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GAZETTE UES BEAUX-ARTS.
Pieter Potter ou Palamedes —- et dont quelques-unes pouvaient
désormais être restituées à Ter Borch. Déjà M. Bode avait signalé au
Musée de Brême des Officiers jouant au tric-trac, avec le monogramme
à peine lisible de notre peintre, tableau probablement un peu antérieur
à celui de M. Yonides. L’obligeance de M. Werner Dahl, de Dusseldorf,
nous permet aujourd’hui de mettre sous les yeux de nos lecteurs la
reproduction d’un petit panneau (0m,32sur0m,42) dont il est possesseur
et que M. Bredius, avec son flair habituel, reconnut à première vue
pour être du maître et de la même époque que le Corps de garde de
Londres. Nous y retrouvons, en effet, avec des coiffures et des accou-
trements pareils, ces mêmes soldats contre lesquels une femme, l’air
éploré, semble demander assistance à un officier debout devant elle,
les mains croisées derrière le dos. Deux de ces soudards se montrent
entre eux le produit de leurs rapines, pendant que trois autres, au
fond, se chauffent près d’une cheminée.
Mais, au Louvre même, un tableau d’une donnée analogue et qu’il
convient également de restituer à Ter Borch, nous permet de nous
rendre compte de sa manière de peindre à ce moment. L’œuvre est
cataloguée Jean le Ducq (n° 135) et la désignation ainsi donnée est
doublement erronée, car Jean le Ducq était un peintre d’animaux,
probablement élève de Paul Potter, tandis que le peintre de sujets
militaires dont il pourrait être ici question, s’appelait en réalité Jacob
Duck. Mais un autre tableau placé à quelques pas de là, justement
attribué à ce dernier (n° 134), nous montre, comparé au précédent,
des différences d’exécution formelles et très facilement appréciables :
une facture plus sèche, une couleur plus mince, plus superficielle,
des tons plus bariolés, sans aucune préoccupation de l’harmonie
générale. J’avais constaté ces différences qui sautent aux yeux et que
le rapprochement des deux œuvres rend saisissantes ; mais l’attri-
bution à Ter Borch de ces Maraudeurs, attribution affirmée l’hiver
dernier en ma présence par M. Bredius, n’avait pas alors pour moi la
même évidence. LTne connaissance plus complète du maître me permet
aujourd’hui de la certifier avec lui. Dans les Maraudeurs de notre
Musée, mêmes types encore, mêmes costumes que dans les épisodes
analogues de Brême, de Londres et de Dusseldorf, même exécution
à la fois grasse et précise, même parti pris du coloriste habile, qui
excelle à. détacher sur l’ensemble des gris jaunâtres ou bruns quel-
ques tons plus francs qui vibrent et s’accordent entre eux : le man-
teau grenat du capitaine, la jupe rouge de la femme agenouillée à
ses pieds, les manches bleues du soldat accoudé près de là, avec la
GAZETTE UES BEAUX-ARTS.
Pieter Potter ou Palamedes —- et dont quelques-unes pouvaient
désormais être restituées à Ter Borch. Déjà M. Bode avait signalé au
Musée de Brême des Officiers jouant au tric-trac, avec le monogramme
à peine lisible de notre peintre, tableau probablement un peu antérieur
à celui de M. Yonides. L’obligeance de M. Werner Dahl, de Dusseldorf,
nous permet aujourd’hui de mettre sous les yeux de nos lecteurs la
reproduction d’un petit panneau (0m,32sur0m,42) dont il est possesseur
et que M. Bredius, avec son flair habituel, reconnut à première vue
pour être du maître et de la même époque que le Corps de garde de
Londres. Nous y retrouvons, en effet, avec des coiffures et des accou-
trements pareils, ces mêmes soldats contre lesquels une femme, l’air
éploré, semble demander assistance à un officier debout devant elle,
les mains croisées derrière le dos. Deux de ces soudards se montrent
entre eux le produit de leurs rapines, pendant que trois autres, au
fond, se chauffent près d’une cheminée.
Mais, au Louvre même, un tableau d’une donnée analogue et qu’il
convient également de restituer à Ter Borch, nous permet de nous
rendre compte de sa manière de peindre à ce moment. L’œuvre est
cataloguée Jean le Ducq (n° 135) et la désignation ainsi donnée est
doublement erronée, car Jean le Ducq était un peintre d’animaux,
probablement élève de Paul Potter, tandis que le peintre de sujets
militaires dont il pourrait être ici question, s’appelait en réalité Jacob
Duck. Mais un autre tableau placé à quelques pas de là, justement
attribué à ce dernier (n° 134), nous montre, comparé au précédent,
des différences d’exécution formelles et très facilement appréciables :
une facture plus sèche, une couleur plus mince, plus superficielle,
des tons plus bariolés, sans aucune préoccupation de l’harmonie
générale. J’avais constaté ces différences qui sautent aux yeux et que
le rapprochement des deux œuvres rend saisissantes ; mais l’attri-
bution à Ter Borch de ces Maraudeurs, attribution affirmée l’hiver
dernier en ma présence par M. Bredius, n’avait pas alors pour moi la
même évidence. LTne connaissance plus complète du maître me permet
aujourd’hui de la certifier avec lui. Dans les Maraudeurs de notre
Musée, mêmes types encore, mêmes costumes que dans les épisodes
analogues de Brême, de Londres et de Dusseldorf, même exécution
à la fois grasse et précise, même parti pris du coloriste habile, qui
excelle à. détacher sur l’ensemble des gris jaunâtres ou bruns quel-
ques tons plus francs qui vibrent et s’accordent entre eux : le man-
teau grenat du capitaine, la jupe rouge de la femme agenouillée à
ses pieds, les manches bleues du soldat accoudé près de là, avec la