Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 32.1904)

LE PORTAIL ROMAN

DE LA

CATHÉDRALE DE REIMS

Lorsqu’on arrive devant la façade
nord de la cathédrale de Reims, l’esprit
tout prévenu d'une admiration qui ne
demanderait qu’à s’affirmer sans réser-
ves, la première impression que l’on re-
çoit est, je ne crains pas de le dire, celle
d’une sorte de malaise et de déception,
qu’un examen plus attentif ne fait qu’ac-
centuer davantage. Ces trois portails iné-
gaux, dont l’un, celui « du Beau Dieu »,
semble avoir été introduit comme de
vive force dans une architecture qui
n’était pas préparée à le recevoir; cette
irrégularité iconographique : le Christ et
le Jugement dernier placés dans une
porte latérale1 ; ces statues des pieds-
droits posées sur des socles trop bas, et
d’ailleurs, pour quelques-unes au moins,
d’une si médiocre sculpture; tout cela,
dénotant F absence trop évidente d’un plan d’ensemble harmonieu-
sement conçu et soigneusement exécuté, déconcerte les habitudes
d’esprit et d’œil que l’art gothique français nous a faites.

1. Dans la série de leçons dont la cathédrale de Reims a été l’objet à l’École
du Louvre au cours de l’année 1902-1903, M. André Michel s’était montré très
frappé des anomalies de forme et d’iconographie que je signale ici après lui et
avait émis, pour les expliquer, l’hypothèse que des parties importantes de sculp-
ture, préparées, dans une concepéon primitive, pour la façade ouest avaient pu
être utilisées ensuite à la façade nord.

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