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Le Grelot: journal illustré, politique et satirique — 7.1877

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7m. ANNEE. — N" 327 PvnîS FT [(KPAHTKMKNTS : CENTIMES LF NUMKP.O_1S JUILLET 1877

LA SEMAINE

Le cafctne/ rfe M. Dugourdin, préfet des
Alpes-Venteuses.

Dugourdin, assis à son bureau et relisant une
circulaire.

Tout cela est très-joli!... De la poigne!... de
a poigne ! toujours de la poigne !... Certaine-
ment ce n'est pas cela qui m'embarrasse...
Mais encore faut-il que ces gredins de répu-
blicains m'en fournissent l'occasion... et il
semble que depuis le 16 mai ces cannibales se
soient donnés le mot pour ne pas le souffler...
(liiant avec complaisance.) Hi ! hi 1... je crois
que je viens d'avoir de l'esprit... A propos
û'espnt, il est bien singulier qu'en lace de
ma glace, je suis parfois très-drôle et qu'en
public... La nature a de ces bizarreries 1
(Se levant.)

Voyons, il faut pourtant trouver un moyen
de contenter le patron 1... Cet excellent pa-
tron qui a bien voulu me promettre de cou-
vrir de son autorité toutes les bêtises que je
pourrais faire... Les journaux de ces infâmes
gueux sont corrects... pas d'attroupements
dans les rues... pas de cris séditieux... rien
qu'un silence qui ressemble beaucoup à du
mépris... A qui m'en prendre'?... 0 saint
Gourdin, mon patron et celui du Deux-Dé-
cembre, inspire-moi 1...

(Se frappant le front.)

Oh 1... une idée 1... Je vais fermer le café de
Cascaret... un café fermé, c'est toujours cela,
n'est-ce pas ?... et puis on fait ce qu'on peut...
Il est vrai que si je m'en fiais aux rapports de
mes imbéciles d'agents, ce Cascaret serait le
plus honnête conservateur du monde, et son
eafé une petite chapelle... mais je soupçonne
ces drôles-là de républicanisme habilement
déguisé, et c'est par moi-même que je m'as-
surerai... Oui... c'est cela... n'hésitons plus...
Vite, 'ma canne, mon chapeau et un faux nez...
que personne ne puisse soupçonner dans
rhomme qui va prendre un mêlé-cassis chez
Cascaret, l'illustre administrateur des Alpes-
Venteuses.

(Il revêt le dit faux nez, prend sa bonne canne
de Tolède et sort par une porte secrète, comme
dans les drames de Ferdinand Dugué.)

Le Café ne Cascaret.

Personne.

Cascaret, l'air navré, contemple, la larme à
l'œil le robinet de sa pression.

cascabet.

Et l'on dit que depuis le 16 mai les affaires
vont comme un charme!... Merci!... En v'ià
des colles !... Je n'ai seulement pas étrenné
aujourd'hui I...

(Entre un Monsieur, modestement vêtu, coiffé
d'un large chapeau mou et paraissant accablé de
chaleur.)

le monsieur.

Garçon!...

cascaret, suffoqué de joie.
Un client !... Ah !... que cela fait de bien !...
les affaires reprennent.

le monsieur.

Eh bien I garçon ?

cascadet.

. Voilà,. Monsieur!... Voilà!... Que désire
Monsieur 1

le monsieur.

Une groseille et de l'eau de seltz.

cascaret.

Boum !■•• {Il se précipite à son robinet et, dans
son trouble, tire un bock qu'il apporte au Mon-
sieur. Dugourdin, qui est entré depuis quelques
instants, semble suivre la pantomine avec le plus
grand intérêt.)

cascaret, servant le bock

Voilà, Monsieur, le bock que... elle est bien
fraîche !...

le monsieur.

' Qu'est-ce que vous me fichez-là?... Je vous
ai demandé une groseille et vous m'apportez
de la bière 1... Remportez-moi çàl

cascaret.

Mille pardons, Monsieur... En effet... je crois
me souvenir...

dugourdin, à part.

