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Fait trouver quelque analogie entre les deux hommes soutenant la figure colossale du roi, et les nom-
breux guerriers qui, dans le monument de Nakschi-Roustam {Ker-Porter, vol. II, pi. 17), soutiennent
l'architrave sur laquelle le monarque est placé debout. Mais la différence entre les bas-reliefs de
Bogaz-Reui et ceux de l'ancienne Perse n'en est pas moins fort grande. Ces derniers sont exécutés
avec plus d'art, de symétrie ; ils offrent, dans les amples vêtements des Mèdes, dans la chevelure artis-
tement bouclée de toutes les figures, comme dans les nombreux accessoires, des détails d'un fini et
d'une délicatesse que l'on rechercherait en vain dans les nôtres. Ils en diffèrent par le costume des per-
sonnages, et, autant que nous en pouvons juger, par le style.
Presque toujours ils sont chargés de caractères cunéiformes ou autres, tandis qu'ici on n'aperçoit
pas la moindre trace d'écriture. Aucune femme ne parait sur les monuments élevés par Darius et par
ses successeurs; dans l'enceinte de Yasili-Kaïa, une princesse sans voile, tenant un sceptre, marchant
sur un lion, suivie d'un cortège nombreux de personnes de son sexe, ayant également le visage dé-
couvert, semble appartenir à ces temps reculés où , sur les bords de l'Euphrate, des reines guerrières
fondaient, dit-on, ou affermissaient des empires, et où, probablement, les moeurs de l'Asie n'étaient
point encore ce qu'elles sont devenues depuis Cyrus, et surtout depuis l'établissement du mahométisme.
Dans les notes explicatives qui accompagnent ses dessins, M. Texier suppose, d'après la position géo-
graphique du monument, qu'il est l'ouvrage des Leuco-Sjriens, peuple quia eu de fréquents rapports
avec les Amazones habitant les terres voisines de ce pays. C'est la reine de ces femmes belliqueuses,
suivie de ses compagnes, qui vient ici contracter une alliance avec un prince étranger. Nous adopte-
rons volontiers une partie de l'explication de M. Texier, mais nous ne saurions l'admettre dans son
entier. Nous croyons, comme lui, que les figures qui couvrent les parois à droite sont des femmes; ce-
pendant aucune d'elles n'est armée, et d'ailleurs les Amazones, leurs travaux guerriers, leurs migra-
tions appartiennent, selon nous, plus à la fable qu'à l'histoire. Ce serait plutôt, d'après l'opinion d'un
de nos confrères , une apothéose; Astarote , Astarté, la Vénus des Assyriens, appelle à l'immortalité un
monarque vertueux , père de ses sujets. D'autres y verraient peut-être un des trophées de Sémiramis,
malgré l'absence des inscriptions qui accompagnent ordinairement les monuments attribués à cette
reine. Enfin, si, renonçant aux interprétations allégoriques, nous méfiant des traditions dans le goût
oriental, nous voulions chercher une explication dans les notions incomplètes que nous fournit l'his-
toire., aurait-on voulu représenter une entrevue, peut-être un mariage, entre un prince de l'ancienne
Phrygie et la fille d'un roi des Mèdes, peuple dominateur en Asie, après la chute des Assyriens? En
effet, nous croyons reconnaître l'emblème de la fécondité parmi les idoles qui, sculptées à l'entrée
de l'enceinte, semblent présider à la fête. De plus, nous savons par Hérodote que le territoire de
la Phrygie s'étendait jusqu'à l'Halys; et la limite de l'empire des Mèdes était formée, à une certaine
époque, par le même fleuve, dont Soandus n'est éloigné que d'une douzaine de lieues. L'entrevue ou ,
si l'on veut, la réception d'une princesse, devait naturellement avoir lieu dans une grande ville, voi-
sine des frontières.
Nous aurions donc ici un monument appartenantau moins à la familleGordienne, qui régna dans ces
contrées entre les années 740 et ^70 avant 1ère vulgaire: c'est sans doute à la même dynastie qu'il faut
attribuer, sinon le rocher sculpté de la vallée de Doganlou, du moins l'inscription qui a été découverte
par M. le colonel Leake, et qui, depuis, a exercé la sagacité de deux de nos confrères, MM. Letronne
et Saint-Martin (1); M. Osann, professeur à Giessen, en a fait, depuis, l'objet d'un travail particulier(2).
Nous ne pousserons pas plus loin nos hypothèses. Nous n'avons plus les Phrygiaca d'Agatharchide,
d'Hermésianax, d'Arétazès de Gnide, le Phrygias logos de Démocrite, les deux ouvrages Péri Pfiry-
gias, composés, l'un par Cornélius Alexandre, l'autre par Métrophanes , qui était né dans le pays. Ré-
duits, comme nous le sommes, à quelques passages des auteurs qui nous restent, nous nous trouvons
même dans l'impossibilité de déterminer d'une manière certaine la suite de ces anciens princes qui,
presque tous, portaient le nom de Midas et de Gordius. Nous ne connaissons pas davantage l'histoire
d'Arbace, de Mandacès, de Déjocès, de Sosarmus, roi des Mèdes, dont une fille ou une sœur vient
(I) Journal des Savants, octobre 1820, page 625; avril 1821 , Grieschischen Inschrist, etc., von Friederich Osann , Leipzig
page 247. und Darmstadt, i83o, in-4°
(2)Midas, oder Erklaerungsversuch der erweislich aelteslen
Fait trouver quelque analogie entre les deux hommes soutenant la figure colossale du roi, et les nom-
breux guerriers qui, dans le monument de Nakschi-Roustam {Ker-Porter, vol. II, pi. 17), soutiennent
l'architrave sur laquelle le monarque est placé debout. Mais la différence entre les bas-reliefs de
Bogaz-Reui et ceux de l'ancienne Perse n'en est pas moins fort grande. Ces derniers sont exécutés
avec plus d'art, de symétrie ; ils offrent, dans les amples vêtements des Mèdes, dans la chevelure artis-
tement bouclée de toutes les figures, comme dans les nombreux accessoires, des détails d'un fini et
d'une délicatesse que l'on rechercherait en vain dans les nôtres. Ils en diffèrent par le costume des per-
sonnages, et, autant que nous en pouvons juger, par le style.
