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l'activité de tous de remplir une tâche que
l'administration communale d'Anvers croit
ne pouvoir, pour cause d'insuffisance de
temps, conlier à un seul. De plus, on per-
mettrait à l'étranger de jouer sa partie dans
un concert qui doit être Européen et non
Anversois.

Ad. S.

{Correspondance particulière).
LA HOLLANDE ET UN FRANÇAIS.

Dans le courant de l'année qui vient de
finir, la Hollande a eu la visite d'un voya-
geur, d'un touriste français. Est-ce donc là
un événement si gros, un fait de si grande
importance? Je réponds : oui, quand ce
français est armé d'un crayon qui fait des
croquis exquis et d'une plume qui trace des
tableaux vifs et vraisemblables; oui, quand
ce voyageur s'appelle Félix Narjoux, qu'il
est architecte de la ville de Paris, collabora-
teur de Viollet-le-Duc dans plus d'une publi-
cation, et couronné naguère encore au con-
cours ouvert par l'Encyclopédie d'Architec-
ture ; oui, quand ce voyageur - architecte
publie un livre comme celui qui vient de
paraître à Paris, avec la date de 1876, sous
le titre de « Notes de voyage d'un architecte
dans le Nord-Ouest de l'Europe, par Félix
Narjoux. Croquis et Descriptions. Hollande,
Allemagne, Danemark.

Les 152 premières pages croquent et
décrivent la Hollande. Après les avoir lues,
nous sommes porté à croire qu'aucun fran-
çais, qui aura appris par ces pages à connaî-
tre la Hollande, n'aura encore le cœur —
bien que le français ne manque jamais de
cœur en temps de guerre — de porter en
pleine paix ses pas vers ces nébuleux, silen-
cieux, monotones rivages qu'on appelle la
Hollande.

Nous, qui ne sommes pas ennemis des
Français, et qui aimons mieux la visite d'un
seul Français que de cent mille Prussiens,
nous regretterions que quelque bon Français
en vint à prendre une résolution aussi déso-
lante pour nous autres Hollandais. En faveur
de mon pays, en faveur de la vérité, en fa-
veur du contrat international , je viens
crayonner a mon tour quelques notes sur le
livre qui a bien voulu nous maltraiter; je
viens humblement plaider, en deux petits
articles, la cause de la Hollande.

Que M. Félix Narjoux nous pardonne si, du
fond de la Hollande, nous tâchons d'écrire
eu français.

LA HOLLANDE ET TROIS FRANÇAIS.

Si d'un côté nous en sommes aux regrets
de devoir nous mettre si souvent en opposi-
tion avec ce voyageur français qui nous a
fait l'honneur de venir nous voir chez nous,
il y a quelques mois, d'un autre côté nous
nous sentons heureux de ce que trois autres
français nous aient également visités, il y a
quelques années.

Et ces trois français avaient aussi une
plume et ont aussi écrit un livre. L'un s'ap-
pelle M. Henri Havard; il a vu et revu la
Hollande plus d'une fois. Il écrivit, il n'y a
pas deux ans, La Hollande pittoresque. Voyage
aux villes mortes du Zuiderzee. Voilà un titre
bien trouvé. Cela pique la curiosité. Et de
plus, il y a beaucoup de vrai dans ce titre.
Il y ajouta aussi des croquis, traités dans un

autre genre que ceux de M. Narjoux. Son
livre parut aussi à Paris,

Un autre de ces Français est M. Emile
Montégut, auteur bien connu. Il a parcouru
et étudié la Hollande, il y a de cela à peu
près sept ans. Ses impressions de voyage et
d'art, parurent également à Paris.

Avant eux avait été en Hollande M. Alphonse
Esquiros. Ses articles sur La Néerlande et
la vie Néerlandaise, parurent encore à Paris.
Pauvres parisiens, que vont-ils croire, sinon
qu'il existe au moins trois ou quatre Hol-
lande, tant est différent ce qu'a vu ou ce
qu'en dit chacun de ces Messieurs. Non-
seulement les choses, le pays, mais le peuple
est tout autre, d'après tel ou tel de ces voya-
geurs. Et ces mêmes parisiens pourraient
croire à de nouvelles Hollande encore, s'ils
s'en rapportaient aux différents auteurs fran-
çais que M. Narjoux cite en leur empruntant
les épigraphes ou Motto's de ses chapitres.
Loin de moi de contester en rien l'esprit
inventif des voyageurs français. Les Français
sont, je le sais, de puissants créateurs....
mais cependant il n'y a qu'une seule Hol-
lande en Europe. Le pays et le peuple n'y
sont pas si différents des jours d'Esquiros
aux jours de Narjoux.

Je pourrais donc très-souvent, pour dé-
fendre la Hollande, faire marcher ces trois
Français contre M. Narjoux, sans poser la
question :

Que voulez-vous qu'il fasse contre trois?

Question à laquelle il pourrait donner une
réponse autre que celle du vieil Horace;
mais ces trois à leur tour pourraient, par
leurs réponses, détruire des quartiers en-
tiers d'assertions construits par l'architecte
de Paris.

Guvier, si je ne me trompe, n'avait besoin
que d'un seul membre d'animal pour recon-
struire, à ce qu'il disait, tout l'être vivant.
A mon avis, il y a du Cuvier dans les veines
de chaque Français. Donnez-leur un détail,
ils vous décriront un ensemble. Parfois ou
souvent l'ensemble ne sera pas vrai, mais
d'ordinaire il sera bien trouvé. Ils voient
une ville et ils décrivent la province; ils
rencontrent un individu et ils jugent tout le
peuple. Quelqu'un d'eux a-t-il fait un calem-
bour , un jeu de mots, de génération en gé-
nération ils le répètent.

