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https://doi.org/10.11588/diglit.8249#0041
SUR FERRE. I. Partie.
23
m
C H A P I 1
Etat de la Peinture sur
anciennes vi- On ne connoît dans notre France de mo-
"es Fance nument P^us ancien de Peinture fur verre
sont dans ré- actuellement existant, que la plus grande par-
glife de l'ab- tie des vitres peintes de l'Eglise de l'Abbaye
de s! Denys! royale de St. Denys. Elles paroiffent avoir
été réservées de l'avant-dernier édifice de
l'Eglife de cette Abbaye & placée dans celui
qui fubfifte de nos jours.
Suger , favori de Louis le. Gros & Régent
du Royaume fous Louis VII. fon fils, Abbé
de cette célèbre Abbaye, n'avoit omis ni soins
ni dépenfes pour orner & enrichir le fixieme
bâtiment de l'Eglife de fon Abbaye qu'il
avoit fait reconftruire, & dont la Dédicace
sut saite en 1140. Il nous apprend lui-même
dans l'hiftoire latine manufcrite qu'il a biffée
de fon gouvernement monachal , depuis
traduite en François par Dom Doublet ,
Religieux de cette Abbaye , dont j'emploie
ici la traduction (a), « Qu'il avoit recher-
ché avec beaucoup de soin des faifeurs de
vitres & des compofiteurs de verre de
matières très-exquifes , à favoir , de faphirs
en très-grande abondance, qu'ils ont pul-
vérifés & fondus parmi le verre, pour lui
donner la couleur d'azur ; ce qui le ravif-
foit véritablement en admiration : qu'il avoit
fait venir à cet effet des nations étrangères
les plus fubtils & les plus exquis maîtres,
pour en faire les vitres peintes depuis la
Chapelle de la Sainte Vierge dans le chevet,
jufqu'à celles qui font au deflfus de la prin-
cipale porte à l'entrée de l'Eglife ... Que
la dévotion , lorfqu'il faifoit faire ces vitres
étoit fi grande , tant des grands que des
petits , qu'il trouvoit l'argent en. telle abon-
dance dans les troncs ( b ), qu'il y en avoit
quafi affez pour payer les ouvriers au bout
de chaque femaine. Il ajoute qu'il avoit
établi à la tête de cet ouvrage , un Maître
de l'Art très-expert , & des Religieux pour
avoir l'œil fur la besogne , prendre garde
sur les ouvriers & leur fournir en temps
& saifon tout ce qui leur étoit néceffaire;
lesquelles vitres lui ont beaucoup coûté
pour l'excellence & rareté des matières dont
elles sont compofées ( c ) » .
(<t"> Antiquit. & Recherch. de l'Ab. de S. Den. par D.
Doublet, Bénédiift. Par. i6zs p. 243 , 24*, '-47 Se 185.
( b ) L'usage des troncs dans les Eglises eit donc très-
ancien.
(c) De adininisir. Sug. Abbat. loc. cit. «c Undè quià
r» magni conftant magnifico opère sumptuque prosufo vi-
■-j tri vesliti Se faphirorum materia:, tuitioni ôi refeftioni
: R E VIII.
Verre au douzième Jîecle,
Ce fut dans cette o'ecasion que cet Abbé
sit présent à l'Eglise de Paris , d'un vitreau
rempli de vitres peintes , dont quelques
parties qui avoient été confervées dans un
des vitreaux de la galerie du chœur, re~
préfentoient, très-groffiérement à la vérité,
une efpece de triomphe de la Sainte Vierge,
mais qui ont été démolies depuis peu. On
y reconnoiffoit la même vivacité de coloris ,
sur-tout dans le verre bleu qui en sormoic
le fond , que dans les vitres du même temps
qui fubsistent encore dans quelques Cha-
pelles du chevet de l'Eglise de Saint Denys.