Presque toujours ils sont chargés de caractères cunéiformes ou autres, tandis qu'ici on n'aperçoit
pas la moindre trace d'écriture. Aucune femme ne parait sur les monuments élevés par Darius et par
ses successeurs; dans l'enceinte de Yasili-Kaïa, une princesse sans voile, tenant un sceptre, marchant
sur un lion, suivie d'un cortège nombreux de personnes de son sexe, ayant également le visage dé-
couvert, semble appartenir à ces temps reculés où , sur les bords de l'Euphrate, des reines guerrières
fondaient, dit-on, ou affermissaient des empires, et où, probablement, les moeurs de l'Asie n'étaient
point encore ce qu'elles sont devenues depuis Cyrus, et surtout depuis l'établissement du mahométisme.
Dans les notes explicatives qui accompagnent ses dessins, M. Texier suppose, d'après la position géo-
graphique du monument, qu'il est l'ouvrage des Leuco-Sjriens, peuple quia eu de fréquents rapports
avec les Amazones habitant les terres voisines de ce pays. C'est la reine de ces femmes belliqueuses,
suivie de ses compagnes, qui vient ici contracter une alliance avec un prince étranger. Nous adopte-
rons volontiers une partie de l'explication de M. Texier, mais nous ne saurions l'admettre dans son
entier. Nous croyons, comme lui, que les figures qui couvrent les parois à droite sont des femmes; ce-
pendant aucune d'elles n'est armée, et d'ailleurs les Amazones, leurs travaux guerriers, leurs migra-
tions appartiennent, selon nous, plus à la fable qu'à l'histoire. Ce serait plutôt, d'après l'opinion d'un
de nos confrères , une apothéose; Astarote , Astarté, la Vénus des Assyriens, appelle à l'immortalité un
monarque vertueux , père de ses sujets. D'autres y verraient peut-être un des trophées de Sémiramis,
malgré l'absence des inscriptions qui accompagnent ordinairement les monuments attribués à cette
reine. Enfin, si, renonçant aux interprétations allégoriques, nous méfiant des traditions dans le goût
oriental, nous voulions chercher une explication dans les notions incomplètes que nous fournit l'his-
toire., aurait-on voulu représenter une entrevue, peut-être un mariage, entre un prince de l'ancienne
Phrygie et la fille d'un roi des Mèdes, peuple dominateur en Asie, après la chute des Assyriens? En
effet, nous croyons reconnaître l'emblème de la fécondité parmi les idoles qui, sculptées à l'entrée
de l'enceinte, semblent présider à la fête. De plus, nous savons par Hérodote que le territoire de
la Phrygie s'étendait jusqu'à l'Halys; et la limite de l'empire des Mèdes était formée, à une certaine
époque, par le même fleuve, dont Soandus n'est éloigné que d'une douzaine de lieues. L'entrevue ou ,
si l'on veut, la réception d'une princesse, devait naturellement avoir lieu dans une grande ville, voi-
sine des frontières.
Nous aurions donc ici un monument appartenantau moins à la familleGordienne, qui régna dans ces
contrées entre les années 740 et ^70 avant 1ère vulgaire: c'est sans doute à la même dynastie qu'il faut
attribuer, sinon le rocher sculpté de la vallée de Doganlou, du moins l'inscription qui a été découverte
par M. le colonel Leake, et qui, depuis, a exercé la sagacité de deux de nos confrères, MM. Letronne
et Saint-Martin (1); M. Osann, professeur à Giessen, en a fait, depuis, l'objet d'un travail particulier(2).
Nous ne pousserons pas plus loin nos hypothèses. Nous n'avons plus les Phrygiaca d'Agatharchide,
d'Hermésianax, d'Arétazès de Gnide, le Phrygias logos de Démocrite, les deux ouvrages Péri Pfiry-
gias, composés, l'un par Cornélius Alexandre, l'autre par Métrophanes , qui était né dans le pays. Ré-
duits, comme nous le sommes, à quelques passages des auteurs qui nous restent, nous nous trouvons
même dans l'impossibilité de déterminer d'une manière certaine la suite de ces anciens princes qui,
presque tous, portaient le nom de Midas et de Gordius. Nous ne connaissons pas davantage l'histoire
d'Arbace, de Mandacès, de Déjocès, de Sosarmus, roi des Mèdes, dont une fille ou une sœur vient
(I) Journal des Savants, octobre 1820, page 625; avril 1821 , Grieschischen Inschrist, etc., von Friederich Osann , Leipzig
page 247. und Darmstadt, i83o, in-4°
(2)Midas, oder Erklaerungsversuch der erweislich aelteslen