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Le charivari — 47.1878

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LE CHARIVARI

singulièrement, quelque habitude que vous en ayez
aujourd’hui.

Plus d’une fois, j’en ai la conviction, il a dû vous
arriver, monsieur, d’envier la condition du citoyen
paisible qui peut servir honorablement son pays.

Plus d’une fois, faisant un triste retour sur votre
candidature ridicule et sur votre grandeur qui vous
tient hors de la patrie, vous avez dû être jaloux du
sort de ce simple ouvrier qui, d’un pied libre, foule
le sol de France, heureux des baisers de sa famille
et des satisfactions du devoir accompli.

Pendant ce temps-là, comme sœur Anne, vous
montez chaque matin à la tour, et chaque matin
vous ne voyez rien venir.

Pendant ce temps-là, berné par les prophéties des
adulateurs, par les faux présages des courtisans,
vous attendez que l’heure de votre restauration
sonne à l’horloge des révolutions.

Elle ne sonnera pas, monsieur. On vous trompe.

On vous trompe; car, plus le progrès marche,
plus le peuple vous tourne le dos.

On vous trompe ; car vous êtes le passé, et les
nouvelles générations vont à l’avenir.

On vous trompe ; car tout ce que vous êtes forcé
de patronner, la France le hait et le repousse.

Vou3 représentez le droit divin et la volonté na-
tionale fait loi.

Vous représentez le cléricalisme et le clérica-
lisme est l’ennemi.

Vous représentez l’inégalité des citoyens, la
compression et les privilèges. Et la devise de notre
pays est : Liberté, Égalité, Fraternité.

Vous avez eu raison, monsieur, en 1873, de mon-
trer plus de bon sens que vos sectaires.

Vous avez eu raison de repousser la couronne
depuis qu’on voulait de force l’enfoncer sur votre
tête.

D’abord parce que la majorité parlementaire qui
vous était nécessaire vous aurait échappé au der-
nier moment.

Puis, à supposer qu’un escamotage vous eût fait
roi à une voix près, il en eût été de cette royauté
comme de l’autre de la fable.

Vous voyiez bien par où vous seriez entré, mais
on ne vous disait pas comment vous en seriez sorti.

Restez donc, monsieur, restez en exil.

L’exil est cruel. Mais c’est encore le minimum de
la peine par laquelle vous expiez les fautes de vos
aïeux.

Et voilà pourquoi, monsieur, je vous plains sin-
cèrement quand d’autres vous congratulent.

Pourquoi je vous décourage franchement quand
d’autres vous bercent d’illusions aussi décevantes
que périlleuses.

Votre serviteur, qui ne sera jamais votre sujet.

INCOGNITO.



UN MAUVAIS JOUEUR

(Après le dîner, ces messieurs fument autour
du billard.)

poliveau.— En faisons-nous une, Jolibois?

jolibois.— Ma foi, non.

poliveau. — Pourquoi?... Après le café, c’est très-
hygiénique.

jolibois. — Ce qui l’est moins, c’est de subir votre
mauvaise humeur, vos grincheries, vos jérémiades
quand vous perdez.

poliveau.—Vous êtes souverainement injuste. C’est
à peine si je témoigne mon ennui par un léger fronce-
ment de sourcils.

jolibois.— Demandez plutôt à Garnerin.

poliveau.— Oh! lui, il me porte toujours la guigne.

garnerin.— Poliveau n’est pas plus mauvais joueur
qu’un autre...

poliveau (triomphant).— Là! vous voyez.

garnerin. — Je veux dire qu’il manie la queue assez
proprement. Quant à sa manière de perdre, je ne vou-
drais pas être son gagnant le jour où il serait atteint
d’hydrophobie.

poliveau. — Des bêtises ! Je suis comme tout le
monde : je préfère le gain à la perté.

-«.-

En vente, dans les bureaux du Charivari,
L’EXPOSITION POUR RIRE,
Album de soixante caricatures par Cham.

Prix : un franc.

Ajouter 2S centimes pour le port.
--

CHRONIQUE DU JOUR

Le terme de phonographe appliqué depuis peu à
l’appareil que tout le monde a entendu (« Monsieur le
phonographe vous souhaite le bonjour!») n’est pas
nouveau dans notre langue.

