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Rocznik Historii Sztuki — 34.2009

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Baridon, Michel: Histoire des jardins: quelques points de méthode
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https://doi.org/10.11588/diglit.14576#0027
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HISTOIRE DES JARDINS. QUELQUES POINTS DE METHODE

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6. Schwetzingen, Palissades ajourées et aérées, 1760. Photo J. Evrard et C. Bastin

A la fin du XVIIe siècle, la géométrie perd son statut de science pilote. Le monde scientifique voit se
développer la chimie et les sciences du vivant. Le XVIIIe siècle sera celui de Linné, de Buffon, de Lavoisier.
Il s'interroge sur la nature de l'air, sur la respiration, sur la reproduction des êtres vivants. Il utilise des
méthodes d'investigation expérimentales et empiriques. La démarche du chimiste et du naturaliste l'emporte
sur celle du géomètre. Il ne s'agit plus de poser des principes et de travailler par déduction mais d'observer
sans a priori et de noter les différentes étapes d'un processus avant d'avancer une thèse. Le chimiste anglais
Boyle écrit que l'univers n'est pas un livre écrit en caractères mathématiques (comme Galilée l'avait dit)
mais en caractères corpusculaires. La géométrie étant une partie des mathématiques, la nouvelle représenta-
tion du monde ne la prend plus pour guide infaillible mais pour auxiliaire.

Le style rocaille, troisième forme du jardin régulier européen, se développe en France en rejetant en
partie l'héritage de Le Nôtre dont l'abbé Laugier fait une critique en règle. Les longues palissades lui parais-
sent ennuyeuses, monochromes et dangereuses pour la santé parce qu'elles entravent la circulation de l'air
et font stagner les miasmes.

Ce style privilégie les formes souples et arrondies, supprime les alignements de statues, recherche la
variété dans les jeux d'eau. Ses climats de sensibilité sont la convivialité, la recherche du plaisir sans céré-
monie. En France il s'illustre dans le Jardin français de Louis XV au Petit Trianon. En Allemagne, il réussit
très bien à Schwetzingen (Fig. 6), à Sanssouci et dans de nombreuses cours allemandes.

Le style paysager se développe en Angleterre dès 1700 et gagne le continent un bon demi-siècle plus
tard. Plus radical que le style rocaille, il rejette la régularité et cherche à faire du jardin un paysage qui serait
conçu par un peintre, c'est-à-dire une représentation de la nature aussi fidèle que possible et néanmoins assez
élaborée pour être une oeuvre d'art. Ce style bannit les longues allées rectilignes et favorise des tracés cir-
culaires où le promeneur fait face successivement aux quatre points cardinaux et découvre comme par sur-
prise des scènes aussi variées que possible.

Sa structure est un triomphe de l'empirisme : parcourir un jardin est une expérience, on ne le connaît
que quand on est ramené à son point de départ après avoir mentalement noté les étapes parcourues (Fig. 7).

C'est aussi et surtout une illustration de la psychologie de Locke, philosophe et empiriste convaincu
lui-même, pour qui la vie mentale repose sur les stimulations sensorielles qui sont transmises au cerveau par
le tissu vivant de nos organes des sens. Plus nos sens sont sollicités, plus nous sommes actifs intellectuelle-
ment, plus nous enrichissons notre compréhension du monde. Le fait d'avoir le soleil tantôt sur sa gauche
puis sur sa droite, de longer des rideaux d'arbres aux couleurs aussi variées que possible offre la meilleure
façon de construire notre compréhension de la nature.

Les climats de sensibilité de ce style sont plus variés que ceux du style rocaille. Ils peuvent être som-
bres ou mélancoliques car le jardin paysager fait entrer le temps sous toutes ses formes dans la construction
intellectuelle du monde. Le temps de la promenade, mais aussi le temps des saisons qui change les couleurs
 
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