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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 35.1887

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Nr. 3
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Pératé, André: Correspondance d'Italie: les nouvelles promenades de Rome; la galerie des candélabres au Vatican, et l'abside de Saint-Jean de Lateran
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https://doi.org/10.11588/diglit.24189#0290

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268

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

princières viennent à manquer. Aussi bien, la promenade Gorsini s’achève peu à
peu. Il serait injuste de ne pas avouer que l’endroit est admirablement choisi. Le
long de la côte paisible et régulière du Janicule, au pied de la grande muraille qui
se dresse de la Porta San-Spirito à la Porta Portese, de Saint-Pierre jusqu’à San-
Francesco a Ripa, en face de la Marmorata, on verra, au travers des pins et des
yeuses, Rome et la campagne, le Soracte et les monts Albains. Ce sera, en petit,
le splendide Yiale dei Colli de Florence. Ici seulement la Rome nouvelle imite la
nouvelle Florence. Mais à quoi bon ces promenades et ces points de vue, si l’on
n’y découvre que mieux toute l’horreur de ces bâtisses dont les Romains encadrent,
écrasent leur belle antiquité! A quoi bon cette autre promenade que l’on prépare
au revers des monts Parioli, jusqu’au Ponte Molle? Il y a deux ans, ces collines
boisées, ces prairies et ces vignes qui couraient de la villa Borghese jusqu’à l’Acqua
Acetosa et au Tibre, étaient un paradis de solitude et de lumière. Ils disparaîtront
devant une avenue macadamisée qui dominera des fabriques pour aboutir à des
usines ; mais on pourra s’y promener en voiture, et c’est tout pour un Romain.

Si nous allions au delà même du Ponte Molle, nous trouverions un nouveau
deuil : on débite le rocher des Nasons par wagonnées; il a son chemin de fer.
C’est encore un beau fragment de la campagne romaine qui s’en va !

Je voudrais dire quelques mots des travaux d’art du pape actuel ; ils ont été
loués par nombre de bonnes âmes, que cette contemplation a doucement consolées
des barbaries du municipe romain. Le municipe a détruit le cloître de l’Ara Cœli,
mais le pape a réédifié l’abside du Lateran; le municipe n’a pas commencé encore
son Musée Urbain; mais le pape a réorganisé la bibliothèque du Vatican, et restauré
la galerie des Candélabres.

La galerie des Candélabres, sans être parmi les plus importantes du grand
Musée Vatican, a bien son intérêt. Elle ne montre pas d’antiques puissants et rudes
comme le torse du Belvédère et le buste de Jupiter, mais elle n’en montre pas non
plus d’insipides comme tout ce qui habite la galerie Chiaramonti, statues refaites,
rapiécées et raclées, sans finesse et sans fleur. Elle a de beaux sarcophages, de
jolies statuettes, et ces candélabres d’Otricoli et de Sainte-Constance, qui la
dénomment. On la traverse pour aller voir les tapisseries de Raphaël, et l’on
s’arrêtait volontiers autrefois pour se rafraîchir les yeux à la blancheur des marbres.
Aujourd’hui, c’est un éblouissement. D’abord un pavement en mosaïque de marbres
éclatants et luisants, où Ton n’ose marcher, tant il est riche. Au centre étincelle
l’écusson du pape en pierres précieuses, et, en avant et en arrière, son titre solen-
nellement incrusté en bronze, porté par des anges. Sur la porte du fond, un buste
du pape, avec l’inévitable inscription. Les murs sont peints en divers tons, à la
pompéienne, avec des frises d’arabesques imitant le Jean d’Udine. Et là-dessus
brille un plafond enrichi de fresques, qui nous représentent quelques actes du
pontificat de Léon XIII, ou, chose plus singulière, illustrent et commentent des
phrases de ses encycliques par des figures ornées, on ne sait pourquoi, de costumes
du plus faux moyen âge. Si Ton avait un violent désir de décorer cette salle, ne
pouvait-on du moins s’inspirer, proche de là, dans les appartements Borgia, des
exquises merveilles du Pinturicehio ? On a seulement voulu dépenser beaucoup,
et faire riche. Quant aux pauvres marbres qu’on vient regarder dans cette galerie,
c’est l’unique chose qui s’efface, éteinte dans ce chaos de mosaïques brutales et de
fresques prétentieuses, qui ne sont même pas dessinées.
 
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