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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 32.1904

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Durrieu, Paul: La "Vierge de Miséricorde" d'Enguerrand Charonton et Pierre Villate au Musée Condé
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https://doi.org/10.11588/diglit.24814#0020

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

laisser un grand souvenir en Provence, car, à Ja suite d’un mariage
avec une de ses descendantes, une des plus anciennes familles du
pays, celle des d’Ancezune, d’où sont sortis les ducs de Caderousse,
releva son nom et se fit appeler désormais Cadard d’Ancezune.

Quant à Jeanne des Moulins, que nous voyons dans le tableau
de Chantilly en face de Jean Cadard, c’est une physionomie qui se
rattache à l’histoire de l'art français.

Il y eut en France, au moyen âge, une catégorie d’artistes parti-
culièrement prisés et qui arrivaient parfois à une réputation égale,
ou peu s’en faut, à celle des peintres ou des sculpteurs; c’étaient les
brodeurs. La merveilleuse croix de chasuble, prêtée à l’exposition
des Primitifs français par M. Martin Le Roy, montre à quelle perfec -
lion les brodeurs pouvaient atteindre et explique la faveur dont ils
jouissaient. Sous le règne de Charles VI, un des maîtres les plus
réputés dans l’art de la broderie, à la Cour de France, fut Jean de
Clarcy, brodeur de la reine Isabeau de Bavière et du duc Louis
d’Orléans. Or, des documents curieux, qu’a bien voulu me signaler,
avec sa science inépuisable, M. A. de Boislisle, établissent que
Jeanne des Moulins, avant d’épouser Jean Cadard, avait d’abord été,
en premières noces, la femme de ce fameux brodeur Jean de Clarcy.

Il est inutile d’insister plus longtemps sur l’importance qui va
s’attacher désormais à la Vierge de Miséricorde du Musée Condé. Le châ-
teau de Chantilly, avec tous les trésors qu’il renferme, avec ses incom-
parables Très riches Heures du duc de Berry, avec ses fragments du
livre d’Heures de maître Etienne Chevalier, avec ses séries de dessins
et de peintures du xvie siècle, était depuis longtemps un lieu privi-
légié pour l’étude de notre vieil art français, si heureusement remis
en honneur aujourd’hui. La possession d’une œuvre de provenance
aussi certaine, de date aussi rigoureuse, d’attribution aussi bien éta-
blie que la Vierge de Miséricorde d’Enguerrand Charonton et Pierre
Villate sera un fleuron de plus pour les merveilleuses collections
léguées à la France par M. Je duc d’Aumale.

PAUL DUR RIEU
 
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