Il a servi longtemps à désigner certains outranciers
de la linguistique qui prétendaient obtenir que notre
langue écrite reproduisit simplement, sans surcharge
de voyelles ou de consonnes inutiles, les sons de notre
langue parlée.

Notre aimable confrère Alexandre Erdan, qui vient
de mourir en Italie, fut, dans sa jeunesse, au nombre
de ces hardis novateurs.

En 1884, il levait l’étendard de la révolte contre l’or-
thographe surannée de l’Académie et ralliait autour de
lui les phonographes découragés, par la publication
d’un très-curieux volume intitulé: les Révolutionnaires
de VA B C.

Les bonnes raisons ne manquent pas dans son plai-
doyer, mais il faut reconnaître qu’elles n’ont convaincu
personne.

Erdan n’était pas ce que j’appellerai un phonographe
intransigeant. En phonographie comme on politique,
c’était plutôt un opportuniste.

« Une révolution de cette nature, disait-il, ne peut
pas se faire tout d’un coup. Elle ne peut se faire que
d’une manière progressive, par des révolutionnaires
circonspects. »

Par exemple, tout en admettant le principe fonda-
mental,

« L’écriture doit être la peinture de la parole, il ré-
prouvait l’orthographe radicale :

Kelk abil om ke vous soiié.

(Traduction : Quelque habile homme que vous soyez.)

Mais il écrivait parfaitement :

Quèle bêle âme que cèle de cet home.

Et pour montrer que la poésie n’était pas rebelle au
système phonographique, il donnait cette étrange ver-
sion d'une chanson connue de Béranger :

Sinquante ivèr on pasé sur ta tête ;

J’é de biin prè cheminé sur tè pâ.

Mè sèz ivèr ontu leur jour de fête,

Tou ne fu paz aquilonz è frimâ.

Orion-nou mieuz emploiié la jeunèse,

Véqu moins vîts avèq un riche avoir?

Mon vieil ami, quan pour nous le jour bèse,
Souéton-nous un gé bonsoir.

Dans l’ar dès vèr s’é toi qui fu mon mètre,

Je t’éfasé san te randrejalou ;

Si lé seul frui qe pour nos Dieu fi nôtre
Sont dè chanson, sè fruit sont asé dou
Dans nos refrin que le pasé renèse,

L’illuzion nous vaudra son miroir.

Mon vieil ami, qan pour nous le jour bèse,
Souélon*nous un gé bonsoir.

brunet. — C’est évident. Moi qui n’ai pas de nerfs, je
me révolte quelquefois contre la déveine.

jolibois. — Vous? un mouton !. . Quand vous jouez
avec Poliveau, vous me faites l’effet de marcher à l’a-
battoir.

brunet. — Quelle exagération ! Je rage aussi... mais
en dedans.

poliveau. — Voulez-vous en faire une de cinquante,
Brunet?

brunet. — Volontiers. Ça m’empêchera de roupiller.

(La partie s’engage. En très-peu de temps, Poliveau
arrive à 30, et Brunet est encore puceau.)

poliveau. — J’ai une queue excellente aujourd’hui...
31... 32... 3... 4... 8... Raté! ... A vous, Brunet. (A Joli-
bois.) Eh ben ! suis-je grincheux ?

jolibois. — Parbleu! Vous faites faire le tour du bil-
lard à votre malheureuse victime.

brunet. — Je ne sais pas ce que j’ai ce soir, je man-
que les coups les plus faciles... Tenez! Encore fausse
queue... C’est contrariant.

poliveau. — Vous voyez bien. Poliveau lui-même
s’agace au besoin.

garnerin. — Il se mouche plus souvent que de cou-
tume ; c’est sa seule manière de protester contre la
fortune.

polIvEAü. —36... Un quatre bandes... 37!... Je l’ai
annoncé. (Poussant une exclamation de joie.) Oh ! tou-
tes les billes dans le coin! .. Une série!... Là... là!... Et
celui-ci !... et celui-là... 48 1 49 !... Et... Non ! Ma queue
manquait de blanc. A vous, Brunet. Je vous en laisse,

Erdan a publié ‘sous le 5 titre : la France mistique,
deux volumes d’un grand intérêt, qui seraient plus
connus, sans doute, s’il n’avait tenu à en faire un
échantillon de son orthographe rectifiée.