Pourquoi cet inconnu insiste-t-il tant sur
la groseille?... Hum ! .. tout cela n'est pas
naturel... Et puis cet air embarrassé... cette
façon de s'éponger le front toutes les deux
minutes... Il y a là un mystère... Cet homme
est peut-être un franc-maçon qui vient révo-
lutionner les Alpes-Vent^ises... Oh ciel!...
Mais alors... la société serait perdue... et que
dirait Saint-Genest ?... veillons I...

cascaret, uperervant Dugourdin.

Un second client !... Mais c'est un rêve !...
Décidément les affaires vont trop... Je vais
être obligé de prendre un second garçon...

(Gracieusement à Dugourdin. (Que faul-il servir
à Monsieur ?

dugourdin, d'une voix caverneuse.
Une paire de bottines à élastiques.

cascaret, faisant un bond.
Des bottines!... mais je n'en tiens pas... C'est
un café ici, Monsieur... et un café même où il
ne vient plus personne... je pourrais y élever
des lapins si çà me faisait plaisir.

dugourdin, toujours caverneux.
Pardon... une distraction... c'est la chaleur...
je me croyais chez le cordonnier en face. Don-
nez-moi un verre d'eau sucrée.

cascaret, s'èloignant.
Quel homme étrange I

le monsieur.

Garçon !

dugourdin, à paré.

Observons.

le monsieur.

Cette groseille est détestable... Regardez-
moi cette couleur... on dirait de l'eau rougie...
Au lieu de cette belle teinte sanguine... qu'elle
devrait avoir.

dugourdin, assurant son faux nez.
Sanguine I... j'en étais sûr 1... C'est un répu-
blicain... un conspirateur... il doit s'entendre
avec Cascaret. Ah 1 les Alpes-Venteuses vont
me devoir une fameuse chandelle 1
cascaret, humble.
Monsieur... je vous certifie...

le monsieur.
Et puis, elle a comme un goût... on dirait
du pétrole.

dugourdin, pâlissant sous son faux nez.
Du pétrole 1...

le monsieur.
Ça n'est pas que je déteste cette odeur... elle
tue les mites.

dugourdin.
Allusion terrible !... les mites... c'est neuf!...
Nous les conservateurs !... nous les ôtages 1...
Ah ! brigand !...

le monsieur.
Est-ce que vous en usez ici, du pétrole?

cascaret.

Oui, Monsieur... Je ne m'éclaire qu'avec
cela.

le monsieur.
Je comprends tout.

dugourdin.
Cascaret a du pétrole ici... et ce misérable
.comprend tout!... Ahl... mais sans moi, la
préfecture sautait... et moi avec!... et mes
administrés avec moi I
le monsieur, jetant une pièce de monnaie à
Cascaret.

Tenez... payez-vous. (Il se lève et toise Du-
gourdin.)

(A demi-voix.) En voilà un vilain pierrot ! (Il
sort.)

dugourdin, faisant signe à deux agents qui pas-
sent et leur désignant le malheureux limonadier.
Empoignez-moi cet homme-là I...
cascaret, suffoqué... mais de terreur cette fois.
Moi 1... empoigné 1... Mais qui êtes-vous, s'il
vous plait?... vous qui osez...

dugourdin, ôtant son faux-nez.
Regarde !... et tremble I

cascaret.

Le Préfet !

dugourdin.

Lui-même. Ah ! tu conspires t... Ah ! tu te
sers de pétrole!... Ton compte est bon, mon
ami... Et quant à ton café !... (aux agents) Fer-
mez-moi cette boîte-là 1...

(Cascaret tombe évanoui dans le baquet qui sert
à rincer les chopes.)

Sauvées les Alpes-Venteuses !... Si le mi-
nistère n'est pas content !...

NICOLAS FLAMMÈCHE.

Un de nos confrères du Journal du Havre
a découvert qu'en mettant à chacune des let-
tres de cette phrase : La République Thiers
va triompher son numéro d'ordre de l'alpha-
bet, on obtient précisément le nombre des dé-
putés signataires de la protestation des gauches.