Le «motto » du livre est comme le sceau du
prince, comme la devise du chevalier; c'est
comme une profession de foi, un programme,
un « épitomé » du livre, un abrégé du cha-
pitre; c'est la face où rayonnent l'esprit et
l'âme du corps qui va suivre. Nous en vou-
lons à plus d'un de ces motto's de M. Narjoux.

Le premier, celui qui a l'honneur de figu-
rer en tête du premier chapitre, est assez
vieux. Ce sont de singuliers conservateurs
que ces Messieurs les Français! Ne voilà-t-il
pas que dans l'an 1876, même un architecte
de la ville de Paris, nous arrive encore avec
un motto emprunté à un flatteur d'un roi de
Prusse. Par un jeu de mots digne de Vol-
taire, mais indigne du livre dont nous par-
lons, Voltaire, pour caractériser en trois
mots la Hollande, c'est-à-dire le pays, le
peuple et le règne animal, a dit : Hollande,
canaux, canards, canailles. M. Narjoux ré-
pète cela à tous ses lecteurs : M. Narjoux
croit-il donc que ce jugement ait jamais
caractérisé la Hollande? que ce jugement
soit applicable à la Hollande qu'il a vue et
qu'il décrit? En ce cas, je lui oppose les
trois français nommés tantôt et plus ou

moins de] trois millions de Néerlandais.
L'auteur voit bien que nous ne le comptons
pas pour peu de chose. S'il croit ce juge-
ment applicable à la Hollande de 1875, à lui
le devoir de le prouver; en atttendant, nous
disons que son premier motto n'est qu'un
jeu de mots qui nous injurie et déshonore
la première feuille d'un livre dont nous vou-
drions pouvoir louer chaque page.

Le motto qui sert de première introduc-
tion au chapitre d'Amsterdam est encore
emprunté à ce même écrivain qui se fit le
serviteur et le flagorneur du vainqueur de
la France : il n'y a pas là, et il n'y eut jamais
une seule syllabe de vrai, car il affirme :
que « des 500,000 hommes qui habitent Am-
sterdam, il n'y en a pas un d'oisif, pas un
pauvre, pas un petit-maître, pas un inso-
lent. » Mais c'est à rendre jaloux Paris
même. Tantôt la Hollande était dépeinte en
trois traits : canaux, canards, canailles, et
voilà maintenant, que cette même Hollande
aurait une ville capitale d'un demi million
d'habitants et pas un oisif, pas un pauvre,
pas un petit-maître, pas même un insolent,
et cela au jour même où Voltaire en per-
sonne s'y trouvait ! Une ville semblable
surpasse tout ce que le soleil ou la lune
a jamais vu; oui, surpasse tout ce qu'un
voyageur français ait jamais vu, mais pas ce
qu'il en raconte. Pourtant quelle erreur men-
songère que ces 500,000 habitants ! Même
aujourd'hui Amsterdam n'a pas 290,000 ha-
bitants ; si elle en avait eu aux temps passés
500,000, Amsterdam serait bien déchue ! Il
faut évidemment que M. Henri Havard re-
vienne et compte aussi Amsterdam parmi
les villes mortes, comme il y compta déjà
Hoorn. Cela promet. Ce motto donne donc
à la ville d'alors plus de 260,000 habitants
de trop. Que les Français, lecteurs de ce
livre, daignent apprendre qu'Amsterdam ne
se meurt pas; les hommes — et les femmes
aussi—y atteignent en général un âge avancé
et jamais elle n'a eu autant d'habitants qu'au-
jourd'hui. Tout le reste de cette citation est
également erroné. Pour s'en convaincre, on
n'aurait qu'à compulser les règlements de
police que la régence d'Amsterdam publiait
aux années où Voltaire vivait en Hollande.
{Wagenaar, Histoire d'Amsterdam, fol. 1, p.
755 et suiv.)

Ces motto's et les autres aussi me sug-
gèrent la remarque suivante : les trois fran-
çais cités en corps d'opposition, ont recours
souvent, et très à propos, pour faire con-
naître la Hollande, à des auteurs hollandais ;
c'est puiser aux sources mêmes; M. Nar-
joux s'en tient plutôt à des auteurs français.
Hâtons-nous de dire qu'un architecte, qui
ne voudrait prendre connaissance d'un pays
que sous le rapport de l'architecture, n'a
guère besoin de consulter de vieux papiers
ni des livres nouveaux. Les pièces du pro-
cès sont les œuvres d'architecture qui se
dressent devant lui et plaident quelque peu
par elles-mêmes la cause qu'elles soutien-
nent. Aussi que de reconnaissance et de
grâces aurions-nous à rendre à M. Félix
Narjoux s'il n'avait fait que voir et juger nos
principaux ouvrages d'architecture! Dans ce
département nous reconnaissons avec bon-
heur l'autorité de sa parole ; nous aimons à
lui rendre cet hommage. Chaque jugement,
sur les monuments qu'il a vus, nous l'avons
entendu avec plaisir; nous avons applaudi
à ses désapprobations comme aussi à ses
approbations ; mais il n'a vu qu'une minime
 
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