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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 8,1.1906

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Mauclair, Camille: J.-J. Henner
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https://doi.org/10.11588/diglit.44813#0022

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L’ART DECORAT1F

Quand Henner peignait une Madeleine, il
ne faisait attention qu'au fait d’epancher
avec une gräce savoureuse, sur une epaule
nacree, le flöt odorant d’une fauve et riche
chevelure. Son Saint Sebastien offre, au
Luxembourg, un contraste bien curieux avec
celui de Ribot. Ribot a peint en realiste de
talent solide un Komme rälant. Henner a
peint aussi bien Adonis que saint Sebastien.

rines pourtant exquises de Corot, les nym-
phes de Henner sont les habitantes des
paysages de Corot. La simplification puls
sante des corps et des sites qui les entourent
les eleve presque au symbolisme. II n’y a
meme pas un accessoire : le poeme de ces
nudites est sans date et s’impose par le
seul prestige des tonalites. C’est la peinture,
et rien d’autre. On s’est agace de la mono-


Une replique de Ribera, une replique de
Prudhon, une etude d’anatomie, une etude
de nuances, mais non deux tableaux de
pensee religieuse. L’ceuvre pieuse de Henner
n’a qu’un interet purement pictural.
Ses nymphes sont l’expression la plus
precise de son äme. On y sent l’antique,
comme on le sent dans les sonnets latins
de Heredia, dont Henner m’amenait ä par-
ier : arts differents, sentiment semblable.
Le poete-orfevre, l’emailleur et le ciseleur,
avait le meme amour que le virtuose des
lumieres diffuses et des magiques incerti-
tudes de la penombre. Les nymphes de
Henner sont profondement melees au mys-
tere sylvain, et la divine inertie de leur
instinctivite heureuse donne ä leurs visages
un charme tacilurne. C’est toujours la meme,
c’est l’eglogue incarnee, avec une souve-
raine intuition de la poesie pastorale, dans
l’ombre, revee par Chenier, qui laisse pre-
cise pourtant la beaute. Plus que les figu-

tonie de ces beiles choses, inlassablement
repetees par Henner. On a essaye de les
imiter. II les a lui-meme imitees, et parfois
mal, dans les petites choses de commerce
qu’exhibaient aux vitrines du boulevard les
marchands de mauvaise peinture. II a meme
ainsi failli reduire a un procede la divine
harmonie qui chantait dans son äme ele-
giaque. Et notre epoque pardonne mal aux
hommes introubles : eile leur reproche de
faire toujours la meme chose, et s’ils en
tentent une autre, eile leur reproche sarcas-
tiquement de n’y pouvoir rcussir. Mais les
nymphes de Henner sont malgre nous et
malgre lui d’admirables Creations dues ä
une technique profonde et non ä un pro-
cede. Elles sont le resultat d’une connais-
sance parfaite des moyens eternels de la
grande peinture.
Ses portraits sont non moins beaux. La
Jeune fille en deuil du Luxembourg est ce
qu’on peut imaginer de plus sür en art, par

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