Jugez plutôt :

LA



12 1

13

RÉPUBLIQUE



18 8 16 21 2 12 917 21 5

126

THIERS



20 8 9 5 18 19

79

V A



22 1

23

TRIOMPHER



20189 13 1316 8 S 18

122

Total général. . .

. 363

On dit qu'en lisant cela, M. de Fortou s'est

jeté dans les bras île M. de Broglie en s'é-
cria ut :
— Frère, il faut mourir !..

Zigzags

Cela va diablement mal, paraît-il, dans le
camp des conservateurs.

Oh oui !... diablement mal, à coup sûr,
puisque le Constitutionnel lui-même les aban-
donne !...

Or, vous savez que le vieux bonnet de coton
de la rue de Valois ne demande qu'à vivre
tranquille, et qu'il se tient toujours du côté du
manche, apportant à ceux qui ont l'assiette au
beurre l'appui de ses trois lecteurs.

Pour qu'il lâche M. de Broglie et Cie, il faut
qu'il sente qu'ils ne tiennent plus guère le
manche, et que bientôt le balai se sera re-
tourné, et qu'ils en goûteront du côté du crin.

Il voit que ces braves conservateurs s'enten-
dent entre eux comme souris, chats et ter-
riers, et que, si jamais, — chose heureusement
impossible, — ils remportaient la victoire, ils
se flanqueraient de suite une de ces piles colos-
sales comme on ne s'en est appliqué qu'aux
plus mauvais jours de notre histoire.

Or, Boniface, le bien nommé, qui rédige le
Constitutionuel, n'aime pas les piles, excepté
celles de gros sous.

C'est pourquoi il vient du côté des gens
tranquilles, et il se fourre dans un bon petit
coin du centre gauche, à l'abri derrière la Con-
stitution.

Pour avoir la paix, le Constitutionnel devient
constitutionnel, chose qu'il n'avait pas faite
depuis ses beaux jours, de 1830 à 1840.

Et maintenant, M. de Broglie et ses amis
peuvent voir avec terreur le Serpent de mer se
promener bras-dessus, bras-dessous avec le Pé-
ril social et l'Hydre de l'Anarchie 1

— Oh I... cela est bien mal, pouvez-vous
vous dire. Quand les rats abandonnent un na-
vire, il est perdu. Le Serpent de mer nous lâ-
che, nous sommes flambés !...

Et de fait, Messieurs, votre cause me semble
si mauvaise que, comme dit Rabelais, je n'en
donnerais pas un pet de lapin !...

#

* *

M. Target vient d'être décoré de la Légion
d'honneur, pour services exceptionnels.

Exceptionnels me semble juste.

Il y a en effet peu d'hommes capables d'agir
ainsi que M. Target l'a fait le 24 mal 1873.

Heureusement !...

«

* *

Le Courrier de Douai raconte ainsi l'exécu-
tion d'un assassin.

« Deux secondes s'écoulèrent dans un si-
« lence terrifiant. Soudain retentit un coup
« sord. Aublin, le meurtrier, était au ciel. »

Voilà pourtant comme cela se passe!... Au-
blin est au ciel pour y jouir de félicités éter-
nelle<, tandis que des gredins comme Miche-
let, Félicien David, Adam et Quinet s'ont des-
tinés à griller perpétuellement !...

C'est a donner envie de se faire assassin !...
*

Dernier écho de la Dissolution.

— C'est égal, les députés ont perdu à être
ainsi renvoyés.

— Comment!...

— Dame oui ! C'est embêtant d'être dissous
quand on a été si francs !...

GRINGOIRE.

FEUILLES AU VEUT

Un poète qui se disait jadis adorateur de la
République,

Mais qui lui a depuis préféré les beefteacks.

J'ai nommé l'ex-ouvrier cordonnier, Pierre
Denis,

Qui après avoir eu le singulier honneur d'être
le confident de la Commune et de rédiger son
manifeste.

Eut la chance non moins singulière de deve-
nir celui du Prince Napoléon et de rédiger ses
journaux.