J'ai dit dans les vitres du même temps ,
car sélon Dom Doublet même , toutes les
vitres du chevet ne font pas du même fiecle.
Les vitreaux, par exemple, de la Chapelle
deia Sainte Vierge dans le chevet, dans l'un
defquels l'Abbé Suger eft repréfenté avec
une croffe ( d ), & cette infeription peinte
sur verre, tugerius abbas ; celui d'une Cha-
pelle vers le fond du chevet où Saint Paul
eft repréfenté tournant la meule d'un mou-
lin , auquel les Prophètes apportent des
sacs de bled, fuivant l'infcription en vers
latins , également peinte fur verre , qu'on
lit au deffous , font antérieurs à celui de
la Chapelle de Saint Maurice dans le même
chevet , dans laquelle fut dépofé par les
soins de Saint Louis , dans une châffe qu'il
sit faire , le corps d'un des Martyrs de la
Légion Thébaine, ainfi qu'on le lit dans
les vers latins également peints sur verre,
qui sont au bas dudit vitreau (e), sur lequel
font peints quelques a£tes de la vie de Saint
Maurice.
On peut dire la même chofe de plu-
fieurs autres vitres peintes de la même Eglife
qui repréfentent des actes de la vie de Saint
Louis ; car ce Prince n'a commencé à ré-
gner que 80 ans après la confécration de
cette Eglise , reconftruite par Suger ; dont
une grande partie fut rebâtie à neuf par
les foins de la Reine Blanche, suivant le
témoignage de Guillaume de Nangis. Sa
parfaite conftru£tion , telle qu'elle exifte ,
ne commença que sous l'Abbé Eudes, en
» earum minifterialem magiftrum... conftituimus, qui...
» etiam admirandarum vitrearum operarios ik. materiarrj
faphirorum locupletem adminiftrabit
( d ) Les Abbés Réguliers n'obtinrent la mitre que fous
Philippe Auguste.
( e ) Hic Tliebœorum ssrenuus miles jacet tmus,
Régis srancorum Ludovici nobiU munus,
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C H A P I 1
Etat de la Peinture sur
anciennes vi- On ne connoît dans notre France de mo-
"es Fance nument P^us ancien de Peinture fur verre
sont dans ré- actuellement existant, que la plus grande par-
glife de l'ab- tie des vitres peintes de l'Eglise de l'Abbaye
de s! Denys! royale de St. Denys. Elles paroiffent avoir
été réservées de l'avant-dernier édifice de
l'Eglife de cette Abbaye & placée dans celui
qui fubfifte de nos jours.
Suger , favori de Louis le. Gros & Régent
du Royaume fous Louis VII. fon fils, Abbé
de cette célèbre Abbaye, n'avoit omis ni soins
ni dépenfes pour orner & enrichir le fixieme
bâtiment de l'Eglife de fon Abbaye qu'il
avoit fait reconftruire, & dont la Dédicace
sut saite en 1140. Il nous apprend lui-même
dans l'hiftoire latine manufcrite qu'il a biffée
de fon gouvernement monachal , depuis
traduite en François par Dom Doublet ,
Religieux de cette Abbaye , dont j'emploie
ici la traduction (a), « Qu'il avoit recher-
ché avec beaucoup de soin des faifeurs de
vitres & des compofiteurs de verre de
matières très-exquifes , à favoir , de faphirs
en très-grande abondance, qu'ils ont pul-
vérifés & fondus parmi le verre, pour lui
donner la couleur d'azur ; ce qui le ravif-
foit véritablement en admiration : qu'il avoit
fait venir à cet effet des nations étrangères
les plus fubtils & les plus exquis maîtres,
pour en faire les vitres peintes depuis la
Chapelle de la Sainte Vierge dans le chevet,
jufqu'à celles qui font au deflfus de la prin-
cipale porte à l'entrée de l'Eglife ... Que
la dévotion , lorfqu'il faifoit faire ces vitres
étoit fi grande , tant des grands que des
petits , qu'il trouvoit l'argent en. telle abon-
dance dans les troncs ( b ), qu'il y en avoit
quafi affez pour payer les ouvriers au bout
de chaque femaine. Il ajoute qu'il avoit
établi à la tête de cet ouvrage , un Maître
de l'Art très-expert , & des Religieux pour
avoir l'œil fur la besogne , prendre garde
sur les ouvriers & leur fournir en temps
& saifon tout ce qui leur étoit néceffaire;
lesquelles vitres lui ont beaucoup coûté
pour l'excellence & rareté des matières dont
elles sont compofées ( c ) » .
