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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 8.1892

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Nr. 6
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Guiffrey, Jules: Le sculpteur Claude Michel dit Clodion (1738 - 1814)
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https://doi.org/10.11588/diglit.24661#0521

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LE SCULPTEUR CLODION.

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Soubise, sinon quelques-uns des plus célèbres sculpteurs du commen-
cement du règne de Louis XY, les Lemoine, les Adam, les Le Lorrain ?
Faut-il insister davantage sur cette persistance de l’application de
l’art à tous les besoins industriels jusqu’aux temps les plus rappro-
chés de nous? La scission déplorable, funeste, des deux anciens
alliés est donc une innovation moderne, contraire à toutes les tradi-
tions françaises. Et même de nos jours, combien de maîtres émi-
nents ont protesté par leurs exemples contre ce dédain de l’art
appliqué à la décoration! Ils triomphent enfin; leur cause paraît
désormais gagnée, mais après combien de déboires, au prix de quelles
luttes !

Ces rapprochements viennent naturellement à l’esprit de qui-
conque s’occupe de la vie et des œuvres d’un artiste comme Clodion.
Clodion aurait pu se consacrer exclusivement à la grande sculpture,
établir sa réputation sur trois ou quatre statues ou monuments dont
l’exécution eût rempli sa carrière, et il fût ainsi parvenu sans discus-
sion, car son talent était incontestable, à tous les honneurs acadé-
miques, à toutes les récompenses officielles. Il a préféré animer de
ses doigts agiles mille figures légères et exquises, promener sa fan-
taisie intarissable sur les objets les plus variés, tout en montrant à
maintes reprises à quel point il était capable de rivaliser avec les
plus habiles maîtres de son temps. Pour la gloire de son nom, peut-
être n’a-t-il pas choisi la plus mauvaise voie.

Pendant bien des années, les origines, la famille, l’existence tout
entière de Clodion sont restées enveloppées d’une profonde obscurité.
Quelques fervents admirateurs du xvme siècle recherchaient bien
avec ardeur ses ouvrages; mais ils cachaient ce goût comme un
travers; ils rougissaient presque de leur passion pour un art exquis
et profondément original. Le public s’intéressant peu à l’œuvre de
cet irrégulier, la biographie de Clodion était aussi ignorée que si des
siècles nous eussent séparés de lui. Un de ses amis, nommé Dingé1, qui

Antoine Dingé était un érudit et un écrivain; il se mêla même à la politique
active pendant la Révolution. Il écrivit une brochure sur le procès du Roi, avec
cette épigraphe hardie : La vérité ne déplaît qu’aux tyrans. J’ai vu annoncer dans
un catalogue récent de libraire des manuscrits de Dingé contenant des traductions
diverses du grec, de l’anglais, de l’italiep. Mais le meilleur titre qui sauvera son
nom de l’oubli sera toujours sa courte notice sur son ami Clodion.
 
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