Le Réveil du Midi vient de publier une nomenclature
des congrégations religieuses qui pullulent dans le dé-
partement de Vaucluse.

Parmi celles de ces congrégations dont le vocable
rend rêveur, je citerai — côté de femmes :

« La communauté des Dames de la conception, à
Avignon, rue Philouarde (!) 25.»

Et côté des hommes :

« La maison de Notre-Dame de la cavalerie, dirigée
par les religieux de la Société de Saint-Pierre-ès-liens.»

Comme invite à l’armée, « Notre-Dame de la cavalerie»
est un chef-d’œuvre.

Ah ça! pourvu que l’infanterie ne soit pas jalouse.

Let industriels sont ordinairement avides de produire
des marques de distinction ou des brevets récents.

Ce n’est pas le cas d’un débitantîd’huile pour « assoU'
plir, tonifier et régénérer la chevelure. »

Celui-ci se targue d’un brevet « par ordonnance
royale de 1818. »

Il est vrai que son annonce court les quatrièmes
pages delà presse légitimiste.

Voilà un industriel qui connaît son public.

Il spécule évidemment sur l’enthousiasme des abon-
nés du Monde et de l'Union à se tonifier la chevelure
avec une huile brevetée sous la Restauration.

C’était dimanche la Saint-Michel.

Nous avons trouvé dans la boîte du journal le qua-
train suivant :

C’est la fête aujourd’hui de Michel l’indomptablej
Qui chasssa le diable du ciel ;

Mais si le diable avait chassé Michel,

Ce serait la fête du diable.

X... revient d’Espagne.

Il y a là des chemins encore assez dangereux à tra-
verser, quoique les carlistes ne les fréquentent plus.

Un alcade, pour lequel il avait une lettre de recom-
mandation, lui dit :

— Je ne veux pas vous laisser partir sans escorte.

Et lui montrant, par la fenêtre, deux individus à
mine patibulaire, qui roulaient une cigarette sur le
trottoir :

— Voici deux gendarmes qui vont vous accompagner.

— Ah 1 fit le voyageur avec un mouvement d’inquié-
tude.

Et il ajoufa timidement :

-Est-ce que vous n’auriez pas aussi deux voleurs à
me prêter?

— Pourquoi donc ?

— Pour me prêter main-forte au besoin contre vos
gendarmes.

Paul Parfait.

Le gérant : Altaroche.'

j’espère?... Ah! le malheureux! Il n’y avait qu’à pous-
ser. — Messieurs, cette partie sera consignée dans
l’histoire! J’aurai gagné Brunet sans lui permettre de
prendre un point ; et pourtant ce n’est pas le premier
Venu au billard.

brunet (se mouchant). —Oui, c’est laquinant... Te-
nez ! un enfant ne l’aurait pas manqué. (Il se mouche.)

jolibois. — Laissez donc votre pauvre nez tranquille.
Ce n’est pas lui qui joue.

brunet. — C’est plus fort que moi, mon ami, c’est
nerveux.

poliveau (souriant à la vue des deux billes côte à
côte devant la sienne.)— Ce n’est pas la peine de jouer.
Vous me le donnez Brunet?

brunet, posant sa queue. — Parbleu ! (Il se mouche).
Il n’y a qu’à souffler dessus.

garnerin. — Non! non! On ne sait pas! faites-le,
Poliveau.

jolibois.—C’est de la cruauté I Vous voulez-donc
conduire le corps de Brunet jusqu’au cimetière ?

garnerin. — Il en sera quitte pour se remoucher une
dernière fois. Allons, grand vainqueur.

(Poliveau pousse sa bille nonchalamment... et manque
son coup. Eclats de rire de la galerie. Brunet reprend sa
queue.)

poliveau. — C’est pour permettre à Brunet d’en
fair un.

brunet (carambolant). — Enfin !... Vaut mieux tard
que jamais ! (Ses coupes se suivent et se ressemblent*)
Tiens, tiens !... Voyez donc!... Uue vraie série*
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