Un poète, dis-je, — car il le fut avant d'être
orte-coton, — s'écriait un jour dans une pièce
e vers qui faillit devenir populaire :

Lesroissont les bouviers et nous sommesles bœufs.
***

M. Pierre Denis qui a voulu cesser d'être
bœuf,

Et qui s'est retiré dans le camp des bouviers,

Faisait ce jour-là un beau vers, et disait une
bonne chose :

— Un peuple n'est en effet pour un roi, que
ce qu'est un bœuf pour son maître.

On le fait travailler, suer et rapporter tant
qu'il peut aller,

Et si on ne le laisse pas mourir de faim,
c'est qu'au bout du compte, pour sa récom-
pense, on le mange.

Pauvre peuple 1

En ce moment, le bœuf, — je veux dire le
peuple, — est plus tourmenté que jamais;

Car il n'a pas qu'un bouvier,

Il en a autour de lui toute une bande, armée
vd'aiguillons, de fouets et de bâtons, — et il
faut voir comme les coups pleuvent sur la bête.

Elle ne sait plus où se mettre,

Et clergé,

Police,

Instituteurs,

Percepteurs,

Nonnes,

Et Gardes champêtres,

Le harcèlent avec leurs goupillons, leur*
casse-tête, leurs férules, leurs plumes d'oie,
leurs chapelets et leur bancal.

Le bœuf ne sait plus où donner de la tête : —

Mais le jour où il le saura,

Gare à ses cornes !

Il faut en vérité que les gens du 16 mai soient
furieusement aveuglés, comme l'Athalie de
Racine, de

.....Cet esprit d'imprudence et d'erreur

De la chute des rois funeste avant-coureur,

Pour s'imaginer qu'on peut traiter l'opinion
comme une petite fille à qui on fait manger sa
tartine de confiture à l'envers;

Et ceux-là on t bien mauvaise mémoire qui
ne se rappellent plus déjà la double paire de
giffles appliquées sur les joues du tout puis-
sant Buffet,

tes gillles trop douces encore, — aux pro-
chaines élections se changeront sans doute
pour M. de Broglie et la séquelle qui l'accom-
pagne d'un formidable coup de pied au der-
rière,

Auquel ces messieurs du reste, semblent
insensibles puisqu'ils s'y exposent aussi gra-
tuitement, — car les meilleurs astronomes
politiques n'ont aucun doute sur la pluie de
pommes cuites et de trognons de choux qui
les attend.

* *

Temps radieux de l'Empire 1
Candidatures officielles 1
Marmites électorales!

J. de la M. dont les mains rappelaient cela,
de Morny qui passait trente-six fois de suite à
l'écarté 1

Où êtes-vous glorieux souvenirs?

Le vent de six années de République a ba-
layé toutes ces ordures, toute cette poussière,
tout ce fumier en décomposition ou fleuris-
saient les Cassagnac et Clément Duvernois
cette rose mousseuse des maisons centrales 1

Certes,

L'Empire, à son point de vue, avait raison.
Il était logique, — et conséquent avec lui-
même,

Aussitôt, après ses massacres de décembre,
Ses déportations en masse,
Ses proscriptions en foule,
Il s'était dit :

— Maintenant je suis le maître!

Tout ce qu'il y avait d'honnête et d'intelligen
est fusillé ou en exil : les grands orateurs, les
vaillants généraux, les puissants poètes, les
avocats illustres, les savants médecins, les
cœurs exquis, les âmes généreuses, sont en
Angleterre, en Suisse, en Belgique, en Espa-
gne, partout excepté en France, où il n'y a
plus de place pour eux :

Nous pouvons manier à notre aise la tourbe
abjecte qui reste ici.

Elle ne sait rien de vrai, ni sur nous,

Ni sur nos hommes, ni sur nos actes :

Nous avons assez menti pour ça.

Nous \eur ferons nommer qui nous vou-
drons, —

Et des coups de baïonnette si on résistait.
Car ça nous connaît, ça, les coups de baïon-
nette.

« *

Et ces gredins se frottaient les mains.
* »

On se frotte aussi les mains aujourd'hu.
dans les régions officielles.
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