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Wey, Francis; Wey, Francis [Mitarb.]
Rome - description et souvenirs: ouvrage contenant 358 gravures sur bois, dessinées par nos plus célèbres artistes et un plan de Rome — Paris: Librairie Hachette, 1875

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https://doi.org/10.11588/diglit.66816#0240
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222

CHAPITRE NEUVIÈME.

mesurer, au-dessus de bien des ruines, les ruines d’un précipice assez profond pour qu’en sau-
tant on soit parfaitement sûr de se rompre les os. C’est là que jadis l’ingratitude et l’envie lan-
çaient dans l’éternité les grands hommes qui avaient trop fait pour la patrie et les génies embar-
rassants pour la médiocrité dominante. Les anfractuosités de ce cimetière aérien de la gloire sont
parfumées de violiers jaunes et de giroflées roses.
Découvert d’un peu loin, le rocher ne révèle nullement sa dimension parce qu’il est masqué ;
mais en entrant, derrière l’hôpital de la Consolation, dans une ruelle qui aboutit à la via Bocca
délia ~Verità, on mesure mieux l’élévation réelle de la roche Tarpéienne, trouée d’une ou deux
cavités et veinée de quelques égouts d’un âge indéfinissable. Un des logis perchés sur ce roc
était habité, il y a peu d’années, par le regrettable Ampère; c’est de là que, armé d’un télescope
allemand, il contemplait les horizons historiques de l’ancienne Rome. Bien que les terrains du
Vélabre et des quartiers avoisinants aient été depuis le temps de Sylla exhaussés de quarante-deux
pieds, la roche Tarpéienne a moins changé d’aspect qu’on ne se le figure : en racontant le siège de
la citadelle par les Vitelliens qui voulaient la reprendre sur les soldats de Sabinus, et qui l’incen-
dièrent, Tacite nous représente les assiégeants gravissant « les Cent marches qui séparent de la
roche Tarpéienne le bois sacré de l’asile, » et il ajoute que les soldats grimpaient à la forteresse
« parles toits des maisons qui, à la faveur d’une longue paix, avaient été bâties contiguës aux
murailles, tellement hautes qu’elles atteignaient le n^yeau du sol capitolin. » Si cette indication
datait d’hier, on la jugerait exagérée.
Il paraît qu’à cette époque la destruction du Capitole n’épargna point la statue du Jupiter en
bois de cèdre que Pline a vu, et qui depuis l’an 661 gardait la citadelle, puisque l’audace des
Gaulois et des Germains s’accrut de cette conviction superstitieuse que les dieux abandonnaient
Rome. « Autrefois, disaient leurs druides, nous l’avons prise ; mais Jupiter était resté debout.
Maintenant il nous livre les impies qui ont ruiné son temple, et la souveraineté du monde va
passer aux nations transalpines! » Aussi, pour éteindre ces prophéties, Vespasien s’empressa-t-il
de faire rebâtir, sous les ordres de Lucius Vestinus, le temple ainsi que le Castrum, à la même
place et sur le même plan. Par une journée sereine, le 11 des calendes de juillet, l’enceinte en fut
délimitée avec des bandelettes et des couronnes, et l’on y fit entrer, munis de rameaux verdoyants
agréables aux divinités, les soldats qui portaient des noms heureux. Pontifes, sénateurs, magistrats,
plébéiens s’attelèrent aux câbles de la première pierre qui était énorme : dans les fondations on
jeta des médailles d’or, d’argent, et des métaux vierges que le feu n’avait jamais domptés. Seule-
ment on donna plus d’élévation aux murs du temple, parce que l’ancien était d’une proportion
trop écrasée.
Pour retrouver l’emplacement à jamais consacré de cet édifice, gagnons l’autre sommet du
Capitole.
II
Cette butte de soixante mètres est plus haute en renommée que l’Himalaya : les rois des dieux
et des humains s’y sont succédé depuis le fabuleux Saturne, qui l’habita et y mit un peuple.
Homulus y ouvrit un asile; Tarpeia, la fille de son lieutenant, baptisa la roche; le premier Tar-
quin y exhuma cette tête coupée que le nom de Capitole rappelle ; le second y installa Jupiter.
Camille, après la retraite des Gaulois, releva la citadelle et l’entoura de murailles flanquées de
donjons carrés ; Sylla rebâtit en marbre de Paros le temple de la colline sainte ; Vespasien refit
plus grande l’œuvre de Sylla; Domitien enrichit l’édifice paternel et fit couler en or massif la
statue du dieu. C’est là que sacrifiaient les pontifes, là que montaient les triomphateurs. L’ère
du polythéisme étant close, lorsque le temple eut fait place à une église dédiée à la Vierge-mère,
 
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