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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 3.1870

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Nr. 3
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Champfleury: Rabelais dessinateur
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https://doi.org/10.11588/diglit.21406#0258

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RABELAIS DESSINATEUR. 2kl

siècle, une époque, leur temps; alors les vivants reconnaissent la perte
qu'ils ont faite, quel trésor de connaissances est enfoui à jamais dans la
tombe du penseur, et une admiration sans bornes succédant à la défiance
s'augmente de siècle en siècle et quelquefois outre la mesure.

Arrivent des générations qui ne croient jamais assez payer les mines
d'observations découvertes par ces hommes et dont ils ont enrichi le
fonds commun. Ces philosophes graves ou railleurs si contestés, quel-
quefois persécutés de leur vivant, on en fait le parangon de toute
science ; aucunes connaissances de leur époque, prétend-on, ne leur
étaient inconnues : politique, lettres, sciences et arts n'avaient aucun
secret pour eux.

C'est ainsi qu'un médecin espagnol moderne a voulu voir dans Cer-
vantès un physiologiste de premier ordre. Gomme le livre ne manque
pas d'aperçus ingénieux, je voulus en avoir le cœur net. Étant allé un
jour faire quelques études à la Salpétrière et le hasard m'ayant mis en
relation avec un aliéniste chercheur et bienveillant, le docteur Baillar-
ger, je lui demandai ce qu'il fallait croire de la science physiologique
attribuée à l'auteur de Don Quichotte.

Le médecin appela une folle. « — Tenez, me dit-il en me montrant
du doigt la dépression de son crâne, voilà ce que Cervantès a parfaite-
ment décrit dans le portrait de la Maritorne. »

Gela ne me surprit pas. La vie agitée et difficile du poëte espagnol
fit que, blessé, enfermé dans un hôpital, il se trouva en rapport avec les
malheureux de toute sorte qu'on y traitait. Cervantès, un des plus
lettrés de son temps, connaissait sans doute les théories d'Aristote sur
la physionomie ; il avait, ce qui est mieux, des yeux pour voir que la
forme de la boîte osseuse implique souvent la quantité d'intelligence qui
y est contenue ; mais cela ne suffit pas pour prouver de profondes études
physiologiques.

Les mêmes qualités de science universelle ont été attribuées à
Shakspeare et à Molière. 11 est vrai que les passions et les vices de leur
époque, ils les ont mis en scène en philosophes; mais est-ce ajouter
quelque chose à ce beau titre que d'y joindre ceux d'esprits politiques
et de réformateurs?

Rabelais était un véritable savant: savait-il vraiment tout?

Telle est la question que d'autres se sont déjà posée et que je vais
étudier par un côté bien mince, à savoir si l'auteur de Gargantua, mé-
decin, poëte, philosophe, doit être compté parmi les habiles dessinateurs,
ses contemporains.

Les libraires du xvrie siècle n'en doutent pas. Le premier exemplaire
 
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