(<t"> Antiquit. & Recherch. de l'Ab. de S. Den. par D.
Doublet, Bénédiift. Par. i6zs p. 243 , 24*, '-47 Se 185.
( b ) L'usage des troncs dans les Eglises eit donc très-
ancien.
(c) De adininisir. Sug. Abbat. loc. cit. «c Undè quià
r» magni conftant magnifico opère sumptuque prosufo vi-
■-j tri vesliti Se faphirorum materia:, tuitioni ôi refeftioni
: R E VIII.
Verre au douzième Jîecle,
Ce fut dans cette o'ecasion que cet Abbé
sit présent à l'Eglise de Paris , d'un vitreau
rempli de vitres peintes , dont quelques
parties qui avoient été confervées dans un
des vitreaux de la galerie du chœur, re~
préfentoient, très-groffiérement à la vérité,
une efpece de triomphe de la Sainte Vierge,
mais qui ont été démolies depuis peu. On
y reconnoiffoit la même vivacité de coloris ,
sur-tout dans le verre bleu qui en sormoic
le fond , que dans les vitres du même temps
qui fubsistent encore dans quelques Cha-
pelles du chevet de l'Eglise de Saint Denys.
J'ai dit dans les vitres du même temps ,
car sélon Dom Doublet même , toutes les
vitres du chevet ne font pas du même fiecle.
Les vitreaux, par exemple, de la Chapelle
deia Sainte Vierge dans le chevet, dans l'un
defquels l'Abbé Suger eft repréfenté avec
une croffe ( d ), & cette infeription peinte
sur verre, tugerius abbas ; celui d'une Cha-
pelle vers le fond du chevet où Saint Paul
eft repréfenté tournant la meule d'un mou-
lin , auquel les Prophètes apportent des
sacs de bled, fuivant l'infcription en vers
latins , également peinte fur verre , qu'on
lit au deffous , font antérieurs à celui de
la Chapelle de Saint Maurice dans le même
chevet , dans laquelle fut dépofé par les
soins de Saint Louis , dans une châffe qu'il
sit faire , le corps d'un des Martyrs de la
Légion Thébaine, ainfi qu'on le lit dans
les vers latins également peints sur verre,
qui sont au bas dudit vitreau (e), sur lequel
font peints quelques a£tes de la vie de Saint
Maurice.
On peut dire la même chofe de plu-
fieurs autres vitres peintes de la même Eglife
qui repréfentent des actes de la vie de Saint
Louis ; car ce Prince n'a commencé à ré-
gner que 80 ans après la confécration de
cette Eglise , reconftruite par Suger ; dont
une grande partie fut rebâtie à neuf par
les foins de la Reine Blanche, suivant le
témoignage de Guillaume de Nangis. Sa
parfaite conftru£tion , telle qu'elle exifte ,
ne commença que sous l'Abbé Eudes, en
» earum minifterialem magiftrum... conftituimus, qui...
» etiam admirandarum vitrearum operarios ik. materiarrj
faphirorum locupletem adminiftrabit
( d ) Les Abbés Réguliers n'obtinrent la mitre que fous
Philippe Auguste.
( e ) Hic Tliebœorum ssrenuus miles jacet tmus,
Régis srancorum Ludovici nobiU munus,