notre joie ou notre consolation,
selon les circonstances de la vie où nous
place l’inconstante fortune. Une femme du
plus noble caractère, aussi admirable par
sa résignation dans le malheur qu’elle l’avait
été par ses vertus dans la prospérité, la
reine Amélie, disait un jour à Scheffer, en
lui montrant, à Londres, un de ses tableaux
représentant Sainte Monique et Saint Augus-
tin qu’elle avait emporté dans son exil :

(i) Nos lecteurs auront à nous pardonner de
leur présenter aujourd’hui deux discours déjà
publiés dans d’autres journaux. Nous avons
bien rarement recours à une rédaction faite ainsi
en dehors de nos ressources ordinaires, mais les
circonstances nous paraissent de nature à nous
faire excuser. L’importance de ces discours à
différents points de vue n’échappera à personne.
Cette importance prend même des proportions
qui nous sont particulièrement sensibles si l’on
veut bien réfléchir que le Journal des Beaux-Arts
défend depuis son origine les thèses si vaillam-
mant et si brillammant exposées et débattues par |
MM. Gallait et Loise. 1

« Combien je dois vous remercier d’avoir
» fait pour moi cette œuvre empreinte de
» tant de sentiment ! Toutes ies fois que
» je l’ai considérée, je me sens meilleure, »

» Cette parole, qui nous a été répétée
par celui à qui elle a été dite, nous l’invo-
querions s’il en était besoin, comme un
témoignage de l’action morale et civilisatrice
des beaux-arts. Oui, les impressions qu’ils
nous font éprouver nous rendent meilleurs.
Bien coupables sont donc, vis-à-vis de la so-
ciété, les gouvernements qui ne font pas en-
sorte que ces impressions soient accessibles
à toutes les classes.

» C’est de nos jours, surtout, que l’art a
le pouvoir d’accomplir cette grande mission
du perfectionnement moral des masses.
C’est par l’expression des sentiments hu-
mains, dont ne s’occupaient que secondai-
rement les anciens maîtres, si grands par
d’autres mérites, que les. artistes de l’époque
actuelle ont la faculté de s’élever jusqu’à
ce noble but.

» Admettre ce principe, c’est proclamer
la liberté dans l'art. Il n’y a plus de systè-
mes exclusifs, de sujets recommandés ou
proscrits : des horizons immenses s’ouvrent
aux inspirations et aux observations de l’ar-
tiste. Qu’il lire ses sujets de l’histoire, de
la tradition ou de la légende, ou bien encore
du livre toujours ouvert des scènes fami-
lières, qu’il fasse revivre le passé par cette
intuition qui est le propre du génie, ou
qu’il fixe, pour les générations futures, les
vivantes images du présent, peu importe.
U est libre, complétemeut libre, pourvu
qu’il fasse vibrer dans nos âmes une des
cordes, n’importe laquelle, qui répondent
aux notes du clavier des sentiments hu-
mains.

» Sur le terrain de l’expression, tous les
systèmes se rencontrent et se donnent la
main : ou, pour mieux dire, il n’y a que la
recherche du vrai qui se confond avec le
beau, car on peut dire que, jusqu’à un cer-
tain point, toute vérité est belle dans le
domaine de l’expression.

» La beauté pure est rare ; n’accorder qu'à
elle seule le droit de figurer dans les œu-
vres d’art, c’est refuser injustement l’hon-
neur de la représentation picturale ou plas-
tique à une foule de types que la nature n’a
pas créés en vue de cette exclusion ; c’est
priver les artistes des immenses ressources
qu’ils trouvent dans la variété des modèles !
A Dieu ne plaise cependant que je veuille
plaider ici la cause de la laideur pure, qui a
trouvé des défenseurs plus intéressés que
convaincus, il est permis de le croire ; c’est
de la laideur modifiée, transfigurée par
l’expression, que je prends la défense. Il
n’y a pas de physionomie, si rude, si dis-
gracieuse, si vulgaire qu’on la suppose, qui
ne devienne belle, à un moment donné, sous
l’influence d’un sentiment vivement ressenti.
C’est ce moment qu’il faut saisir ; c’est
l’expression fugitive qu’il faut fixer par le
prestige de l’art. Les œuvres des anciens
maîtres nous offrent assez d’exemples du
pouvoir qui est donné à l’art de tout enno-
 
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